Quand les hormones font la pluie et le beau temps

Dernière mise à jour 30/10/23 | Article
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De la puberté à la ménopause, les femmes sont chaque mois sujettes à des variations hormonales importantes. Certaines en souffrent, d’autres pas. Explications.

Le trouble dysphorique prémenstruel, cet inconnu

Alors que le syndrome prémenstruel est assez bien connu de la population, le trouble dysphorique prémenstruel l’est beaucoup moins. Il touche entre 1 et 5% des femmes. Ces deux affections surviennent environ cinq jours avant l’arrivée des règles et disparaissent par la suite. Les symptômes possibles, pour l’un comme pour l’autre, sont les mêmes: ballonnements, maux de tête, sueur, prise de poids, saute d’humeur, anxiété, troubles du sommeil. «La différence entre un syndrome prémenstruel et le trouble dysphorique est que dans le premier cas, les femmes éprouvent au moins un symptôme physique ou psychique, alors que dans le second, elles ressentent au moins cinq d’entre eux. Le trouble dysphorique prémenstruel a d’importantes répercussions sur la vie sociale et professionnelle», explique la Dre Lamyae Benzakour, médecin adjointe agrégée, responsable de l’Unité de psychiatrie de liaison et de la Consultation de psychotraumatologie aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). En cause, les variations hormonales du cycle. «Il est important que les femmes qui souffrent du trouble dysphorique prémenstruel ne pensent pas que c’est une fatalité. Les antidépresseurs ou les traitements hormonaux peuvent régler le problème. La méditation de pleine conscience, l’acupuncture et les thérapies basées sur l’acceptation et la gestion des facteurs de stress sont aussi d’une grande aide. Chaque femme peut bénéficier d’un plan de soin global et personnalisé pour ne pas subir ce trouble tous les mois», conclut la spécialiste.

Les hormones sexuelles produites par les femmes fluctuent énormément en fonction de la phase du cycle menstruel, mais également de l’âge. Ces variations sont responsables de la puberté, puis de la survenue des règles tous les 28 jours en moyenne, de la grossesse et de la ménopause. Elles ont cependant aussi un impact sur le cerveau, entraînant parfois un ensemble de symptômes désagréables. «Les œstrogènes, la progestérone et la testostérone sont les trois hormones sexuelles produites principalement par les ovaires. Chacune d’entre elles a un effet sur les neurotransmetteurs du cerveau, notamment la dopamine et la sérotonine. Ces deux hormones influencent directement l’humeur», explique le Dr Nicola Pluchino, responsable de l'Unité de médecine de la fertilité et endocrinologie gynécologique au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). 

Côté progestérone

La progestérone joue un rôle important au niveau cérébral. Pour rappel, cette hormone augmente après l’ovulation et lors d’une grossesse, mais diminue drastiquement et est au plus bas quelques jours avant la survenue des règles. «Dans le cerveau, la progestérone se transforme en une autre hormone, l’allopregnanolone, qui a un effet anxiolytique important, mais aussi une action relaxante et favorisant le sommeil. Raison pour laquelle, pendant la grossesse, les femmes se sentent souvent apaisées avec une amélioration du sommeil», précise le spécialiste. 

À l’inverse, lorsque la progestérone chute, environ cinq jours avant les règles, certaines femmes souffrent d’irritabilité, d’un état dépressif ou colérique, et préfèrent se priver de contacts sociaux pendant cette période. On parle alors de syndrome prémenstruel, qui ne touche cependant qu’environ 12% des personnes pubères. «Toutes les femmes subissent ces variations hormonales cycliques, mais toutes ne développent pas un tel syndrome. Certaines sont plus vulnérables que d’autres, parfois cela s’explique par une prédisposition génétique, mais pas toujours.» 

Malheureusement, celles qui développent un syndrome prémenstruel sont aussi plus à risque de faire une dépression post-partum ou de vivre une transition de la ménopause difficile. 

Avec le temps…

Il n’y a cependant pas que le cycle menstruel qui peut entraîner des perturbations psychiques et physiques. Le temps qui passe est aussi un facteur important, car la production d’hormones sexuelles diminue avec l’âge. La production d’œstrogènes se fait de plus en plus irrégulière et fluctuante après 40 ans, pour s’arrêter à la ménopause, ce qui peut entraîner des sautes d’humeur, des bouffées de chaleur, une prise de poids, entre autres. Quant à la testostérone, particulièrement élevée lors de l’ovulation, elle diminue progressivement dès l’âge de 30 ans, entraînant un abaissement de la libido pouvant se transformer en un trouble du désir sexuel associé à du stress personnel et relationnel. Dans ce cas, une supplémentation peut être proposée. 

Un soutien hormonal est également préconisé lors de la périménopause (période qui précède l’arrêt total des règles) et de la ménopause pour celles qui ont des symptômes particulièrement invalidants. Quant au syndrome prémenstruel, il peut être évité grâce à la pilule qui a comme effet de stabiliser les fluctuations hormonales. 

Les médicaments ne sont cependant pas un passage obligé. «Le style de vie a une importance sur la capacité à gérer les différents symptômes liés aux variations hormonales. Le stress et tout ce qui a un effet excitant sur le cerveau, comme l’alcool, la caféine, le sucre, augmentent les symptômes. À l’inverse, la relaxation, la méditation de pleine conscience, une bonne hygiène de vie, la phytothérapie ou l’acupuncture sont des outils efficaces pour mieux faire face à ces périodes de transition. De manière générale, les femmes qui souffrent de ces différents troubles doivent savoir que cela n’est pas une fatalité et que des solutions individuelles, médicamenteuses ou non, peuvent les aider», conclut Nicola Pluchino.

Et les hommes?

Les hommes n’étant pas soumis au cycle menstruel, sont-ils pour autant épargnés par des troubles découlant de la testostérone, hormone indispensable à la fabrication de spermatozoïdes (entre autres)? La Dre Maria Mavromati, médecin à l’Unité d’endocrinologie et diabétologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) explique: «La production de testostérone chez l’homme diminue progressivement avec l’âge. Ceci est un processus physiologique. Prescrire de la testostérone à des hommes âgés juste pour compenser cette diminution n’est pas indiqué et n’est pas sans conséquences. En revanche, un traitement par testostérone est important en cas de baisse claire du taux de testostérone, associée à des symptômes typiques (tels que diminution franche de la libido, dysfonction érectile nouvelle, perte de pilosité sur le visage et le corps, fatigue importante, dépression, entre autres), d’autant plus si une cause médicale est mise en évidence.»

La diminution progressive de la testostérone liée à l’âge est parfois appelée andropause, mais ne correspond pas à un moment précis de la vie d’un homme, contrairement à ce qui se passe avec la ménopause. Elle entraîne cependant une baisse d’énergie, de libido et peut s’accompagner de prise de poids. «Les ovaires sont les seuls organes qui cessent de fonctionner à un moment précis au cours de la vie», explique la Dre Mavromati. Et qu’en est-il de la libido chez l’homme? «On peut observer une diminution avec l’âge mais qui est multifactorielle», conclut-elle.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 29/10/2023

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