Marre de mes lunettes, j'essaie la chirurgie

Dernière mise à jour 03/10/18 | Article
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Que vous soyez myope, astigmate ou hypermétrope, vous avez peut-être déjà envisagé de sauter le pas de la chirurgie pour vous débarrasser définitivement de vos lunettes. Mais les techniques disponibles sont-elles fiables, efficaces et totalement sans risque? On fait le point sur les nouvelles thérapies de correction oculaire avec le Dr Federico Mossa, médecin agréé, FMH en ophtalmologie et ophtalmochirurgie à l’hôpital de Saint-Loup et directeur médical du Centre de microchirurgie oculaire CEMO.

Les lunettes deviendront-elles bientôt un objet du passé? «Certainement, assure le Dr Federico Mossa. On peut désormais corriger pratiquement tous les défauts visuels avec les nouvelles technologies». La recherche en matière d’ophtalmologie avance vite, et chaque année de nouvelles méthodes apparaissent, de plus en plus performantes et de moins en moins invasives. Elles ont déjà séduit des milliers de Suisses.

Si l’évolution rapide des dispositifs médicaux permet aujourd’hui de corriger la plupart des maladies, le choix d’une méthode plutôt qu’une autre se fait au cas par cas. Deux principaux paramètres sont pris en compte: l’âge du patient et son défaut visuel. «Par exemple, pour un patient jeune avec un défaut modéré, on va favoriser un traitement au laser de surface (lire plus loin, ndlr), explique le spécialiste. Mais dans le cas d’une cataracte sur une personne âgée, on va préférer les implants». Chacune de ces méthodes possède donc ses propres indications et ses limites.

La révolution du sans contact

«La méthode de chirurgie au laser sans contact direct avec l’œil est la grande révolution de ces derniers temps, affirme le Dr Mossa. Car jusqu’à présent on disposait de méthodes qui prévoyaient une découpe de la cornée, ce qui n’est plus nécessaire.» Ce nouveau traitement de surface (SmartSurface Trans-PRK) est une vraie avancée médicale, aussi bien en termes d’efficacité que de confort pour les patients. «J’avais une myopie tellement forte que je m’attendais à une intervention lourde et douloureuse, confie Sébastien. J’ai été très étonné quand on m’a dit que tout se passait en quelques minutes… Le Jour J, je suis ressorti de la clinique moins d’une heure après y être entré. Avec des yeux neufs. Mon seul regret est de ne pas avoir sauté le pas plus tôt.»

Comment ça se passe? Une partie de l’épithélium (couche la plus superficielle de la cornée) est retirée au laser, sans contact et sans découpe. Un faisceau est ensuite dirigé sur la partie de la cornée ainsi mise à nu, pour effectuer le traitement. Enfin, l’épithélium retiré est replacé sur la surface de l’œil traitée. La procédure prend quelques secondes et se réalise sous anesthésie locale.

Pour traiter quoi? Les corrections oculaires telles que l’hypermétropie, l’astigmatisme et certaines myopies sévères.

Avantages: L’intervention reste totalement indolore et la correction est définitive. Dans la plupart des cas, l’acuité visuelle s’avère supérieure à celle obtenue auparavant avec des lentilles ou des lunettes. Le risque de complications est quasi nul car la cornée (surface de l’œil) n’est pas fragilisée.

Inconvénients: Une gêne oculaire, des larmoiements ou une vision trouble peuvent survenir après l’intervention. Par ailleurs, l’opération au laser sans contact ne convient pas à tous les défauts visuels ni à tous les types d’yeux (épaisseur de la cornée, taille des pupilles…).

Des avancées dans le traitement de la presbytie

En matière de chirurgie réfractive, une autre grande nouveauté concerne le traitement de la presbytie. «Jusqu’à présent, on optait pour la monovision, en attribuant à un œil la vision de loin et à l’autre la vision de près, explique le Dr Mossa. On peut maintenant préserver en partie les deux visions sur un même œil».

Comment ça se passe? Le chirurgien réalise un remodelage de la surface de la cornée assisté par ordinateur, via un laser de surface. Ce traitement qui modifie la multifocalité de la cornée aura un effet similaire à une correction à l’aide de verres de lunettes multifocales. Ce dispositif s’appelle lepresbymaxâ et l’intervention ne dure que 30 secondes par œil.

Pour traiter quoi? La presbytie, qui résulte d’une perte progressive et naturelle de l’élasticité du cristallin provoquant une difficulté à passer de la vision de loin à la vision de près.

Avantages: Cette méthode permet de préserver en partie la vision de loin. Elle est également réversible en cas de troubles visuels gênants.

Inconvénients: Ce traitement n’élimine pas totalement la presbytie. Il sera nécessaire de s’adapter à une différence de vision entre les deux yeux, en conservant une correction avec des lunettes d’appoint dans certaines situations.

