Retrouver sa libido

Dernière mise à jour 04/11/20 | Questions/Réponses
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La perte de libido peut être traumatisante. Mais il existe des solutions pour retrouver l’envie de l’autre. Le Pr Bianchi-Demicheli des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) donne des pistes.

Le chiffre 

70% des couples qui suivent une thérapie sexuelle parviendraient à améliorer leur vie sexuelle.

On estime que 6 à 13% des femmes et 3% des hommes souffriraient de «désir sexuel hypoactif avéré». Si les causes sont multiples, il existe cependant des solutions pour retrouver une libido au beau fixe. Les conseils du Pr Francesco Bianchi-Demicheli, sexologue responsable de l’unité de médecine sexuelle et sexologie, et médecin adjoint agrégé au Département de psychiatrie des HUG.

Qu’est-ce qui fait que le désir sexuel s’éteint?

C’est une vaste question, tant le désir est un phénomène personnel, dépendant de beaucoup de facteurs, à la fois biologiques, psychiques, sociaux et relationnels. Il peut y avoir, pour commencer, des causes liées à la santé physique (fatigue, manque d’activité physique, certaines maladies génétiques, affections gynécologiques et/ou urologiques, maladies hormonales, neurologiques et infectieuses, ou encore maladies chroniques).

La prise de certains médicaments (notamment des antidépresseurs) peut aussi être la source de troubles du désir, tout comme la consommation de drogues ou d’alcool de manière excessive. Le stress, les troubles psychiques comme la dépression ou les troubles anxieux sont connus pour avoir des répercussions sur la libido, tout comme le fait d’avoir eu des expériences négatives dans le passé ou des traumatismes sexuels.

Des facteurs relationnels comme une peur de l’engagement, des attentes négatives envers la relation, un trop gros besoin sexuel du partenaire ou encore un traitement d’infertilité peuvent également altérer la libido. La grande consommation d’écrans est parfois accusée d’annihiler le désir. Plus que le téléphone lui-même, c’est le désintérêt de l’autre qui est problématique. «Lorsque l’on est focalisé sur un écran, on est ailleurs, ce qui nuit à la communication et à la construction de la relation», constate le Pr Francesco Bianchi-Demicheli. Enfin, de récentes études suggèrent que le désir serait régulé par une sorte de rythme circadien – à la manière du sommeil-, qui ne dépend pas de la stimulation. «Dans certains couples ces cycles sont très synchronisés, dans d’autres, moins.»

La faute aux hormones?

L’une des pistes permettant de comprendre les fluctuations du désir se trouve du côté des hormones. Chez l’homme comme chez la femme, la testostérone est l’une des hormones clé dans le déclenchement du désir et le comportement sexuel. En pleine explosion lors de l’adolescence, elle connaît ensuite différentes variations, en particulier chez les femmes, notamment avec l’ovulation ou la grossesse. Cette action des hormones sur la libido expliquerait aussi que certaines femmes prenant une pilule contraceptive constatent une baisse de désir.

A partir de la pré-ménopause, le taux d’androgènes baisse sensiblement, influant sur le désir mais aussi sur la physiologie, avec parfois une sécheresse vaginale. «Environ 2 femmes pré-ménopausées sur 3 ont alors une activité sexuelle réduite, note le spécialiste. Chez les hommes, l’andropause est plus progressive et l’impact sur le désir sexuel n’est constaté que vers 60-70 ans».

Une thérapie androgénique, qui consiste à administrer de la testostérone par voie intra-veineuse, patchs ou crème, peut être proposée, mais uniquement dans des situations particulières, par exemple chez la femme ménopausée si la baisse de libido est due à un changement hormonal. Mais elle entraîne un risque d’effets secondaires (maladie cardiovasculaire, atteintes du foie et des reins, tumeurs…) et comporte des contre-indications.

Le désir «hypoactif», c’est quoi?

On distingue différents types de troubles de la libido: le trouble primaire, quand le désir sexuel a toujours été faible ou absent. Le trouble secondaire, quant à lui, correspond à un désir qui était présent, mais qui a diminué ou disparu progressivement ou subitement. Dans le cas du trouble situationnel, le désir est faible ou absent dans certaines situations, par exemple lorsque les enfants dorment dans la chambre à côté. Enfin, le trouble généralisé apparaît dans n’importe quelle situation et indépendamment du partenaire.

Bien sûr, certaines personnes ne souffrent pas de cette baisse de désir sexuel. Mais si elle engendre des souffrances psychiques individuelles et/ou au sein du couple, «il est alors important d’essayer de trouver des solutions auprès d’un médecin ou d’un spécialiste des questions de sexologie aux compétences reconnues», conseille le Pr Bianchi-Demicheli.

La libido peut-elle revenir?

La première chose à dire est qu’il n’existe aucune recette miracle pour retrouver le désir et se «forcer» à avoir des rapports sexuels n’est pas une bonne idée. «Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise fréquence des rapports. Certains couples ont peu de relations sexuelles, mais de très bonne qualité, explique le spécialiste. Lorsqu’une relation est désexualisée, il est difficile de revenir en arrière. Mais parfois le désir qui s’éteint va se rallumer ailleurs…». Si les troubles durent depuis plusieurs mois, il est conseillé de consulter dans un premier temps un généraliste ou un gynécologue, qui évoquera le contexte social, familial et psychologique, et pourra proposer un bilan de santé général pour déterminer l’origine du problème (psychologique, physiologique, hormonal) et éventuellement le traiter. Le cas échéant, il orientera le patient vers un spécialiste en médecine sexuelle et en sexologie.

Ces thérapies sexuelles peuvent aider à éliminer certains comportements, des craintes, des tabous ou des problèmes de communication dans le couple. «Le désir est une création continue, c’est un travail au quotidien, sur soi-même et face à l’autre, conclut le Pr Bianchi-Demicheli. Il ne peut être réduit à la biologie pure, c’est bien plus complexe que cela.»

À savoir

La sexualité est un domaine riche et complexe. Certains de ses mécanismes restent d’ailleurs méconnus. Bien des hommes et des femmes ignorent encore la physiologie et le fonctionnement même de leur sexualité, et ne connaissent pas les multiples chemins menant au plaisir. Et il en va de même des troubles sexuels et du désir qui sont plus nombreux qu’on ne le pense.

« J’ai envie de comprendre… ma sexualité (Homme) » et « J’ai envie de comprendre… ma sexualité (Femme) », éditions Planète Santé.

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Paru dans L’Illustré le 19/08/2020.

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