Vous voulez booster votre cerveau? Alors dansez!

Dernière mise à jour 21/01/19 | Article
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Pratiquée par toutes les civilisations depuis la nuit des temps, la danse est un excellent moyen d’entretenir la santé du corps. Mais de récentes études montrent aussi que, plus que toute autre pratique, elle est également bénéfique pour le cerveau.

Ceux d’entre nous qui se sont déjà défoulés sur une piste de danse en connaissent bien les vertus. Comme toute autre pratique physique, la danse à un rythme soutenu entraîne un renforcement musculaire, une dépense calorique, une oxygénation des tissus, une amélioration de la capacité respiratoire, des bénéfices cardiovasculaires… la liste est longue. «Mais la danse va plus loin que d’autres activités sportives par le fait qu’elle mobilise différentes sortes d’aptitudes: à la fois les fonctions corporelles et les fonctions cérébrales», ajoute Lucy Vincent, neurobiologiste et auteure de l’ouvrage Faites danser votre cerveau![1] En effet, danser ne fait pas seulement appel aux muscles mais aussi à la coordination des mouvements, la mémorisation d’enchaînements précis et le respect d’un rythme musical ou de la cadence d’un partenaire.

Comment la danse nous rend le sourire

C’est maintenant un savoir reconnu, notamment par la médecine: le corps et l’esprit forment un tout, échangeant sans cesse des informations et évoluant ensemble. Notre cerveau commande chacun de nos gestes, certes, mais notre posture, nos attitudes, révèlent également beaucoup de ce qui se cache dans notre tête: «On peut lire dans les pensées de quelqu’un en regardant son corps. Chaque émotion provoque une activation typique des muscles qui induisent des postures reconnaissables», explique Lucy Vincent. Ce langage corporel universel traduit donc des liens évidents entre le corps et les réseaux cognitifs et émotionnels. Un constat posé dans les années 70 lorsqu’il a été établi que l’exercice physique agissait comme un antidépresseur naturel.

Le mouvement du corps assure en effet la libération d’endorphines, hormones à l’effet euphorisant. Dans certaines postures dites «ouvertes», c’est le taux de testostérone qui augmente, entraînant un sentiment accru de combativité et de confiance en soi. Lison, qui pratique la danse contemporaine depuis près de 25 ans, en est sûre, cette discipline booste son moral au quotidien: «C’est avant tout un moment de plaisir intense que j’ai du mal à expliquer! Le temps d’une séance, je relâche la pression, j’extériorise physiquement et mentalement mes émotions, explique la jeune femme. Je me sens mieux instantanément, mais je ressens aussi des effets sur le long terme, avec par exemple une perception plus positive de mon corps».

Danser, ou plus largement bouger, permet en effet de repousser la déprime, le stress ou le sentiment de défaite. Et cela, dès que le corps se met en mouvement. «La danse commence à faire du bien tout de suite, explique Lucy Vincent. Des chercheurs ont découvert qu’en pratiquant des micro-séances d’une minute toutes les heures, on parvenait déjà à une amélioration de l’humeur.»

Danse et cerveau, un lien désormais avéré

Seuls les êtres vivants qui bougent sont dotés d’un système nerveux central, rappelle la neurobiologiste avant d’expliquer que chez le fœtus humain «la mise en place du cerveau se fait sous influence de contractions musculaires spontanées». Le cerveau est donc, dès ses prémices, nourri par le mouvement. Une très récente étude[2] menée sur des personnes âgées en bonne santé, a confirmé cette idée en démontrant que la danse agissait directement sur nos neurones en entraînant une croissance de la matière cérébrale. Mais ce n’est pas tout, les chercheurs se sont également rendu compte que la zone du fonctionnement de la mémoire était elle aussi impactée. Booster les neurones et améliorer la mémoire, voilà deux bénéfices de la danse désormais scientifiquement prouvés.

«On est en train de mesurer à quel point l’apprentissage de nouvelles coordinations de mouvements est important pour le développement et le contrôle de tout le cerveau», explique Lucy Vincent, qui révèle dans son ouvrage une découverte majeure: celle du rôle du cervelet. C’est en effet dans cette zone –qui contient plus de neurones que toutes les autres parties du cerveau réunies– que se met en place la relation entre la coordination des mouvements et les réseaux cognitifs et émotionnels.

La danse, élixir de jouvence?

De nombreuses études ont montré que la danse, en plus d’être une activité favorisant les liens sociaux, retardait également certains effets du vieillissement. Chez les personnes âgées qui s’y adonnent, on constate ainsi moins de troubles de la mémoire, une meilleure focalisation de la pensée, une augmentation de la densité osseuse, un meilleur équilibre et un renforcement musculaire. Des bénéfices qui proviennent de l’effort cérébral fourni (apprentissage de la chorégraphie, rythme, coordination, partage social) mais aussi de l’implication musculaire. La danse nécessite de penser tout à la fois aux pas, au poids du corps, à la rythmique… «C’est ce qu’on appelle la double tâche», précise le Pr Christophe Büla, chef du Service de gériatrie du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Ce type d’activité peut contribuer à améliorer l’équilibre des personnes âgées, mais aussi plus largement à entretenir certaines connexions cérébrales "gelées" par l’état sédentaire».

Dans le cas des maladies neurodégénératives, les vertus de la danse ont depuis quelques années déjà montré des résultats très positifs. L’exercice modéré, par ses vertus anti-inflammatoires mais aussi son action sur le cerveau, semble très utile pour combattre les effets de la maladie de Parkinson ou d’Alzheimer. Des tests menés sur différents groupes de patients ont clairement montré que la danse, pratiquée dans le passé ou même récemment, améliorait la mémoire et la vitesse de réaction, mais aussi la mobilité. «Les résultats sont étonnants, révèle Lucy Vincent, car on voit chez ces patients revenir une coordination des mouvements qui semblait perdue dans la vie de tous les jours.»

Le Dr Büla confirme ces observations, en particulier chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson, connue pour causer des troubles moteurs: «Faire de la danse permet à ces patients de développer l’amplitude articulaire de façon significative».

La danse sera-t-elle donc bientôt prescrite comme un traitement contre la maladie, la dépression, le stress ou le vieillissement? Les choses ne sont pas si simples: «Les gens ne veulent être qu’un "cerveau" tandis que le corps nous ramène à notre condition animale», constate Lucy Vincent. Pourtant, tout indique qu’il faut cesser de penser le mouvement et l’esprit séparément.

A chaque danse ses vertus

Il existe une multitude de façons de danser: en solo, en couple ou en groupe, lentement ou rapidement, en faisant travailler le haut du corps ou les membres inférieurs… Chaque type de danse recèle des vertus bien particulières. La zumba serait ainsi idéale pour la santé cardiovasculaire tandis que le rock favoriserait les stimuli sensori-moteurs provoquant de l’enthousiasme. La salsa, qui fait bouger tout le corps, maintient de son côté un bon équilibre immunitaire. Nécessitant une importante force musculaire dans le bas du corps, la rumba, pour sa part, améliorerait l’estime de soi. Quant au tango, il aurait le pouvoir de booster la libido. A vous de faire votre choix!

___________

Paru dans Le Matin Dimanche le 30/12/2018.

[1] Editions Odile Jacob, 2018.

[2] Muller, Rehfeld et al., 2017.

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