Infections: il est possible de mieux se protéger

Dernière mise à jour 27/02/18 | Article
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Gastroentérites, rhumes, angines: chaque hiver c’est la même chose, il y a ceux qui enchaînent les infections et ceux qui semblent protégés contre tous les microbes environnants.

De quoi on parle?

On sait que les enfants, les personnes âgées ou atteintes d’une maladie chronique, ainsi que les femmes enceintes, sont plus fragiles face aux infections. Mais parmi les adultes en bonne santé, tout le monde ne jouit pas de la même immunité. Si une partie de la capacité à vaincre les microbes dépend de notre patrimoine génétique, notre système immunitaire est également sensible à notre mode de vie. Mieux comprendre comment se défend l’organisme peut aider à mieux se protéger face aux microbes et à développer de nouvelles stratégies de protection pour les plus fragiles.

Les virus et bactéries auraient-ils des cibles favorites ou certaines personnes développent-elles une parade aux maux de l’hiver? La réponse est plus complexe, au moins autant que notre système immunitaire! Mais des recherches récentes permettent de mieux comprendre pourquoi certains d’entre nous se révèlent plus fragiles, et ouvrent des pistes pour mieux les protéger.

Précieuses bactéries

Pour se protéger, l’organisme dispose de différentes barrières, à commencer par la peau et les muqueuses, interfaces majeures avec notre environnement. Outre la protection mécanique, notamment contre le froid, la chaleur, les chocs, elles abritent aussi différentes populations bactériennes qui contribuent à juguler les invasions microbiennes. L’air froid et sec, lié à la saison hivernale, mais aussi parfois à une climatisation mal réglée, assèche les muqueuses et ouvre la voie aux pathogènes qui peuvent pénétrer plus facilement les voies aériennes.

Nichées au plus profond de notre tube digestif, les bactéries du microbiote intestinal seraient, elles aussi, précieuses pour faire face aux infections. «Même s’il nous reste beaucoup à découvrir dans le rôle précis qu’elles jouent, il semble tout à fait plausible aujourd’hui qu’il existe des relations entre ces bactéries intestinales et les cellules du système immunitaire», estime le Pr Jacques Schrenzel, responsable du laboratoire central de bactériologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Le médecin relate les résultats de travaux récents indiquant que des différences dans le microbiote des patients pourraient moduler la réponse à des immunothérapies contre le cancer.

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Mutations génétiques

A l’échelle cellulaire, c’est le système immunitaire qui est le garant de notre résistance aux infections. Des dysfonctions peuvent cependant se manifester très tôt, dès les premiers jours de la vie. Elles sont dues la plupart du temps à des mutations génétiques, pas toujours bien connues. «Il s’agit de maladies rares, et nous découvrons encore au fil des cas de nouveaux gènes impliqués dans la réponse immunitaire», explique Pre Klara Posfay-Barbe, cheffe de service de pédiatrie générale à l’hôpital des enfants des HUG, qui présentera sa leçon inaugurale «Infection: dès que l’on cesse de se défendre, il faut prendre l’offensive», le 8 février prochain à l’Université de Genève*. L’«offensive» passe pour certains enfants par une greffe de moelle osseuse. Pour d’autres, des injections régulières d’immunoglobulines sont également une option, pour suppléer le système immunitaire déficient. Dans certains cas, la mutation ne met pas en péril toute l’immunité, mais augmente la susceptibilité à certains pathogènes (méningocoques, pneumocoques), ou rend les symptômes particulièrement sévères (grippe). Rien ne peut guérir ces enfants, mais la vaccination, ou selon les cas une antibiothérapie prophylactique, peut permettre de mieux les protéger.

Système vieillissant

Si une part de notre immunité est dite «innée», l’autre part se construit au fil du temps. «Le système immunitaire n’atteint sa maturité que vers 5-7 ans», souligne la pédiatre. La spécialiste rappelle que la maturation du système immunitaire dépend aussi de l’exposition aux microbes. «C’est tout à fait normal que les enfants qui sont à la crèche soient plus fréquemment malades la première année. Après tout rentre dans l’ordre, généralement, et ils sont mieux protégés.»

