Prise de poids durant la ménopause: une fatalité?
Passage inévitable dans la vie d’une femme, la ménopause est établie après douze mois d’absence définitive des règles. Un mécanisme naturel dû à l’arrêt de la sécrétion hormonale (œstrogènes et progestérone) par les ovaires, qui survient généralement entre 45 et 55 ans. La période de la périménopause entourant cette échéance s’accompagne souvent d’une multitude de symptômes modérés à sévères, tels que bouffées de chaleur, troubles du sommeil, humeur dépressive ou irritable… mais aussi une augmentation significative du poids. «La prise de poids lors de cette transition ménopausique est souvent d’ordre multifactoriel», souligne le Dr Jorge César Correia, médecin chef de clinique dans l’Unité d’éducation thérapeutique du patient aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), qui accompagne les femmes concernées par une prise de poids durant cette période.
Ménopause: quels aliments privilégier?
La période de transition ménopausique est marquée par des changements hormonaux, métaboliques et psychologiques. Pour répondre aux besoins de l’organisme durant cette période, tout en soulageant certains symptômes tels que bouffées de chaleurs, irritabilité, insomnie, entre autres, une amélioration de la qualité globale de l’alimentation est recommandée, associée à une légère réduction de l’apport calorique.
L’assiette idéale doit ainsi apporter:
- Des fibres: contenues en particulier dans les fruits et légumes.
- Du fer: présent dans les céréales complètes, les légumineuses, la viande maigre, les œufs, etc.
- Du magnésium: dans les légumes à feuilles vertes, les noix, les graines, etc.
- Des phyto-œstrogènes: présents dans le soja.
- Du calcium: apporté par les produits laitiers, les noix, les graines, les haricots, entre autres.
Il est conseillé d’éviter les aliments épicés, l’alcool et la caféine pour limiter l’apparition de bouffées de chaleur.
Fluctuation d’hormones
Avant l’arrêt des règles se met en place un ralentissement progressif de la sécrétion des hormones sexuelles féminines, les œstrogènes, et une production accrue d’hormones masculines, les androgènes. Ces modifications hormonales – en particulier la perte de la protection œstrogénique – favorisent un développement de la masse grasse et une perte de la masse maigre. «Avant même que la balance n’indique une prise de poids factuelle, on peut observer des changements au niveau de la composition corporelle, avec une perte de muscle et une prise de graisse, particulièrement au niveau du ventre, ce qui est néfaste pour la santé», constate le spécialiste. Dans certains cas, un phénomène appelé syndrome métabolique s’installe, avec une augmentation du mauvais cholestérol, une hypertension artérielle et une obésité abdominale, menant à une augmentation du risque cardiovasculaire (lire encadré).
L’âge en cause
La fluctuation hormonale n’est pas la seule raison de la prise de poids en période de périménopause. En effet, plusieurs études suggèrent que le vieillissement jouerait, en tant que tel, un rôle important dans la diminution de la masse maigre. «Avec l’âge, hommes comme femmes sont concernés par une baisse du métabolisme de base, c’est-à-dire la capacité de l’organisme à brûler des calories au repos, explique Dr Correia. La compensation de l’apport calorique par l’alimentation baisse, ce qui favorise la prise de poids.»
À ce facteur physiologique se superpose souvent une dimension psychologique importante. La ménopause est marquée par une fluctuation émotionnelle pouvant s’accompagner de symptômes tels que dépression, anxiété, stress, troubles de l’humeur… «De nombreuses femmes développent un problème lié à leur image corporelle, compensé par des épisodes d’alimentation émotionnelle pour lutter contre cette détresse, contribuant, là encore, à une prise de poids durant cette période», ajoute Dr Correia.
Des besoins différents
Hormonales, physiologiques ou psychologiques, les causes de cette prise de poids sont donc multiples. Chaque femme peut ainsi agir différemment selon son profil spécifique, son stade de transition ménopausique, la gravité des symptômes ou encore les éventuelles complications de santé déjà présentes. «La prévention est la clé, insiste le médecin. Chez les femmes qui gardent une bonne hygiène de vie (sommeil, alimentation, activité physique) dès la préménopause, on arrive à contrecarrer la prise de poids.»
Durant cette période, les besoins changent et une adaptation est donc nécessaire, au niveau diététique tout d’abord. La recommandation est de limiter l’apport calorique tout en favorisant les aliments riches en fibres et minéraux (lire encadré).
Sur le plan physique, il est conseillé d’introduire progressivement des activités d’intensité modérée, comme la marche, le vélo ou la natation, à raison de 30minutes par jour, soit 150 minutes (2h30) par semaine. «L’activité physique permet non seulement d’avoir une dépense énergétique pour contrebalancer les apports par la nourriture, mais aussi de soulager certains symptômes, tels que les bouffées de chaleur, et de combattre le stress et l’anxiété», explique le spécialiste.
Quant aux traitements hormonaux de substitution, si leurs effets sur certains symptômes de la ménopause sont reconnus, leur action pour lutter contre la prise de poids est encore questionnée. «Ces médicaments sont associés à des risques d’accidents cardiovasculaires et de cancer, en particulier chez les femmes souffrant d’obésité, et ne sont donc pas conseillés dans le seul but d’amincissement», conclut Dr Correia.
Attention aux kilos autour du ventre
L’obésité est désormais reconnue comme un facteur de risque de troubles métaboliques (hypertension artérielle, excès de cholestérol, diabète, etc.), de maladies cardiovasculaires (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, etc.) et de certains cancers. Mais chez les personnes en surpoids, ce n’est pas tant la présence de masse graisseuse que sa localisation qui peut être problématique. En effet, une accumulation de tissu adipeux au niveau du ventre est clairement associée à une dégradation plus importante de la santé cardiovasculaire. Un constat qui s’explique par la toxicité de certaines molécules sécrétées par le tissu endocrinien graisseux qui enveloppe les organes vitaux. Ces molécules (cytokines pro-inflammatoires et radicaux libres) participent au développement de maladies cardiovasculaires et de diabète. «Ainsi, le poids ou l’indice de masse corporelle (IMC) comme seuls indicateurs ne donnent pas toute l’information sur l’état de santé d’une personne, explique le Dr Jorge César Correia, médecin chef de clinique dans l’Unité d’éducation thérapeutique du patient des HUG. La circonférence abdominale, par exemple, est un indicateur supplémentaire très pertinent qui peut amener à une prise en charge spécifique.»
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*Panotopoulos G, Raison J, Ruiz JC, Guy-Grand B, Basdevant A. Weight gain at the time of menopause. Human Reproduction. 1997 Oct;12(1):126-33.
Paru dans Le Matin Dimanche le 15/09/2024
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