La maladie de Parkinson affecte 15000 Suisses

Dernière mise à jour 21/03/12 | Article
Cerveau avec pièces de puzzle
Après Alzheimer, la maladie de Parkinson est la deuxième affection neurodégénérative la plus fréquente dans les sociétés occidentales. En Suisse, 15000 personnes sont touchées, un nombre qui pourrait bien augmenter ces prochaines années compte tenu du vieillissement de la population.

Chez la majorité des malades, elle survient après 40 ans (en moyenne entre 55 et 60 ans), mais peut se révéler plus précocement, à 30 ans déjà, comme chez Michael J. Fox. «Contrairement à d’autres pathologies, Parkinson est plus bénigne chez le jeune adulte et son évolution est plus lente. A un âge avancé (au-delà de 70 ans), en revanche, elle s’accompagne plus rapidement de symptômes non moteurs», détaille le Pr Vingerhoets, responsable de l’Unité des maladies neurodégénératives au CHUV. Plusieurs années avant, des signes précurseurs peuvent se manifester: perte de l’odorat, constipation, apathie, dépression. Plus typique, un trouble comportemental apparaît lors du sommeil paradoxal. Il se traduit par une agitation pendant les rêves (la phase REM) qui semblent être vécus, contrastant avec l’immobilité normale du corps, propre à cette phase de sommeil.

Raideurs et tremblements

Mais c’est l’émergence des troubles moteurs qui signe véritablement le début de la maladie. Les trois symptômes majeurs sont le ralentissement général de la motricité, la raideur des membres et les tremblements de repos. Parce qu’elle affecte la motricité automatique, cette maladie est particulièrement invalidante, comme l’explique le Pr Pierre Pollak, médecin chef du Service de neurologie des HUG: «Pour pouvoir être exécuté, le moindre des mouvements doit être voulu. Les gestes simples et répétitifs du quotidien comme se brosser les dents, s’essuyer les pieds, écrire, composer le code de sa carte bancaire ou battre des œufs, par exemple, demandent une très grande énergie, épuisant à force la personne, qui perd toute motivation.»

Ces symptômes s’expliquent par un déficit en dopamine, causé par la destruction progressive des neurones responsables de sa production, dans une région du cerveau qu’on appelle «la substance noire». Or, ce neurotransmetteur joue un rôle fondamental dans le contrôle de la motricité. Mais il est aussi impliqué dans plusieurs circuits neuronaux comme ceux de l’apprentissage et de l’émotion, qui lui vaut son qualificatif d’«hormone du plaisir».

Infographie parkinson
Infographie parkinson

La mise en place d’un traitement médicamenteux permet d’y remédier et d’améliorer rapidement les difficultés motrices. La lévodopa (un précurseur de la dopamine) et les agonistes dopaminergiques (des molécules chimiques qui vont mimer l’effet de la dopamine) sont les deux grandes classes de médicaments utilisées. «Maîtrisés, ces traitements sont efficaces et permettent aux patients de retrouver leur personnalité d’avant et de gagner en bien-être», commente le Pr Pollak. Revers de la médaille, cet effet «lune de miel» ne dure pas. Au bout de cinq à dix ans de lévodopa, les bénéfices diminuent et des complications surviennent ». D’une heure à l’autre, le patient peut passer d’un état «on» à un état «off». La motricité est améliorée, mais de manière discontinue. «Ces fluctuations s’expliquent par la courte durée de vie de la lévodopa dans le sang, contrairement aux agonistes dopaminergiques, jugés moins efficaces, et qui ont eux d’autres effets secondaires», poursuit le Pr Vingerhoets. A cela s’ajoutent l’apparition de dyskinésies, qui sont des mouvements anormaux et involontaires typiques (torsion des membres, la tête qui balance, par exemple). La chirurgie (stimulation cérébrale profonde) est réservée aux patients qui présentent ces fluctuations motrices, pour autant qu’il n’y ait pas de contre-indications (âge avancé, par exemple).

Infographie parkinson

Des symptômes non moteurs complètent le tableau clinique: sensibilité accrue à la douleur, mauvais sommeil, somnolence diurne avec des attaques irrépressibles de sommeil (syndrome narcoleptique), digestion lente, constipation, envies pressantes d’uriner, troubles de la régulation de la pression artérielle et du chaud et du froid, apathie, dépression, déclin cognitif, etc.

Mort progressive des neurones

Si les traitements actuels masquent efficacement les symptômes, ils n’ont en revanche aucun effet neuroprotecteur. A un stade avancé, la mort progressive des neurones entraîne des difficultés à la marche, une grande instabilité avec un risque élevé de chutes, des troubles psychiques et cognitifs (lenteur de la réflexion, difficultés d’élocution, hallucinations), végétatifs ou des difficultés à déglutir.

Aujourd’hui, on ne guérit pas de la maladie de Parkinson. Mais la recherche, très active, permettra peut-être de découvrir une molécule ou un vaccin, capable de freiner ou d’arrêter le cours de la maladie.

Ces médicaments qui font déraper

Le phénomène est connu depuis quelques années seulement. Les médicaments antiparkinsoniens – les agonistes dopaminergiques surtout – peuvent provoquer des troubles du comportement dévastateurs: jeu pathologique, achats compulsifs, addictions à des activités récréatives (internet, sport, bricolage, etc.), boulimie, «hypersexualité» (une sexualité débordante et potentiellement déviante).

Les «troubles du contrôle des impulsions» concerneraient environ 15% des patients traités par des agonistes. Les hommes, jeunes, qui vivent seuls, y seraient davantage exposés. «La dopamine n’a pas été surnommée "hormone du plaisir” par hasard, explique le Pr Pollak. C’est une substance très puissante qui peut conduire à de véritables dérives. Avant toute prescription, mais aussi régulièrement au cours du traitement, il convient de s’enquérir des activités favorites du patient et de certains de ses comportements, susceptibles d’être modifiés par les médicaments». «En effet, poursuit le Pr Vingerhoets, les patients se vantent rarement de leurs excès, ce qui peut compliquer le diagnostic». Or, la mise en lumière de ces conduites  problématiques permet d’éviter des catastrophes personnelles, ce d’autant plus que ces effets secondaires sont réversibles et qu’ils disparaissent après ajustement du traitement.

La piste génétique confirmée grâce à une famille vaudoise

La maladie de Parkinson n’est pas héréditaire. Mais dans 10 à 15% des cas, on a affaire à des formes familiales, causées par des mutations génétiques. On doit la découverte du 6e  («VPS35» ou «PARK 17») des sept gènes impliqués, à une équipe de médecins lausannois. «Dans les années 2000, une patiente du Pr Vingerhoets révèle que dix membres de sa famille souffrent de Parkinson. Cela a été le point de départ d’une recherche, menée en collaboration avec la Mayo Clinic de Jacksonville en Floride», commente le Dr Christian Wider, médecin responsable de l’Unité des maladies neuro-génétiques du CHUV. En 2011, il copublie cette découverte exceptionnelle dans l’American Journal of Human Genetics.

La piste génétique offre un espoir réel dans la compréhension de la maladie, en identifiant les événements moléculaires impliqués dans la mort neuronale. A terme, cette connaissance permettra d’élaborer des stratégies thérapeutiques visant à prévenir sa survenue, ou à en infléchir la progression.

En collaboration avec

Pour en savoir plus

www.parkinson.ch
 

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