Mais il en va pour les cellules immunitaires comme pour la mémoire: les années qui passent les mettent à mal. «Il y a effectivement un vieillissement du système immunitaire, constate la Pre Posfay-Barbe. Ceci explique notamment que des virus communs se réveillent chez les personnes âgées.» Plus de la moitié des plus de 80 ans développent ainsi un zona, infection liée à la résurgence du virus de la varicelle. Autre problème pour les seniors, cette baisse d’immunité réduit l’efficacité des vaccins. Rendre les vaccins plus immunogènes pour ces personnes est ainsi un axe de recherche majeur.

Car pour les plus fragiles, la vaccination reste un des meilleurs outils de protection. «Développer de nouveaux vaccins pour ces populations à risque pourrait être utile, mais il faudrait déjà utiliser correctement ceux dont on dispose, insiste Klara Posfay-Barbe. Aux HUG, nous avons par exemple développé un programme de vaccination pour tous les enfants transplantés hépatiques, et on s’est rendu compte que beaucoup n’étaient pas à jour dans le calendrier vaccinal.» Or tous les patients greffés suivent, à vie, un traitement qui évite le rejet du greffon mais au prix d’une diminution de l’efficacité de leur immunité et donc d’une plus grande vulnérabilité aux infections.

Soigner son hygiène de vie

Pour ceux qui sont en bonne santé et voudraient le rester, est-il possible de «booster» son immunité, comme le clament tant de produits dans les rayons bien-être des magasins? «A ma connaissance, il n’y a pas de substance miracle», sourit Klara Posfay-Barbe, qui rappelle la difficulté de tester avec une méthodologie solide tous les articles sur le marché. Outre une efficacité qui n’est pas prouvée, certains compléments alimentaires peuvent se révéler dangereux: les consommateurs doivent donc veiller à la provenance des produits et en parler avec leur médecin s’ils suivent un traitement.

Au quotidien, pour faire face aux infections, une bonne hygiène de vie reste la meilleure arme. Une alimentation équilibrée, riche en végétaux, et surtout un sommeil de qualité sont essentiels au bon fonctionnement des cellules immunitaires. La réponse aux vaccins est ainsi moins bonne chez ceux qui ne dorment pas assez, alors que le risque de s’enrhumer serait multiplié par quatre en dessous de six heures de sommeil par nuit. Enfin, le stress chronique et le tabac sont aujourd’hui considérés comme deux ennemis majeurs de nos défenses naturelles.

Cancers: une défaillance de l’immunité?

Les infections virales ou bactériennes ne sont pas les seules cibles du système immunitaire. Depuis près d’un demi-siècle, des scientifiques ont tenté de démontrer qu’il s’attaquait aussi aux cellules cancéreuses. C’est finalement les succès récents de traitements qui activent l’immunité, les immunothérapies, qui sont venus soutenir cette hypothèse. «On sait maintenant que le système immunitaire élimine des cellules anormales. Si cet équilibre se rompt, les cellules tumorales peuvent proliférer, explique le Pr Olivier Michielin, chef de l’oncologie personnalisée analytique du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Aujourd’hui on considère qu’un échappement au système immunitaire est une étape nécessaire au développement d’un cancer.» Et les stratégies des cellules tumorales pour «échapper» à nos lignes de défense se révèlent complexes. Elles peuvent devenir moins immunogènes, donc moins repérables par les lymphocytes, ou priver ces derniers d’éléments essentiels à leur bon fonctionnement, et même détourner à leur profit des mécanismes d’auto-régulation habituellement utiles pour nous protéger des maladies auto-immunes.

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*Leçon présentée le 8 février 2018 à 12h30 au CMU - Auditoire Alex-F Müller A250, avenue de Champel 7, Genève.

Paru dans Le Matin Dimanche le 04/02/2018.

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