Ce que vous jetez peut être mangé, c’est même bon pour la santé

Dernière mise à jour 03/02/21 | Article
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Utiliser les restes pour en faire de nouveaux repas ou apprêter des parties d’aliments que l’on aurait tendance à mettre à la poubelle permet non seulement de limiter le gaspillage mais apporte en plus une réelle plus-value nutritionnelle. Explications.

Feuilles de laitue défraîchie, carcasses de poulet, concombres plus très croquants ou encore épluchures de fruits, prennent souvent la direction de la poubelle. On se pose rarement la question de leur possible réutilisation. Ce gaspillage est pourtant évitable, même sans être un pro de la cuisine ou de la gestion ménagère. «En faisant preuve de bon sens, d’un brin de créativité et en s’inspirant de la cuisine de nos grands-mères, une famille parvient facilement à réduire de 80% son gaspillage alimentaire, assure Nina Müller, consultante chez Kitro, une start-up zurichoise spécialisée dans la réduction des déchets alimentaires. Malheureusement, on a pris l’habitude de ne manger que ce que l’on considère être la meilleure partie d’un produit et de jeter le reste.»

Laisser tomber l'économe

Il n’est pourtant pas bien difficile de réapprendre à cuisiner fanes de carottes, tiges de brocoli ou encore feuilles de chou-fleur. Encore faut-il être convaincu que ce changement a un intérêt tant économique que nutritionnel. Et c’est clairement le cas. «Les vitamines, les fibres et plusieurs micronutriments se trouvent en plus grande quantité dans la peau des fruits et légumes. Nutritionnellement parlant, il est donc dommage de ne pas la consommer, explique Maria-Lena Enz, diététicienne chez Teamnutrition à Genève et membre de l’Antenne des diététiciens genevois (ADIGE). Autre exemple, une poignée de pelures de pommes de terre couvre la moitié des besoins journaliers en fibres d’une personne adulte. Ce n’est pas rien!» Pour rappel, les fibres ont plusieurs effets bénéfiques sur la santé: elles rassasient (limitant ainsi le grignotage entre les repas), améliorent le transit intestinal et évitent les pics de glycémie (qui nous poussent ensuite à vouloir consommer encore plus d’aliments sucrés), entre autres.

On peut donc laisser tomber l’économe et manger les fruits et légumes sans les éplucher. Idéalement, il faudrait privilégier ceux issus de l’agriculture biologique pour éviter d’engloutir des pesticides. Il suffit alors de les rincer avant consommation ou, si nécessaire, de les débarrasser de la terre avec une brosse à légumes. «Je n’ai jamais compris pourquoi les gens s’embêtaient à tenter d’éplucher un potimarron, plaisante Chloé Charles. C’est tout sauf facile à faire et c’est inutile, comme pour la plupart des petites courges.» La jeune cheffe de 33 ans, installée à Paris, a fait de l’anti-gaspillage son cheval de bataille. «Un concombre qui a perdu sa fermeté peut être préparé avec du vinaigre et garnir ainsi un sandwich. Des carottes plus très croquantes sont parfaites pour une soupe ou des pickles. Avec les fruits ramollis, on peut faire des confitures ou des compotes, tout en gardant la peau. Les carcasses de poulet sont idéales pour préparer un vrai bouillon, comme le faisaient nos grands-mères.»

D’autant que carcasses de volaille et arêtes de poisson sont également excellents pour la santé: «Elles contiennent du calcium, du magnésium, du potassium, du phosphore, entres autres, précise Maria-Lena Enz. Elles sont donc parfaites pour faire un bouillon que l’on peut boire ainsi ou utiliser pour la cuisson des pâtes ou du riz. A noter aussi que tous ces os d’animaux contiennent de la glucosamine, une substance très importante pour la santé de nos cartilages et de nos articulations. Enfin, un bouillon fait maison n’a rien en commun avec un bouillon cube, souvent très salé et bourré d’additifs.»

Meilleure planification des repas et liste des courses

Et pour ne pas se retrouver avec de la nourriture périmée, les spécialistes de l’anti-gaspillage ne jurent que par une meilleure planification des repas et le recours aux listes de courses. Attention également à ne pas se laisser avoir par les dates de péremption indiquées sur les produits alimentaires. «Les yogourts peuvent souvent être consommés une semaine après la date indiquée. Les produits secs sont comestibles parfois encore des années après l’échéance marquée sur l’emballage», explique Justine Tincq, consultante en planification d’événements durables et fondatrice de Just no waste, entreprise romande active dans la réduction des déchets. Un produit qui sent mauvais, un emballage gonflé, la présence de moisissures, sont des indicateurs bien plus fiables qu’une date apposée sur le paquet. Pour limiter ses propres déchets, Justine Tincq réutilise tout ce qu’elle peut: «Un fond d’huile d’olive qui reste dans un bocal de tomates séchées ou le vinaigre des cornichons: avant de jeter, je me demande toujours si je peux faire quelque chose de ce "déchet".»

Car finalement, ne pas jeter, c’est précisément ce que faisaient nos aïeuls, tant par souci financier que grâce à de meilleures connaissances en cuisine. Et Chloé Charles de relativiser: «Il faut faire preuve de créativité pour réutiliser des restes ou des parties moins nobles des produits et, surtout, il faut oser. Au pire on rate la recette, et alors? Ce n’est pas une opération au cerveau quand même!»

 

Que faire avec…

  • La croûte d’un fromage à pâte dure: «Celle du parmesan est parfaite pour aromatiser un bouillon ou un plat en sauce, explique Chloé Charles, cheffe à Paris. Il suffit de la laisser mijoter avec la sauce et cela lui confère le fameux goût "umami" connu des japonais et qui signifie "goût délicieux" Une saveur assez particulière qui donne du caractère au plat.»
  • De la salade, du cresson, du persil défraîchis: «Il faut séparer les feuilles, les faire bouillir pendant cinq minutes, puis ajouter de l’huile d’olive et du sel pour obtenir un velouté, indique Chloé Charles. En refroidissant les feuilles sous l’eau froide après cuisson, on fixe la chlorophylle, ce qui permet de garder la jolie couleur verte.»
  • Des fanes de carotte, de fenouil, de radis (mais aussi de plusieurs autres légumes): elles sont idéales pour faire un potage, un cake salé ou un pesto. Elles sont riches en vitamines.
  • Des feuilles de chou-fleur: «Elles peuvent être cuites au four avec un peu d’huile d’olive et de sel, comme les feuilles de kale, explique Maria-Lena Enz, membre de l’Antenne des diététiciens genevois (ADIGE). Cela fait de merveilleuses chips de légumes.»
  • Tiges de chou-fleur ou brocoli: Elles sont parfaites pour faire un bouillon de légumes. Il faut les faire mijoter dans de l’eau bouillante avec des aromates.
  • Pain rassis: On peut en faire du pain perdu pour le petit-déjeuner, des croûtons, de la chapelure. On peut l’utiliser pour des croûtes au fromage ou pour de la bruschetta. Les recettes ne manquent pas!

Le cake à l’orange zéro déchet (ou presque)

Ingrédients

2 oranges bio

5 œufs

200 g de sucre

225 g de poudre d’amande

½ sachet de levure

Cannelle selon les goûts

Préparation

  1. Plonger les oranges dans une petite casserole d'eau et les cuire pendant 2h. Les mixer.
  2. Mélanger le reste des ingrédients et ajouter les oranges mixées.
  3. Cuire 45 min dans un four préchauffé à 180°C.

Cette recette est faite sans matière grasse ajoutée et est adaptée aux personnes intolérantes au gluten et au lactose.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 15/11/2020.

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