On peut soigner des ligaments du genou déchirés sans opérer

Dernière mise à jour 23/03/15 | Article
On peut soigner des ligaments du genou déchirés sans opérer
Après deux opérations au genou, l’Américaine championne de ski Lindsey Vonn a fait un come-back époustouflant. Mais le passage par la chirurgie n’est pas indiqué dans tous les cas.

De quoi on parle?

Février 2013, Autriche. La skieuse américaine Lindsey Vonn chute aux championnats du monde et se déchire les ligaments du genou droit. Opération, rééducation. Six mois plus tard, elle chute à l’entraînement et est réopérée.

Après vingt mois sans compétition, Lindsey Vonn fait un retour gagnant en décembre 2014 à Lake Louise au Canada. Deux victoires en descente et deux en super-G plus tard, elle est désormais la skieuse la plus titrée de l’histoire. «The Climb», un documentaire diffusé sur NBC, retrace son retour jusqu’au sommet.

On croit tomber, la jambe se tord, un «crac» retentit. On ne chute pas à coup sûr mais le genou «flotte» et se dérobe. A ski, une telle sensation est souvent le signe que les ligaments sont atteints. C’est ce qui a éloigné la skieuse Lindsey Vonn de la compétition durant près de deux ans. Chaque année en Suisse, selon l’assurance-accidents, près de 4400 personnes se déchirent le ligament croisé antérieur du genou (LCA). Le traitement? De la physiothérapie, des exercices à domicile et, parfois, une opération.

Le genou a quatre ligaments principaux, qui relient le fémur au tibia et au péroné. En enserrant l’articulation, ils contrôlent son mouvement. Le ligament croisé antérieur est le plus souvent touché, explique le Dr Stéphane Borloz, médecin du sport à la clinique Bois-Cerf, à Lausanne. Il peut se déchirer après une très forte torsion du genou – le ski part dans une direction, le corps du skieur dans l’autre – ou si le genou se tend plus que la normale, lors d’un shoot qui rate le ballon, par exemple.

Après un tel accident, la perte de stabilité du genou ou la douleur conduisent chez le médecin. «Une fois le diagnostic de déchirure posé, il faut démarrer la physiothérapie le plus tôt possible, qu’une opération soit envisagée ou non, explique José Milliet, physiothérapeute répondant en orthopédie au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Le but étant d’abord de diminuer la douleur et l’épanchement, puis de retrouver une bonne mobilité et une force satisfaisante.»

Renforcer son genou pour l'hiver

Exercices quotidiens

Cette physiothérapie doit être intensive. A raison de deux ou trois séances hebdomadaires, il s’agit de renforcer la musculature globale de la jambe, en travaillant sélectivement le quadriceps et les ischio-jambiers. C’est en effet la musculature de la jambe qui assure la stabilité du genou. Cette reconstruction de la musculature fait aussi partie des suites à donner à une intervention chirurgicale, si c’est le traitement qui est choisi. Par ailleurs, la physiothérapie vise à améliorer deux sens importants pour une bonne utilisation de l’articulation: l’équilibre et la proprioception (la perception de la position dans l’espace des différentes parties du corps).

Il existe enfin des programmes qui indiquent, semaine après semaine, d’une part les mouvements qu’il est possible de pratiquer sans risque (voir infographie) et d’autre part les exercices à pratiquer chez soi. «Je prescris généralement cinq exercices spécifiques quotidiens, explique José Milliet. Ils ne prennent pas plus d’une demi-heure.»

Les femmes sont naturellement plus exposées

On estime que les skieuses professionnelles ont cinq fois plus de risque de rupture du ligament croisé antérieur du genou que leurs homologues masculins, explique le Dr Gérald Gremion, médecin-chef du Swiss Olympic Medical Center. Plusieurs éléments l’expliquent. D’abord, les genoux féminins sont souvent plus souples et leurs muscles ischio-jambiers plus élastiques: la stabilisation du genou tend donc à être plus faible et plus tardive. Ensuite, les femmes ont généralement une moins bonne réception après les sauts. Elles sont en effet plus nombreuses à avoir des genoux dits recurvatum, c’est-à-dire qui se plient partiellement vers l’arrière. Elles ont de même plus fréquemment un genou dit valgum, incliné vers l’intérieur. Enfin, leurs muscles fessiers et les abducteurs de la hanche sont en  moyenne plus faibles que ceux des hommes.

Cependant, dans la population féminine générale, ce risque accru s’accompagne sans doute d’un comportement plus prudent. Car en Suisse, les femmes comptent pour seulement un tiers des ruptures du ligament croisé antérieur du genou.

Les cyclistes exemptés

Si une opération chirurgicale s’avère nécessaire, elle peut être pratiquée dès qu’une mobilité et une musculature satisfaisantes ont été récupérées. Il faut par ailleurs que la douleur soit très réduite ou nulle, explique le Dr Laurent Gillain, orthopédiste à Lausanne. Dans la majorité des cas, l’intervention se déroule alors dans un délai d’un à deux mois après l’accident.

Le type et l’intensité de l’activité physique que souhaite retrouver le patient sont les principaux critères pour décider ou non d’opérer, reprend le Dr Gillain. Les sportifs qui ne sollicitent pas leur LCA (cyclistes ou nageurs, par exemple) ainsi que les personnes sédentaires n’en retirent qu’un faible bénéfice et doivent privilégier la physiothérapie intensive. A l’opposé, des individus très sportifs ou qui pratiquent des sports dits de pivot (ski, volley-ball, basket-ball, badminton, etc.) ont de meilleures chances de pouvoir continuer leur activité sportive avec un LCA reconstruit.

D’autres facteurs sont déterminants. Certains patients, par exemple, n’arrivent pas à s’astreindre à une physiothérapie intensive, d’autres ont une activité professionnelle qui exige un genou renforcé. «Un charpentier prend d’énormes risques si son genou lâche alors qu’il travaille sur un toit», observe le Dr Borloz. Tous ces facteurs sont discutés lors d’un rendez-vous avec le chirurgien. Mais «choisir un traitement autre que chirurgical n’est pas du tout abandonner son patient, bien au contraire», insiste le Dr Gillain.

L’opération proprement dite consiste en une autogreffe de tendon. «Il s’agit d’ôter le ligament croisé antérieur du genou et de le remplacer par du tissu aux caractéristiques proches, prélevé ailleurs sur le patient, poursuit le médecin. Cela peut être une partie des tendons des muscles ischio-jambiers, du quadriceps ou de la rotule.» Le choix dépend de l’activité du patient: si le greffon est prélevé au niveau de sa rotule, un carreleur peinera à s’agenouiller. Pour la même raison, on ne fait pas de prélèvement sur les tendons des ischio-jambiers des sportifs qui les sollicitent fortement, comme les danseurs ou les joueurs de water-polo.

Assidu mais prudent

L’étape suivante consiste à greffer ce tendon à la place du ligament croisé lésé, détaille l’orthopédiste. Pour ce faire, le chirurgien perce des tunnels dans le fémur et le tibia et y accroche le greffon avec des vis ou des broches. L’intervention est effectuée au moyen de petites ouvertures dans le genou et dure en moyenne une heure. Après l’opération, les patients suivent quatre mois de rééducation. La sollicitation du genou doit se faire en respectant des étapes, explique José Milliet. «La cicatrisation du genou prend du temps: si l’on "tire" trop sur le tendon greffé, une petite laxité risque de se créer au niveau de ses points de fixation, ce qui nuira à la protection qu’il devra fournir. Il faut parfois savoir freiner ceux qui veulent aller trop vite.»

En collaboration avec

Le Matin Dimanche

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