Lutter contre la dépression grâce à la luminothérapie

Dernière mise à jour 15/10/20 | Article
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Chaque hiver, vous redoutez la grisaille et les jours qui raccourcissent, s’accompagnant parfois d’une baisse de moral. On estime en effet que 2 à 4 % de la population seraient touchés par la dépression saisonnière. Dans des cas spécifiques, la luminothérapie peut alors être indiquée. Explications.

Pensez au remboursement

La gamme de produits disponibles sur le marché étant large, les prix proposés varient également beaucoup. Il faut généralement compter entre CHF 300 et CHF 800 pour une lampe de catégorie «luminothérapie médicale». Celles-ci produisent une intensité lumineuse de 10'000 Lux minimum et font l’objet, depuis 1998, d’une reconnaissance de la part des caisses-maladie.

En cas de prescription médicale pour «dépression saisonnière automne-hiver», l’achat d’une lampe de luminothérapie peut donc être remboursé par l’assurance de base à hauteur de CHF 350 et de CHF 1,80 par jour en cas de location.

Comme sa forme classique, la dépression saisonnière se manifeste par de la tristesse, un manque général d’envie, des problèmes de concentration et de mémoire, voire même des envies suicidaires. Mais elle a pour particularité de survenir sous forme d’épisodes dépressifs récurrents en automne/hiver, avec une amélioration nette de l’état lors des saisons ensoleillées.

Pour les personnes qui en souffrent, la luminothérapie peut être un traitement efficace. Une récente étude française parue dans Sleep Medicine Reviews et menée par une équipe du CHU de Strasbourg sur des personnes souffrant de dépression modérée à sévère, révèle en effet que la luminothérapie seule apporte les mêmes résultats qu’un traitement antidépresseur. Ni plus, ni moins. Autre découverte majeure, l’association de luminothérapie et d’antidépresseurs présente un effet nettement supérieur à la monothérapie. «La combinaison de ces deux traitements est plus efficace que s’ils sont utilisés seuls, ce qui suggère que l’on peut la proposer en traitement de première intention pour stimuler et accélérer le taux de réponse», conclut le Dr Pierre-Alexis Geoffroy, psychiatre, médecin du sommeil et principal auteur de l’étude.

C’est là certainement la grande nouveauté de ces travaux. Si la luminothérapie a déjà fait ses preuves pour les dépressions saisonnières, les études récentes montrent clairement que ce traitement peut aussi avoir un réel bénéfice dans les dépressions non saisonnières.

Comment fonctionne la luminothérapie?

La lumière, captée par les cellules de la rétine au niveau de l’œil, est transmise jusqu’à l’hypothalamus de notre cerveau, où elle bloque la conversion de la sérotonine en mélatonine, un procédé permettant de réguler les rythmes circadiens jour/nuit. Pour résumer, tandis que dans la journée nous avons besoin d’un bon stock de sérotonine – neurotransmetteur impliqué notamment dans certains troubles psychiatriques comme la dépression –, le soir, c’est la mélatonine qui favorise l’endormissement. «Chez les personnes atteintes de dépression hivernale, le peu de lumière emmagasiné le jour ne permet pas à ce mécanisme de transformation de fonctionner correctement, explique la Dre Hélène Richard-Lepouriel, médecin adjointe responsable de l'Unité des troubles de l'humeur aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). La sérotonine continue alors à être transformée en mélatonine durant la journée, comme si c’était la nuit.» Conséquence: le manque de sérotonine provoque un état dépressif, tandis que l’accumulation de mélatonine entraîne une hypersomnie durant la journée.

Face à cette défaillance, la luminothérapie permet de compenser le manque de lumière naturelle et de relancer le bon fonctionnement du système. «Dans certains cas de dépression non saisonnière, ce mécanisme est également dysfonctionnel, d’où l’intérêt de la luminothérapie en traitement adjuvant.» Elle peut en effet compléter l’action des antidépresseurs et permettre une plus grande rapidité d’action. Avec la luminothérapie, les améliorations se voient dès la première semaine, contre deux à quatre semaines pour un traitement antidépresseur. Une rapidité d’action qui représente un avantage certain pour les patients souffrant de dépression sévère.

Moins d’effets secondaires

Autre avantage de la luminothérapie, l’absence quasi totale d’effets secondaires liés à son utilisation. Si quelques cas bénins de maux de tête ou d’irritation des yeux ont été relevés, ils restent extrêmement rares, tandis que ceux des antidépresseurs (troubles de la libido, nausées, troubles du sommeil, prise ou perte de poids…) sont fréquemment observés chez les patients. «Il est important aussi de rappeler que les lampes de luminothérapie n’émettent pas d’UV mais uniquement le spectre de la lumière visible, rappelle la Dre Richard-Lepouriel. Il n’y a donc pas de risque de cancer de la peau.»

Quelle lampe de luminothérapie pour quelle utilisation?

Il existe un vaste choix de lampes de luminothérapie, disponibles sur Internet ou en magasin. Il est essentiel de s’assurer que la lampe porte bien la norme CE, qui assure une certaine qualité. Autre exigence: qu’elle émette une luminosité de 10’000 lux, la puissance nécessaire pour pouvoir tirer des bénéfices du traitement, avec une exposition matinale quotidienne de 30 à 40 minutes, afin d’emmagasiner de la lumière pour la journée. Suivez strictement les recommandations d’utilisation, en plaçant la lampe à bonne distance du visage (généralement 60 à 80 cm, à adapter selon les directives de l’appareil).

De la même façon qu’un médicament, la luminothérapie doit être dosée selon la gravité des symptômes et le profil du patient. D’où l’importance d’en discuter avec un médecin avant utilisation, ce qui permet aussi de s’assurer de l’absence de potentielles contre-indications, telles que certaines pathologies oculaires.

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Paru dans Générations, Hors-série « Booster sa forme – Conseils experts », Octobre 2020.