Loin d’être stables, les manières de dormir ont évolué au cours du temps

Dernière mise à jour 06/11/16 | Questions/Réponses
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Le sommeil est une fonction biologique qui s’est transformée au cours du temps et qui continue à évoluer. Il fut ainsi un temps où se réveiller au milieu de la nuit n’avait rien d’anormal. Les explications du Dr José Haba-Rubio, neurologue au Centre d’investigation et de recherche du sommeil (CIRS) du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et co-auteur de «Je rêve de dormir» aux éditions Favre.

L’une des découvertes que l’on fait en lisant votre livre, c’est que le sommeil a évolué au cours du temps. On ne dormait pas de la même manière dans l’Antiquité que maintenant?

Oui, c’est assez étonnant. Aujourd’hui, le sommeil peut être qualifié de monophasique. Les gens dorment généralement la nuit et d’une seule traite sans se réveiller. Mais au Moyen-Âge ou durant l’Antiquité, ce n’était pas le cas. Le sommeil était biphasique. On allait se coucher très tôt mais on ne dormait pas tout de suite. Une première phase d’éveil relaxé devait durer environ deux à trois heures. Puis les gens dormaient pendant un ou deux cycles, soit environ quatre heures et se réveillaient au milieu de la nuit. Selon les récits qu’on a pu retrouver, les gens discutaient ou marchaient pendant une à deux heures puis se rendormaient. Contrairement à ce que pensent généralement les gens, il n’est donc pas si anormal de se réveiller la nuit et de se rendormir!

Comment le cerveau gère-t-il ces phases d’éveil et de sommeil?

Le sommeil est une fonction régulée par deux mécanismes. Le premier est de type homéostatique. Pendant toute la phase d’éveil, on accumule un besoin de sommeil qui, en fin de journée, atteint un niveau suffisant pour provoquer une envie de dormir et déclencher un premier sommeil. Ce besoin de sommeil va «s’épuiser» assez rapidement et c’est un autre mécanisme, appelé circadien, qui prend le relais. Il s’agit d’une horloge interne qui règle sur une période de vingt-quatre heures les phases d’éveil et de sommeil. Au milieu de la nuit, cette horloge est en mode sommeil et c’est elle qui fait que l’on continue à dormir.

Cette fonction de sommeil est-elle universelle?

Oui, tous les animaux que nous connaissons dorment. Et même les plantes connaissent un cycle qui ressemble à un rythme circadien de sommeil et de repos. Les différentes manières de dormir ont évolué au cours du temps et continuent de changer. En fait, le sommeil s’adapte sans cesse à l’environnement pour que l’espèce puisse survivre.

Bien dormir, cela s’apprend-il?

Oui. C’est un peu comme avec la nourriture. Manger est une fonction universelle et vitale, comme le sommeil. Mais bien manger, comme bien dormir, c’est autre chose que simplement manger ou dormir. Il s’agit d’un comportement que chacun doit apprendre. Dès l’âge de six mois, l’enfant possède tous les mécanismes cérébraux pour faire des nuits complètes. Il est important qu’il apprenne à ce moment non seulement à s’endormir tout seul mais aussi à se rendormir sans une aide externe.

Dormait-on mieux dans le passé?

Ce que l’on imagine communément, c’est que l’on dormait plus longtemps quand il n’y avait pas d’électricité, pas de télévision et pas d’internet. La réalité n’est pas aussi simple. Un chercheur américain qui a pu observer et interviewer trois tribus, deux en Afrique et une en Amérique du sud, qui vivaient encore loin de toute civilisation et plus ou moins dans les mêmes conditions que nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, a pu constater que ces populations dormaient en moyenne 6,4 heures par nuit! Autrement dit, elles ne dormaient donc pas plus longtemps que nous. Par contre, aucune d’entre elles n’avait dans leur langage des termes pour nommer des problèmes de sommeil comme l’insomnie. Les gens ne comprenaient simplement pas ce que signifie cette expérience qui nous semble si importante. Ce qui a surtout changé au cours de l’histoire, ce n’est donc pas tellement la quantité de sommeil que sa qualité. La société moderne, avec son culte de la performance et la valorisation de surhommes qui ne dorment pour ainsi dire jamais, a d’une certaine manière inventé ces troubles.

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