Le mystérieux orgasme féminin

Dernière mise à jour 23/10/17 | Article
mysterieux_orgasme_feminin
Si le rôle physiologique premier de l’orgasme masculin est très clairement la reproduction, grâce à l’éjaculation, celui de la jouissance féminine n’a pas fini de susciter le débat.

Se pourrait-il que son seul but soit le plaisir? Les hypothèses et théories sont diverses et les discussions ne sont de loin pas closes. De même, l’origine même de l’orgasme recèle encore des mystères.

Selon les études, entre 16 et 25% des femmes, soit une femme sur quatre, souffre de troubles de l’orgasme: il s’agit donc de la deuxième cause de troubles sexuels féminins, avec une prévalence accrue à partir de 40 ans. En revanche, dès la quarantaine, les femmes jouissant d’une sexualité épanouie vivent généralement davantage et de meilleurs orgasmes qu’entre l’âge de 18 et 29 ans. En tous les cas, cette phase de la réponse sexuelle donne lieu à bon nombre de mythes, dus notamment à la méconnaissance des mécanismes et de l’anatomie mêmes du plaisir féminin. Ce qui explique qu’il règne toujours une certaine «tyrannie de la jouissance», la croyance que la femme doit y parvenir à tout prix.

Les mécanismes de la jouissance

La jouissance sexuelle est étroitement liée à l’excitation érotique objective et subjective. Si celles-ci ne sont pas adéquates, insatisfaisantes ou mal ressenties émotionnellement et physiquement, et n’atteignent ainsi pas une certaine intensité, l’orgasme risque de ne pas se produire. Tout comme il peut ne pas survenir même lorsque toutes les conditions sont réunies. En effet, une femme sur deux ne jouit pas à chaque rapport sexuel, même si l’excitation est au rendez-vous. A l’inverse, certaines femmes, rares, peuvent avoir des orgasmes spontanés sans désir ni excitation préalables. Des études scientifiques montrent que 17% des femmes peuvent vivre plusieurs orgasmes consécutifs, sans pause. D’autres, assez rares, peuvent même atteindre la jouissance plus d’une trentaine de fois dans une journée. Selon certains spécialistes, la proportion de femmes multi-orgasmiques pourrait même atteindre les 40%.

Le seuil d’excitation nécessaire à la jouissance varie d’une femme à l’autre. Les facteurs objectifs (stimulations directes, positions, etc.) et subjectifs (émotions, fantasmes, etc.) qui déclenchent l’orgasme dépendent également de chaque femme, ainsi que la manière dont elle le ressent et comment il se manifeste.

Une condition de base à l’émergence de la jouissance féminine est évidemment d’avoir envie de vivre une relation sexuelle, avec un partenaire ou avec soi-même, et de ne ressentir ni honte, ni culpabilité, ni dégoût face au sexe. S’y sentir obligée, sans en avoir envie, par exemple pour satisfaire son partenaire, peut freiner ou couper le plaisir.

De plus, le vécu, l’histoire sexuelle, familiale, culturelle, influent autant sur la jouissance que sur les autres phases de la réponse sexuelle féminine.

Vaginale ou clitoridienne, une question dépassée

Alors que certaines femmes ont un orgasme durant la pénétration vaginale, beaucoup d’autres ont besoin de stimulations manuelles ou orales du clitoris. Cette différence induit souvent des attentes et mauvaises interprétations si l’une ou l’autre forme d’orgasme se produit. L’une des difficultés principales des partenaires est de reconnaître ce que chacun désire et attend, et de le communiquer efficacement à l’autre.

Il n’existe pas une forme d’orgasme plus normale qu’une autre, bien que certains tentent encore et toujours de nous faire croire (à nous, les femmes, mais aussi aux hommes) que la jouissance clitoridienne serait moins honorable –«infantile» selon Freud. Et que la jouissance vaginale serait le nirvana à atteindre pour être une «vraie femme» (et nos partenaires masculins de «vrais hommes»). La croyance perdure et exclut les autres possibilités de jouir au féminin.

