Le traitement des apnées obstructives du sommeil

Dernière mise à jour 02/11/11 | Article
Femme soucieuse du souffle de son partenaire
Il existe de nombreux modèles d’appareils pour le traitement des apnées obstructives du sommeil. Toujours plus sophistiqués et moins encombrants, les fabricants recherchent des moyens pour les rendre plus agréables à l’utilisation, mais le sont-ils vraiment ?

L’enjeu est important car le marché potentiel pour l’industrie est considérable. Aux Etats-Unis, on estime que le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) touche 2% de la population adulte féminine et 4% des hommes. Des données lausannoises récentes (R Heinzer et coll, CHUV) suggèrent que la prévalence pourrait être en fait bien plus élevée. Autrement dit, une part significative de la population, au moins 150’000 personnes en Suisse selon une estimation de la LPS, souffre de problèmes respiratoires en dormant. Il s’agit donc d’un problème de santé publique important. Sans traitement, le SAHOS peut entraîner une somnolence diurne, et dégrader considérablement la qualité de vie. Le SAHOS est  également un facteur de risque pour la survenue d’accidents vasculaires cérébraux et cardiaques.
 Le traitement principal consiste depuis une trentaine d’années à appliquer une pression positive continue sur les voies aériennes supérieures via un masque nasal ou facial afin de constituer une « attelle pneumatique » empêchant l’obstruction récurrente des voies aériennes qui caractérise le SAHOS. On parle de “pression positive continue” (PPC) ou CPAP (continuous positive airway pressure). L’idée d’un appareillage nocturne n’est acceptée que par 50 à 90% des patients et, à long terme, seuls 60 à 70% de ceux qui auront été équipés poursuivent leur traitement. Les patients s’en plaignent pour différentes raisons qui, pour nombre d’entre elles, peuvent être partiellement ou totalement corrigées: inconfort, fuites au niveau du masque, sécheresse des muqueuses, sensation désagréable d’avaler de l’air, difficulté à expirer, claustrophobie, bruit.

Des appareils sophistiqués

Pour améliorer le confort du patient et son adhérence à la PPC, de nouveaux appareils, dotés d’une informatique et d’algorithmes sophistiqués, sont mis sur le marché. Le nombre de modes thérapeutiques actuellement disponibles peut rendre le clinicien confus ; de plus les nouveaux outils, s’ils sont étonnants, ne sont pas forcément plus efficaces.
 Ainsi, les « auto-PPC » sont conçus pour détecter de manière continue les évènements respiratoires (apnées, hypopnées, ronflements) et ajuster en conséquence la pression dans les voies aériennes supérieures. La plupart des appareils actuellement sur le marché offrent l’option auto-PPC. Ils n’ont pourtant pas démontré leur supériorité clinique par rapport aux modèles traditionnels, à pression fixe.

Des résultats modestes

Certains appareils sont munis d’un « réducteur de pression à l’expiration » ou RPE (les patients sous PPC se plaignent régulièrement d’avoir le sentiment d’expirer contre une résistance) qui permet de diminuer la pression contre laquelle le patient expire au début de l’expiration. Plusieurs degrés de diminution du flux expiratoire peuvent être appliqués. Quelques travaux ont comparé l’impact de la PPC avec ou sans réducteur de pression sur la structure du sommeil, l’adhérence et la tolérance face au traitement. Ils tendent à montrer que les traitements sont comparables en termes d’efficacité avec parfois la perception d’un confort accru, ceci toutefois sans impact significatif sur le nombre d’heures d’utilisation de l’appareil par le patient.
 Un autre algorithme, le système « A-flex », développé par la firme Philips-Respironics, propose un mode autopiloté complexe qui associe un RPE à une variation automatique de la pression qui n’atteint la valeur de consigne que lors de l’inspiration : ainsi, la pression fournie est plus basse pendant tout l’expirium. Ce mode, bien qu’intéressant, n’a fait l’objet d’aucune validation.Deux firmes ont en outre exploité un principe utilisé dès la fin des années 1980, la ventilation à deux niveaux de pression, mais avec des algorithmes très sophistiqués et spécifiquement conçus pour le traitement du SAHOS. Philips-Respironics propose ainsi le « Biflex », alors que la compagnie australienne Resmed a créé une autre auto-PPC à deux niveaux de pression « Auto 25 ». Les deux modèles réagissent de façon différentiée aux événements respiratoires et sont conçus pour des patients souffrant d’un SAHOS sévère. Il est important de noter que ces appareils ne sont pas faits pour une utilisation en dehors de l’indication SAHOS et ne représentent pas des alternatives à la ventilation à deux niveaux de pression conventionnelle.

Depuis la description originale de l’utilisation de la PPC, en 1981, le chemin parcouru sur le plan technologique dans le traitement du SAHOS est spectaculaire mais les résultats en termes d’impact clinique sont étonnamment modestes, notamment sur l’acceptabilité de la PPC et l’adhérence au traitement. De nombreux algorithmes développés par l’industrie doivent encore être testés et validés par des organismes indépendants. Il est également important de noter que l’adhérence au traitement est influencée par de nombreux facteurs indépendants du mode ou de la pression de la PPC utilisée. L’éducation thérapeutique ainsi qu’un suivi rapproché lors de la période de mise en route du traitement sont primordiaux.

Références

Adapté de « Pneumologie : Traitement du syndrome d’apnées obstructives du sommeil par pression positive continue (PPC) », Pr J.-P. Janssens, Service de pneumologie, S. Molleyres, H. Takahashi, O. Contal, Equipe de soins respiratoires, HUG, in Revue médicale suisse 2010; 6 : 132-6, en collaboration avec les auteurs.

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