Neuroimagerie de l’amour: au-delà du simple sentiment

Dernière mise à jour 14/06/12 | Article
Scan d'un cerveau
L’amour n’est pas qu’une émotion. En présence du sentiment amoureux, ce sont de multiples zones de notre cerveau qui s’éveillent… même les plus évoluées.

Plus qu’une simple émotion, telle que la joie, la tristesse ou le mépris, l’amour est une «fonction supérieure» avance le Dr Francesco Bianchi-Demicheli, psychiatre sexologue, travaillant au Département de Gynécologie et Obstétrique, aux Hôpitaux Universitaires de Genève. En collaboration avec Stéphanie Ortigue, chercheuse à l'université de Syracuse, à New York, il est parvenu à mettre en lumière la sublime fonction de l’amour grâce à ce qu’ils appellent la neuroimagerie de l’amour, soit l’analyse des réactions du cerveau face au sentiment amoureux.

Le fait d’aimer en appellerait selon eux bien au-delà des simples aires émotionnelles du cerveau. Lorsque l’amour apparait, c’est en effet presque sa totalité qui s’agite. «Il est bien entendu que les aires émotionnelles se réveillent, mais la neuroimagerie a pu démontrer que les aires les plus évoluées du cerveau, là où se font les processus cérébraux les plus complexes, s’éveillent également, explique le spécialiste. L’amour n’est donc pas qu’une émotion, c’est bien plus que cela.»

Pour mener à bien leur étude, qui s’insère dans une ligne de recherche et une collaboration scientifique entre Genève et les Etats-Unis, le Dr Bianchi-Demicheli et sa collègue se sont intéressés au cerveau de 36 femmes, âgées en moyenne de 20 ans, et amoureuses. Un amour qui a pu être définit grâce à une échelle très précise: l’échelle de la passion Hatfield & Spracher qui permet, selon différents critères, de comprendre si l’on est en présence d’amour passionnel ou d’un amour «compagnon». «Nous avons alors pris des personnes passionnément amoureuses contre des personnes qui avaient un amour ‘compagnon’, que l’on peut définir par un attachement, un lien de confiance, ou de l’amitié, explique le sexologue. Nous avons alors envoyé des stimuli liés à la personne aimée de manières aléatoire et randomisée. A l’apparition de celle-ci on pouvait constater l’activation de certaines zone du cerveau, les mêmes pour tout le monde. Nous avons tenté la même expérience avec des mots en liens avec l’être aimé et le résultat était le même. En faisant des stimulations très rapides, même si concrètement la personne ne voyait pas distinctement les images qui lui était proposées, son cerveau quant à lui réagissait, et ce de manière bilatérale. Nous avons donc pu construire notre étude sur la base de ces résultats.»

En opérant des activations corticales, ils ont ainsi pu déceler qu’en tout une douzaine d’aires du cerveau était activée sous l’effet de l’amour. Considérer alors l’amour comme un simple sentiment, reviendrait à ignorer tout ce que l’état amoureux fait sur notre cerveau. «L’amour est un réseau distribué dans le cerveau, surenchérit le Dr Bianchi Demicheli. C’est un phénomène dynamique!»

Parmi les aires touchées, l’amour va mettre en mouvement le système cognitif de l’individu, les aires liées à la motivation et à la récompense, ainsi que celles impliquées dans la cognition sociale, soit la capacité qu’à un individu à socialiser. En parallèle, il a été noté que les aires connues pour être en lien à la peur ou à l’agressivité se désactivent sous l’effet de l’amour. Le réseau de l’attention et surtout l’aire du «self» sont également très actives. Enfin, le gyrus angulaire compris dans les compilations mathématiques les plus complexes et impliqué dans des fonctions langagières très avancées, telles que la sémantique, se réveille lui aussi.

L’amour devient alors un concept très complexe que le cerveau traite à partir de sensation physiologique, psychique, du vécu d’un individu, de concepts culturaux, ou d’une expérience personnelle encrée dans la mémoire.

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