En effet, pendant des décennies, les psychanalystes ont cru à la théorie de Sigmund Freud qui était persuadé qu’une femme mature devait jouir grâce au pénis, soit à la pénétration. Puis, dans les années 1950, Masters et Johnson, pionniers en la matière, ont découvert que le site premier de stimulation était le clitoris et que les contractions orgasmiques se propageaient seulement par la suite dans le vagin.

Le point ma-G-ique

Les recherches les plus actuelles concordent quant à l’existence d’une autre zone que le clitoris capable de déclencher l’orgasme: le point G, ainsi nommé d’après le Dr Grafenberg qui en a fait la description dans les années 1950 déjà.

En réalité, il s’agit d’une zone, appelée le fascia d’Halban, sise dans la moitié supérieure de la face antérieure du vagin –à l’endroit où la vessie touche la paroi vaginale. Les recherches cliniques ont démontré que ce point existe bel et bien et que sa stimulation par des pressions douces, en particulier avec les doigts, procure une sensation de plaisir importante. De récentes recherches auraient aussi révélé des connexions nerveuses entre les tissus intravaginaux et le clitoris.

Mais toutes les femmes ne sont pas sensibles aux stimulations du point G, ni à chaque fois. Car il ne s’agit pas d’un simple bouton «on/off» qu’il suffirait d’actionner pour déclencher l’orgasme à volonté. Il faut non seulement une bonne connaissance du corps de la femme mais aussi, et surtout, qu’elle ait un bon niveau d’excitation pour atteindre ainsi l’orgasme.

Finalement, ce qui devrait avoir de l’importance lorsqu’on fait l’amour, c’est la seule qualité du plaisir entre deux personnes consentantes, et non pas le moyen par lequel elles l’atteignent. D’ailleurs, ce n’est pas parce qu’une femme jouit, et même plusieurs fois, qu’elle est forcément satisfaite de sa relation sexuelle et amoureuse. A l’inverse, elle peut vivre une histoire d’amour harmonieuse sans jamais avoir d’orgasme.

La vitesse de l’orgasme

La vitesse de la réponse sexuelle d’une femme n’est pas la même à tout moment ni en toutes circonstances, et selon le partenaire. Elle varie en fonction de facteurs physiques, de la capacité physiologique à répondre, du contexte, de la forme physique du moment, du niveau d’excitabilité, d’agents externes, ainsi que de facteurs émotionnels et psychologiques. Toutefois, on considère trop souvent encore que la femme qui jouit lentement doit avoir un problème et que celle qui jouit très rapidement serait une «bombe sexuelle». Or, chaque femme a sa propre manière de jouir, l’important restant le plaisir!

Les stimulations vers le plaisir

Il existe une large palette de stimulations (physiques, sensorielles, subjectives, etc.) pouvant mener une femme à l’orgasme. Tout d’abord, diverses stimulations physiques peuvent provoquer un plaisir intense. Des stimulations clitoridiennes et vaginales, mais également la stimulation des glandes périurétrales (situées le long de l’urètre), ainsi que celle des mamelons. Certaines positions sont plus favorables à l’orgasme, tout comme certains mouvements (par exemple les ondulations du bassin). La stimulation de la peau est aussi un facteur important: chaque femme a ses propres zones érogènes, très diverses (aisselles, bras, cuisses, épaules, fesses, mains, nuque, oreilles, etc.).

On constate que les stimulations émotionnelles et psychologiques peuvent également conduire à l’orgasme. Certaines femmes peuvent jouir simplement en imaginant une situation érotique avec leur partenaire, ou en se remémorant des moments de plaisir, voire parfois en dormant.

Les seuls mots (récits érotiques, mots passionnés, etc.) peuvent aussi, chez certaines femmes et dans certains contextes érotiques, déclencher l’orgasme.

En utilisant l’un ou l’autre de ces divers stimuli –successivement, alternativement, simultanément, ou progressivement–, la voie vers l’orgasme peut être toute tracée. A condition, bien sûr, que la femme se connaisse bien grâce à un apprentissage permanent. Et qu’elle sache clairement communiquer ses envies à son partenaire et que les autres conditions (situation, harmonie, intimité, etc.) soient favorables.

________

Extrait de J’ai envie de comprendre… Ma sexualité (femme), de Ellen Weigand, en collaboration avec le Dr Francesco Bianchi-Demicheli, Ed. Planète Santé, 2013.