Parler du suicide, oui. Mais comment?
Métamorphose du corps, émancipation sociale, débordement hormonal: l’adolescence constitue souvent une étape de vie tumultueuse. Dans des moments de crise, le jeune adulte, déstabilisé, peut vouloir quitter le monde, juste un instant... pour oublier les problèmes.
«Je ne voulais pas mourir, je voulais juste me tuer», témoigne Violaine dans l’ouvrage «No Suicide», édité par Children Action. Mais comment éviter d’en arriver là? Un pan important du travail de prévention passe par la famille et l’entourage social: la sensibilisation du réseau de proximité ou proximal, dans le jargon des professionnels de santé.
Ce n’est pas un choix
«Le suicide, il faut en parler. Mais pas n’importe comment», préviennent la Dre Anne Edan, responsable de l’unité de crise, rattachée au service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, et Nathalie Schmid Nichols, psychologue responsable du centre d’étude et de prévention du suicide.
«Lorsqu’on aborde ce thème, évitons la fascination. Se suicider n’est pas romantique. On y songe dans un état de détresse. Ce n’est pas un choix ni un acte de courage. C’est au contraire l’absence de choix face à une situation perçue comme une impasse», explique Nathalie Schmid Nichols.
«S’ils perçoivent un danger pour leur enfant, il est important que les parents abordent le sujet avec l’adolescent. Ils doivent se manifester, être présents. Ils peuvent très bien dire: "Nous avons vu quelque chose. Tu n’es pas seul. Nous sommes là, et il existe des professionnels qui peuvent t’entendre". Si l’adolescent reste muré dans son silence, il faut solliciter une consultation, par exemple à l’unité de crise», souligne la Dre Anne Edan.
Eviter la contagion
«Après un passage à l’acte, abouti ou non, il faut s’assurer que le réseau proximal – les proches, le médecin de famille ou les assistants sociaux – ait un effet contenant pour éviter la récidive… ou la contagion», reprend la Dre Anne Edan.
Là encore, le contact avec la famille joue un rôle important dans la prise en charge du patient. Les soignants évaluent la qualité de la relation entre le jeune et ses parents. Ils essaient de comprendre aussi la façon dont sont perçus le discours et les actes de l’adolescent.
«Penser à la mort est humain. Penser au suicide n’est pas banal. Si un jeune exprime des pensées suicidaires, il faut lui montrer qu’on est à l’écoute. On peut également lui rappeler l’existence de la HelpAdoLine gérée par le centre d’étude et de prévention du suicide», rappelle Nathalie Schmid Nichols.
Pulsations - septembre-octobre 2012