L’orthokératologie: encore peu convaincante

Ce nom barbare désigne une méthode qui consiste à porter des lentilles de correction oculaire durant la nuit uniquement, pour permettre à l’œil de mieux voir le jour.

Comment ça se passe? Des lentilles flexibles, adaptables selon le défaut oculaire, sont placées sur l’œil durant la nuit et procèdent au lissage de la cornée. Elles sont retirées au matin et permettent de diminuer une myopie pendant 24 à 48 heures environ.

Pour qui? Pour les adultes présentant une faible myopie ou un astigmatisme.

Avantages: Pas d’intervention médicale ni de chirurgie. Méthode totalement réversible.

Inconvénients: «Cette méthode a beaucoup de limites», prévient le Dr Mossa. Tout d’abord, le risque important de complications graves, comme des infections, liées au défaut d’oxygénation de la cornée. Ou encore l’altération de l’homogénéité de la surface de l’œil, qui entraîne une vision double. Enfin, le spécialiste rappelle que ces lentilles nocturnes «n’apportent pas une réponse définitive à un défaut de vision. Elles n’apportent qu’une correction partielle et temporaire.»

Les implants, toujours

Les chirurgiens-ophtalmologues disposent depuis plusieurs années déjà d’une pléthore d’implants pour corriger de nombreux défauts visuels. De plus en plus sophistiqués et performants, ils peuvent également traiter des maladies, en permettant par exemple de diffuser des médicaments à l’intérieur de l’œil.

Comment ça se passe? L’implant oculaire est constitué de matériaux souples. Il est placé devant ou derrière l’iris, après incision de la cornée. Dans le cas du traitement d’une cataracte, l’implant est une lentille artificielle qui remplace le cristallin devenu opaque.

Pour traiter quoi? Généralement, les implants sont indiqués aux personnes avec de forts défauts visuels comme une importante myopie, une hypermétropie ou un astigmatisme. La cataracte est aussi généralement traitée par implantation, à partir de 50 ans.

Avantages: L’implant est quasiment indolore et totalement invisible. Aucune hospitalisation n’est nécessaire.

Inconvénients: Cette méthode nécessite une chirurgie invasive. Elle peut entraîner des complications (jusqu’à nécessiter le retrait de l’implant). Enfin, contrairement au traitement laser, chaque œil est opéré séparément avec quelques jours ou semaines d’intervalle.

Et à l’avenir?

L’évolution rapide des technologies laisse entrevoir de grandes perspectives dans le traitement oculaire. Certains centres de recherche en ophtalmologie, aux États-Unis notamment, travaillent actuellement sur un implant de nouvelle génération capable de délivrer à l’œil des éléments de réalité augmentée. Une prouesse technologique qui deviendra bientôt réalité? Le Dr Mossa tempère: «On peut déjà traiter des maladies congénitales de la rétine qui rendent aveugle, comme la rétinite pigmentaire, avec un implant qui permet à l’œil de voir des ombres, plutôt que l’obscurité totale… Mais ce ne sont pas véritablement des images qui se matérialisent.»

Les recherches dans le domaine de la santé oculaire sont aujourd’hui principalement tournées vers les cellules-souches, mais l’utilisation thérapeutique de l’électronique et du digital fait également l’objet de nombreux travaux. Ce qui laisse ouvert le champ des possibles… «Installer directement dans l’œil des nanotechnologies, des puces électroniques capables d’augmenter la réalité? Pourquoi pas… mais je pense que ce n’est pas pour tout de suite!», conclut le Dr Mossa.

Notre vue en danger?

Pointés du doigt pour leurs répercussions sur notre santé neurologique ou nos problèmes de dos, les écrans sont aussi les grands coupables de la détérioration de notre santé visuelle. Depuis que les smartphones, ordinateurs, télévisions et tablettes ont envahi notre quotidien, nous soumettons nos yeux à une lumière bleue agressive, à raison de cinq heures par jour en moyenne. Or, cette utilisation intensive des écrans est à l’origine de différents problèmes. On constate depuis quelques années une augmentation du nombre d’exophories, un défaut de convergence qui se caractérise par une tendance des yeux à se tourner vers l’extérieur, ce qui entraîne une fatigue visuelle. «Chez certaines populations très consommatrices d’écrans, on assiste même à une véritable épidémie de myopie, une vision floue ou des maux de tête fréquents», explique le Dr Federico Mossa. Pour l’instant, l’efficacité de l’utilisation de filtres retenant la lumière bleue n’a pas été démontrée. La meilleure façon de protéger ses yeux reste donc… de se déconnecter!

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Paru dans Le Matin Dimanche le 05/08/2018.

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