Contagion: nos «postillons» peuvent voyager sur des dizaines de mètres

Dernière mise à jour 14/05/14 | Article
Contagion: nos «postillons» peuvent voyager sur des dizaines de mètres
Une étude américaine démontre que les conséquences de la toux et des éternuements sont nettement plus étendues que ce l’on croyait jusqu’à présent.

«Postillon»? Au départ, il s’agissait d’un cocher bien particulier: le conducteur d’une voiture des postes – d’où son nom. «Je suis en fantaisie d'admirer l'honnêteté de ces messieurs les postillons, qui sont incessamment sur les chemins pour porter et reporter nos lettres», écrit Mme de Sévigné. Puis, à partir du milieu du XIXe siècle, le terme a commencé à désigner la gouttelette que l’on peut projeter en parlant. D’où l’expression «envoyer des postillons» et cette formule-définition de Jules Renard (1864-1910): «Postillons: impérities du langage».

Dynamique des fluides

Au-delà du manque d’aptitude à s’exprimer correctement, évoquée par le mordant écrivain français, on en sait plus aujourd’hui sur ces gouttelettes et les risques qui peuvent lui être associés. Ceci grâce à une étude de chercheurs du célèbre Massachusetts Institute of Technology (MIT) travaillant avec des chercheurs français qui ont eu recours aux techniques de l’imagerie à grande vitesse. Leur étude expérimentale, basée sur la dynamique des fluides, vient d’être publiée dans le Journal of Fluid Mechanics1.

Ils montrent que ces gouttelettes, projetées lors de toux et d’éternuements, ont une portée bien plus longue que ce que l’on pensait. Les chercheurs mettent notamment en évidence de véritables nuages porteurs de gouttelettes en suspension, elles-mêmes porteuses d’agents pathogènes. C’est là une donnée importante puisque la toux et les éternuements peuvent jouer un rôle clé dans la transmission interhumaine de maladies respiratoires infectieuses.

Revoir la théorie

C’est l’observation directe d’épisodes d’éternuement et de toux, via l’imagerie à grande vitesse, qui révèle un ensemble de nuages gazeux invisibles à l’œil nu, porteurs, sur de grandes distances, de gouttelettes pathogènes. Cet environnement gazeux favorise la formation de microgouttelettes qui, plus légères, vont voyager ainsi jusqu’à 200 fois plus loin que les gouttelettes agglomérées au départ. Car ces mini-gouttelettes restent longtemps en suspension dans l'air, emportées par différents flux, comme ceux des systèmes de ventilation par exemple. Une observation qui contredit les précédentes théories qui laissaient entendre que l’énergie des gouttelettes de mucus les plus importantes ne leur permettait pas dépasser un rayon d'un mètre.

Nuages de microgouttelettes

A partir de ces observations, deux chercheurs du MIT, en collaboration avec le Laboratoire de Physique et mécanique des milieux hétérogènes (Paris), ont pu développer un modèle des retombées du «nuage», afin de prévoir le trajet des agents pathogènes. Il apparaît ainsi que les gouttelettes restent en suspension dans le nuage jusqu'à ce que leur vitesse de sédimentation corresponde à la décélération du même nuage. Les scientifiques parviennent à calculer alors que les petites gouttes peuvent être entraînées sur de grandes distances par ce nuage de gaz.

Plusieurs dizaines de mètres

En pratique, des gouttelettes de 100 µm (micromètres) de diamètre vont pouvoir voyager cinq fois plus loin, et des gouttelettes de 10 µm de diamètre jusqu’à 200 fois plus loin. Concrètement certaines de ces microparticules pourraient voyager sur plusieurs dizaines de mètres. Et élargir ainsi considérablement la zone de contagion à partir d’une seule personne infectée –tout particulièrement lorsque cette personne se situe dans une foule. Il faut, en outre, tenir compte du pouvoir démultiplicateur des mécanismes de ventilation et de conditionnement de l’air. Notamment en milieu hospitalier.

Risque augmenté dans les transports en commun

Une étude publiée en 2011 dans la revue BMC Infectious Diseases2 avait mis en évidence les étroites relations pouvant exister entre l'utilisation des transports publics et le risque d’infection respiratoire aiguë. Financée par la Health Protection Agency britannique, cette recherche avait été menée au cours de la vague grippale de l’hiver 2008/2009. Ses conclusions: prendre le bus ou le tram est associé à un risque six fois plus élevé de développer une infection de ce type. Un phénomène tout particulièrement observé chez les personnes qui n’ont pas l’habitude de ce mode de transport.

 

1. Un résumé (en anglais) de ce travail est disponible ici.

2. Le texte (en anglais) de cette étude est disponible ici.

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