«L’endettement a un fort impact sur la santé d’un individu»

Dernière mise à jour 06/03/23 | Questions/Réponses
PS48_sophie_buchs
Première femme à la tête de l’influente association Caritas Genève1, l’ancienne secrétaire générale du Parti démocrate-chrétien genevois, Sophie Buchs, a pris à bras-le-corps, depuis son arrivée, les nombreux chantiers engagés. Elle revient pour nous sur les apprentissages de l’année écoulée et sur les projets à venir.

Bio express

9 juillet 1987 Naissance à Genève.

2011 Master en Sciences politiques à l’Université de Genève.

2011-2016 Secrétaire générale du Parti démocrate-chrétien genevois.

2016-2021 Directrice de la Fondation Pro Juventute Genève (désormais appelée 022 Familles).

Depuis septembre 2021 Directrice de Caritas Genève.

  

Vous avez pris la direction de Caritas Genève fin 2021. Quelles ont été les chantiers que vous avez alors pris en main?

Sophie Buchs: Je suis arrivée dans l’association en plein contexte de crise sanitaire, avec tout le travail de distribution des aides Covid qui se terminait. Quelques mois après, la guerre en Ukraine a débuté et nous avons rapidement déployé une équipe pour accompagner les familles d’accueil à Genève. Nous avons ainsi pu aider plus de 350 familles dans leur vie quotidienne accueillant des personnes réfugiées ukrainiennes.

Un autre grand projet de ces derniers mois a été l’ouverture de l’Upcyclerie2 à Genève…

Oui, en effet. Tout un travail a été fait autour de notre réseau de vente et de formation dans le domaine de la seconde main. Nous recevons beaucoup de matériaux de donateurs que nous ne pouvons pas revendre en l’état. Nous avions donc le souhait de proposer des lieux de formations complètes, un atelier couture et un atelier bois notamment, tout en modernisant nos lieux de vente.

Quels seront les projets de l’année à venir?

Nous allons poursuivre le travail d’accompagnement des familles d’accueil. Le conflit en Ukraine n’est pas terminé et de nombreux réfugiés sont toujours présents dans le canton. L’autre plan d’action est l’anticipation des besoins de la population liés à l’augmentation du coût de la vie. Ce renchérissement va probablement entraîner une hausse de l’endettement et des difficultés, notamment chez des personnes à bas revenus ne bénéficiant pas d’aides, qui risquent de basculer dans la pauvreté. Nous nous attendons à une forte augmentation des demandes de soutien au printemps 2023.

Vous apportez notamment votre soutien aux personnes âgées… Est-ce un public particulièrement vulnérable?

Oui, c’est en effet une population qui peut être fortement impactée par les variations des prix et se retrouver rapidement dans des situations compliquées. Nous nous réjouissons cependant que le Conseil des États et le Conseil National aient voté une adaptation de l’AVS au renchérissement, cela devrait aider les plus vulnérables. Afin de lutter contre l’isolement de cette population, Caritas Genève propose aussi des programmes de bénévolat avec des visites sur le long terme aux personnes âgées.

Lutter contre la pauvreté et l’exclusion, c’est aussi se battre pour ce droit fondamental qu’est la santé et pour l’accès à tous à ce droit… Des projets dans ce sens sont-ils en cours?

L’accès des personnes à tous leurs droits fondamentaux est au cœur de notre action. Pour la santé, Caritas suisse a mis en place un plaidoyer sur les questions d’accessibilité aux soins. Nos assistants sociaux peuvent, dans le cadre de leur accompagnement, débloquer des fonds pour payer certains frais de santé si cela est pertinent. Plus globalement, le soutien aux personnes en difficulté permet d’agir sur leur santé générale. On oublie souvent, par exemple, que l’endettement a un fort impact sur la santé d’un individu. Enfin, l’un de nos axes de travail est la question de l’alimentation. Nous avons mis en place un réseau d’épiceries3 qui proposent des aliments moins chers que dans le commerce de détail. Nous proposons aussi des ateliers cuisine et santé, dont le but est d’apporter des solutions pour manger sainement sans dépenser beaucoup d’argent.

En un mot…

Une personnalité que vous admirez? «Simone Veil.»

Un adjectif qui vous correspond? «Déterminée.»

Un rêve un peu fou? «Que l’on arrive à faire baisser le taux de pauvreté en Suisse. Avec notamment une vraie réforme du système des assurances sociales.»

