Un comportement violent chez l’enfant peut cacher des troubles de l’apprentissage

Dernière mise à jour 12/05/15 | Article
Un comportement violent chez l’enfant peut cacher des troubles de l’apprentissage
On parle toujours plus des troubles en «dys». Le plus connu étant la «dyslexie». Mais il y a aussi la «dyscalculie», la «dyspraxie», la «dysphasie». Ce fameux préfixe indique une défaillance, une difficulté dans l’apprentissage de la lecture, du calcul, du développement moteur ou encore de la parole. Ce sont, avec les déficits d’attention, les principaux troubles de l’apprentissage.

Trop souvent, les enfants souffrant d’un trouble de l’apprentissage sont considérés comme des paresseux. Or, en raison de leur handicap, ils doivent en général travailler beaucoup plus que leurs condisciples. A force de ne pas réussir à atteindre leurs objectifs, malgré leurs efforts, ils peuvent se muer en enfants difficiles, entre crise de rage et comportements inadéquats. Et la vie en famille et à l’école peut devenir un enfer, tant pour les parents que pour les enfants. «A partir d’un petit handicap, on peut déboucher sur de gros problèmes de discipline», confirme Christian Müller, pédopsychiatre spécialisé dans le coaching des enfants difficiles.

Stress intense

Des réactions qui se comprennent si l’on considère par exemple un enfant dyspraxique qui peine à contrôler ses mouvements. Si son handicap n’est pas reconnu, il sera houspillé, accusé de mal tenir ses cahiers, de «manger comme un cochon», de mal s’organiser. Une situation source d’un stress intense, de découragement, d’une mauvaise estime de soi, de fureur aussi. Même chose pour un jeune dysphasique, qui comprend mal les consignes et ne fait pas ce qu’on lui demande. Les exemples cruels sont légion.

Il faut donc détecter le plus vite possible ces différents troubles de l’apprentissage afin que l’enfant, par ailleurs d’une intelligence normale et ne souffrant d’aucun trouble perceptif (comme un déficit de l’acuité visuelle ou auditive) ni d’une affection neurologique, puisse poursuivre son développement.

Les pays francophones ont accumulé un certain retard dans le domaine car, pendant longtemps, les spécialistes ont cherché une cause psychologique à ces maux. On n’en est presque plus là, heureusement. L’imagerie cérébrale a d’ailleurs montré le dysfonctionnement de différentes zones cérébrales chez les enfants «dys» et les plus fervents partisans du tout psychologique se rendent à l’évidence. Depuis quelques années, l’école fait également de gros efforts pour intégrer ces enfants.

Par ailleurs, les traitements logopédiques (orthophoniques) et ergothérapeutiques sont d’une grande aide pour les enfants «dys». Alors que le coaching de l’enfant, s’appuyant sur des méthodes cognitivo-comportementales, permet de prendre en charge les enfants ayant un déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité, ainsi que les enfants perturbateurs, déconcentrés, distraits.

A chacun ses talents

On entend beaucoup dire que ce sont là des troubles dont on ne guérit pas, mais avec lesquels on apprend à vivre. «Je pense plutôt que chacun doit développer ses talents, pondère Christian Müller. Un jeune dyslexique ne devrait peut-être pas devenir professeur de français! Même si ce trouble, bien pris en charge, peut être très bien compensé, tout dépend de sa sévérité. Il en va de même pour la dyscalculie, des exercices appropriés permettent de parvenir à un bon niveau de calcul. Le cerveau est un tout, il peut aller assez loin dans son apprentissage. Pour cela, il faut l’exercer de façon très structurée, un peu comme un sportif exerce ses muscles. Il faut répéter les exercices dans le calme, cela permet de créer des synapses entre les neurones, et donc des nouvelles connexions.» A bannir donc la «dictée surprise» qui met l’élève en échec et lui fait perdre ses moyens!

L’environnement des enfants doit aussi être adapté à leur handicap. Des aménagements scolaires pour qu’il puisse améliorer ou compenser ses fonctions déficientes doivent être faits, par exemple une mise à disposition de calculettes, de tablettes ou de dictionnaires électroniques. Ou encore leur donner plus de temps pour les examens écrits, avoir plus de tolérance pour les fautes d’orthographe. Il ne s’agit pas là d’un traitement de faveur par rapport à leurs camarades, mais bien de stratagèmes leur permettant de se mettre à leur niveau. Tout comme un élève ayant des problèmes de vue porte des lunettes pour voir aussi bien que les autres.

Les troubles de l’apprentissage

A noter que ces différents troubles sont souvent associés chez un même enfant.

  • La dyslexie: consiste en une difficulté persistante d’apprentissage de la lecture. C’est certainement le trouble «dys» le plus connu, très souvent associé à une difficulté à orthographier les mots (dysorthographie). Il est aujourd’hui bien pris en charge.
    Différentes études ont montré une susceptibilité génétique chez les personnes souffrant de dyslexie. Par ailleurs, ce trouble est plus fréquent et son expression plus sévère chez les enfants qui ont un vocabulaire très pauvre.
  • La dyscalculie: il s’agit d’un trouble concernant les nombres. L’enfant a une mauvaise perception des quantités numériques. Il a de la peine à calculer, à se souvenir des chiffres. Les tables de multiplication sont un cauchemar pour lui. Pour autant, tous les nuls en maths ne sont pas forcément atteints de dyscalculie! Il peut aussi s’agir de difficultés transitoires. Des exercices appropriés permettent à l’enfant de bien progresser.
  • La dyspraxie: c’est un trouble du développement moteur et de l’écriture, souvent associé à un trouble de déficit de l’attention. La dyspraxie touche un champ assez vaste car l’enfant a de la difficulté à planifier et à coordonner des gestes complexes et n’arrive pas à automatiser certains mouvements, ce qui entraîne une difficulté à écrire (dysgraphie). Mais aussi par exemple à manger proprement.
  • La dysphasie: touche le langage oral. C’est un trouble de la communication verbale, que ce soit de son expression ou de sa compréhension, voire des deux. L’enfant s’exprime de façon indistincte, et/ou avec une syntaxe fantaisiste. Il peut utiliser des mots incompréhensibles. Il a de la peine à saisir le sens d’un discours. Ce trouble est souvent associé à la dyslexie.
  • Les troubles de l’attention, avec ou sans hyperactivité (TDA/H): ils sont bien connus sous le raccourci d’«hyperactivité». Même si dans les faits, les déficits d’attention ne sont pas toujours accompagnés d’hyperactivité et d’impulsivité. Ils se caractérisent par une difficulté de l’enfant à se concentrer, à rester attentif lorsqu’il doit exécuter une tâche, cela en dépit de l’application qu’il y met. Les TDA/H s’atténuent en général vers l’âge de 16 ans. Mais certains adultes gardent ce handicap. 

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Pour en savoir plus

Quelques associations de parents

www.adsr.ch (Association Dyslexie Suisse Romande)

www.aspedah.ch (Association Suisse de parents et d’adultes concernés par le trouble du déficit d’attention/hyperactivité)

www.aspedah (AssociationDyspra’quoi)

A lire

Les enfants difficiles: sortir de l’impasse, Christian Müller, Sarah Messmer (Ed. Dangles, 2011).

A voir

Le film indien Taare Zameen Par, de Bulatan Engkar.

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