Mon ado stresse trop
L’adolescence est une période de grands bouleversements physiques et psychiques qui implique beaucoup d’ajustements de la part du jeune. «Par la force des choses, c’est une période anxiogène. Elle comporte beaucoup de nouveautés et de premières fois», explique la Dre Anne Edan, responsable de MALATAVIE-Unité de crise, projet HUG-Children Action du Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
Le corps change, les enjeux scolaires et au sein de la société deviennent plus nombreux. Le stress s’invite naturellement dans le quotidien. La Dre Edan précise: «Si les adolescents développent rapidement leur pleine capacité intellectuelle, leur cerveau n’est pas encore mature au niveau émotionnel, ni du contrôle moteur et comportemental. C’est l’une des raisons pour laquelle ils manquent parfois de "filtres" et de contrôle, qu’ils peuvent se montrer impulsifs et avoir des comportements à risque. Les enjeux relationnels sont aussi compliqués.»
La Dre Marie Schneider, pédopsychiatre au Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent des HUG, précise: «L’adolescence est une succession de crises développementales qui s’étend sur plusieurs années. C’est un grand bouleversement car l’individu passe du statut d’enfant, dans un corps d’enfant avec un cerveau immature, à un statut de jeune adulte qui vit un intense chamboulement hormonal, avec des pulsions sexuelles, entre autres, et une recherche d’autonomie.»
Les enjeux
Si la crise est une étape obligée de cette période de vie, les parents et l’entourage doivent cependant s’assurer que le jeune n’est pas en train de développer des troubles psychiques plus graves comme une dépression, des troubles anxieux persistants ou une autre maladie psychique. La Dre Schneider explique: «Un stress en réaction à la rentrée scolaire, à un examen ou à quelque chose de ponctuel est tout à fait normal. Il faut commencer à s’inquiéter lorsque l’anxiété perdure, lorsqu’elle entrave la vie quotidienne et qu’elle provoque des symptômes. Un ou une jeune qui ne dort plus, qui mange trop ou pas assez, qui développe plusieurs phobies et des troubles obsessionnels compulsifs (TOC) a clairement besoin d’aide.L’isolement social, l’arrêt d’activités qui lui plaisent sont aussi des signaux d’alerte.»
L’importance de consulter
Consulter un psychologue ou un psychiatre est alors utile, mais discuter avec un adulte de confiance de l’entourage peut déjà faire beaucoup de bien. «Ne pas rester seul, échanger avec la famille ou les parents est important. Certains jeunes ont peur d’inquiéter leur entourage, pour eux il est parfois plus facile de parler à un professionnel de leur mal-être. Les parents inquiets ont le droit d’insister pour que leur enfant consulte en lui montrant qu’ils sont également à l’écoute», explique la Dre Edan.
Certains signes ne sont pas à prendre à la légère, renchérit la spécialiste: «Les hallucinations auditives, une vision déformée de son corps, des troubles alimentaires, entre autres, sont des symptômes alarmants et il faut consulter. La plupart des troubles psychiques, comme la schizophrénie, le trouble de personnalité, le trouble bipolaire, entre autres, sont détectés à l’adolescence.» Et sa collègue Marie Schneider de préciser: «Lorsqu’un jeune consomme seul tous les jours du cannabis, c’est souvent une tentative d’automédication de ses symptômes. Il ne faut pas laisser faire et consulter un spécialiste.»
Quelques conseils pour les parents
- Ne jamais couper le dialogue avec son adolescent. «Garder un lien de qualité avec son enfant est très important. Parfois, il suffit de lui dire qu’on est là et qu’on a constaté que quelque chose n’allait pas. Il ne faut pas hésiter à le questionner et à lui montrer que l’on s’inquiète pour lui», précise la Dre Anne Edan, pédopsychiatre aux HUG.
- Laisser grandir l’adolescent en lui faisant confiance, en lui permettant un peu plus d’autonomie.
- Lui proposer de parler à un adulte de référence comme un oncle, une marraine, une personne de l’entourage en qui il a confiance. «Les psychologues scolaires sont aussi une bonne solution, car ils sont faciles d’accès et l’adolescent peut aller consulter sans le dire à ses parents», précise la Dre Marie Schneider, pédopsychiatre aux HUG.
- Suggérer des activités créatrices qui vont permettre au jeune d’exprimer autrement son mal-être: dessin, journal intime, entre autres.
- Faire des activités recréatrices avec son adolescent même s’il est réticent. C’est une façon de garder un lien et de ne pas le laisser s’isoler.
- Poser des limites claires et constantes. Elles sont rassurantes et indispensables au bon développement des enfants de tout âge. «On vit dans une société anxiogène qui change très vite. Le bond technologique actuel déboussole parfois les parents. Ils doivent cependant continuer à guider leur adolescent et à lui mettre un cadre. Savoir dire non est nécessaire», conclut la Dre Schneider.
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