Que pensez-vous, globalement, du système de santé en Suisse?

Nous possédons un système de santé très performant, c’est certain, mais c’est encore un système à deux vitesses, car certaines personnes ont peu, ou moins, d’accès aux soins que d’autres. Notre plus grosse revendication à Caritas, c’est que les coûts liés à l’assurance n’excèdent pas, si possible, 10% du revenu d’un individu.

Après notamment la direction de la fondation Pro Juventute, ce poste de directrice de Caritas Genève était-il dans la suite logique de votre parcours?

Ma volonté était vraiment de pouvoir intensifier mon travail dans le domaine social. Et Caritas est une association avec un pilier stratégique, le plaidoyer sociopolitique pour des personnes qui n’ont pas de voix. C’est cet aspect qui m’a vraiment motivée.

Quel rapport entretenez-vous personnellement avec votre santé?

J’ai des parents médecins, donc la question de la santé, notamment les réflexions autour de la politique de santé, du système, etc., ont toujours été très présentes dans ma vie.

Comment ménagez-vous votre santé en général, justement?

Depuis que mes filles sont nées, même si j’ai moins de temps, j’essaye de rester active, d’avoir une alimentation la plus saine et la moins transformée possible. Je suis aussi très attentive à ma santé mentale. Je sais que j’ai une vie personnelle et professionnelle très exigeante, et j’essaye donc de me préserver. Je n’hésite pas à demander de l’aide, à m’octroyer des pauses, à éviter le stress… afin de pouvoir tenir sur la longueur.

Que peut-on vous souhaiter pour la suite?

Que ce soit dans la sphère familiale, amicale ou associative, je pense que savoir que l’on est soutenu, qu’on bénéficie d’un soutien moral, professionnel, humain, est quelque chose qui aide beaucoup à avancer.

_____

1) www.caritas-geneve.ch

2) L’Upcyclerie, Rue des Bains 63, 1205 Genève

3) Épicerie Plainpalais, Rue de Carouge 51-53 (passage), 1205 Genève / Épicerie Servette, Avenue De-Luserna 13, 1203 Genève

Paru dans Planète Santé magazine N° 48 – Mars 2023

Articles sur le meme sujet
PS51_blaise_hofmann

«Je souffre d’un grand sentiment d’urgence»

Après avoir parcouru le globe, Blaise Hofmann a un jour décidé de retourner vivre à la campagne, près de son village d’enfance, Villars-sous-Yens. Là, entre culture de la vigne et écriture, il s’est replongé dans son histoire familiale paysanne. Dans son dernier roman, Faire Paysan (Éd. Zoé), il s’interroge sur la pérennité de ce métier essentiel, arrivé à un tournant de son existence. Rencontre avec un amoureux de la terre et des horizons lointains.
VS23_Kenny Privet_@Gilcoproduction

«Je me lève tous les jours pour faire ce que j’aime»

Kenny Privet commence le fitness à 17 ans pour des raisons de santé. Cela devient rapidement une passion. Il obtient le statut de bodybuilder professionnel à l’âge de 28 ans. Depuis, il vit de sa passion, entre son métier de coach, les entraînements et les compétitions autour du globe. Rencontre avec un grand passionné à la discipline de fer.
VS23_Robin Fournier_©Patrick Guller_@gullerpat

«Le mot d’ordre, c’est la résilience»

Depuis qu’il s’est lancé le défi de réaliser la Grande traversée des Alpes (le GR5) en seulement quelques jours, rien ne l’arrête! À 28 ans, Robin Fournier a déjà un palmarès bien fourni. Du Québec à la Tanzanie, en passant par la Jordanie, ce jeune valaisan foule les sentiers d’ultra-trail les plus mythiques et se hisse en tête des classements. Rencontre.
Videos sur le meme sujet

Quʹest-ce que le coma artificiel?

Quelle est la procédure pour placer quelquʹun dans un coma artificiel?

Des livres écrits par des médecins pour expliquer les maladies aux enfants

Il nʹest pas toujours facile de trouver les bons mots pour parler de la maladie et de tout ce qui lʹentoure aux enfants.

Comment la chaleur tue de plus en plus

Selon une étude parue dans la revue Nature Communications (24.08.2023), le réchauffement climatique causerait la mort de plus en plus de personnes dans le monde, mais aussi en Suisse.