La radio du dos, version 2.0
Un outil précieux pour comprendre et soigner les maux de dos, c'est ce qu'offre l'EOS, un appareil d'imagerie installé à la clinique de La Source à Lausanne depuis le printemps 2015. La technique? La radiographie classique à rayons X, mais dopée par l'informatique et des détecteurs ultraperfectionnés. L'EOS se présente comme une cabine où l'on se tient debout. Deux émetteurs de rayons X, montés sur des rails verticaux, sont cachés dans ses parois. Ils sont disposés à angle droit, ce qui permet de prendre simultanément des images de face et de profil. En face d'eux, toujours dans les parois, on trouve les détecteurs, mais au lieu de plaques photographiques que viendraient frapper les rayons X, l’appareil utilise des chambres à fil, un dispositif hyperprécis inventé par le prix Nobel Georges Charpak (1924-2010) et utilisé à l’origine en physique des particules.
«Au signal, ne plus bouger…» En 20 à 25 secondes, les images sont produites. Elles présentent plusieurs avantages. Elles sont d'abord plus précises qu'une radio du dos classique. Pourquoi? Parce qu’une radio classique de toute la colonne est en fait l’addition de trois clichés différents que l'on «scotche» ensemble. Or, ce processus induit des imprécisions importantes. Dans l'EOS, au contraire, on réalise quelques dizaines de clichés, tous aussi précis les uns que les autres, que l'ordinateur va ensuite reconstituer en une seule image. L'EOS, malgré cela, expose à 10 à 100 fois moins de radiations que la radiographie classique car ses détecteurs sont beaucoup plus sensibles. Une caractéristique très importante, en particulier pour le suivi de scolioses chez les enfants qu’il faut éviter d’irradier inutilement.
Mais l'EOS présente aussi des avantages par rapport à l'IRM et au scanner, explique Duccio Boscherini, neurochirurgien à La Source. Ces deux dispositifs fournissent en effet des images de la colonne, mais pas du reste du corps, contrairement à l’EOS. Or, les genoux ou les hanches peuvent être la cause de déséquilibres créant des maux de dos. De même, scanner et IRM sont réalisés quand la personne est couchée. «Ils fournissent donc des images restreintes de l'anatomie, dans une position statique et non physiologique.» Par opposition, l'EOS montre toute la personne en position debout.
Définir la normalité
Les médecins se rendent compte que les maux de dos doivent être évalués de manière globale, qu'ils sont le résultat d'une interaction subtile entre la posture de la personne, sa musculature et des caractéristiques anatomiques qui lui sont propres. «Il existe un cône d'économie en position debout, relate le chirurgien, un ensemble de postures possibles où la musculature est sollicitée au minimum.» Quand on s'en écarte, celle-ci doit travailler davantage, ce qui augmente le risque de maux de dos.
On a désormais identifié des paramètres normaux, poursuit le chirurgien, des angles (de cambrure par exemple) ou des mesures (l'emplacement du centre de gravité) qui permettent de prédire si une personne risque davantage de connaître des maux de dos. Telle patiente, par exemple, a un sacrum presque à l'horizontale, illustre le spécialiste: c'est très rare et cela cause naturellement une cambrure exagérée qui explique ses maux de dos.
Ces valeurs, l'EOS les calcule aisément et les fournit rapidement. Une fois munis de ces données, les spécialistes comprennent mieux l'origine des maux de dos. Ces mesures sont également précieuses pour déterminer où opérer pour être le plus efficace, de même que pour évaluer comment la colonne s'est repositionnée après une opération.