Pilules du lendemain: moins efficaces chez les femmes obèses?

Dernière mise à jour 25/06/14 | Article
Pilules du lendemain: moins efficaces chez les femmes obèses?
Les femmes pesant 75 kg et plus auraient un risque accru de tomber enceintes en prenant une pilule du lendemain, qui serait carrément inefficace chez celles de 80 kg et plus. Ce risque serait légèrement moins grand avec ellaOne®, la nouvelle pilule dite du surlendemain disponible en Suisse depuis cette année.

La nouvelle est de taille, mais n’a guère fait de bruit en Suisse: les pilules du lendemain seraient moins efficaces chez les femmes pesant 75 kg et plus, et inefficaces chez celles pesant 80 kg et plus. Et le risque de grossesse serait plus important avec le NorLevo® (seule pilule d’urgence à disposition en Suisse jusqu’à fin 2013), qu’avec l’ellaOne®, du même fabricant, HRA Pharma. Cette dernière substance a fait son entrée discrète dans le pays en janvier dernier. Déjà surnommée la pilule du surlendemain, elle offre l’avantage de pouvoir être prise dans les 120 heures suivant le rapport sexuel, contre 72 heures pour la NorLevo®. Elle serait aussi plus efficace.

«Ce lien potentiel entre indice de masse corporelle (IMC) et échec de la contraception d’urgence a été découvert par hasard par des chercheurs dans le cadre de deux études récentes comparatives de l’efficacité entre le NorLevo® et l’ellaOne®, explique la Dresse Dorothea Wunder, cheffe de l’Unité de médecine de la reproduction au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), à Lausanne. Elles n’étaient pas destinées spécifiquement à rechercher une différence selon le poids. D’autres études sont nécessaires pour établir ou infirmer clairement ce lien. C’est toutefois plausible, sachant que certains contraceptifs hormonaux sont aussi moins efficients chez les femmes obèses, sans qu’on sache encore exactement pourquoi. D’ailleurs, administrer une double dose de pilules du lendemain n’en augmente pas l’efficacité contraceptive chez les femmes obèses.»

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Agence européenne des médicaments (AEM) mènent actuellement des études sur la question. En attendant leurs résultats, la Commission européenne a exigé fin 2013 que le risque pour les femmes en surpoids soit indiqué dans les notices d’emballage des contraceptifs d’urgence. Le Canada en a fait de même fin mars dernier.

La Suisse attend

En Suisse, l’information sur la potentielle inefficacité des pilules du lendemain pour les femmes obèses n’a guère été relatée au grand public, ni d’ailleurs spécialement auprès des professionnels concernés, comme le constate la Dresse Dorothea Wunder. Et les autorités n’ont pas instauré l’obligation d’une mention sur les notices d’emballage. Chez Swissmedic (Institut suisse des produits thérapeutiques), on explique que les évidences scientifiques en la matière sont encore insuffisantes et qu’on y suit les discussions et recherches pour l’instant.

Fin juin, dans le Compendium suisse des médicaments, l’inefficacité potentielle pour les femmes en surpoids était ainsi mentionnée sur la notice de lellaOne®, mais pas sur celle de la NorLevo®, pourtant la plus utilisée (100000 boîtes vendues en 2013).

L’option, le stérilet au cuivre

Dès lors, aux vues des connaissances actuelles, de quelle option contraceptive d’urgence disposent les femmes en surpoids? «Dès 75-80 kg, je leur proposerais la troisième solution à disposition, le dispositif intra-utérin au cuivre (DIU), la méthode la plus sûre, répond la Drsse Wunder. Ce stérilet exempt d’hormones peut convenir également aux femmes n’ayant pas encore eu d’enfant et aux jeunes filles dès 16 ans. A condition qu’elles soient capables de discernement et que la taille de leur utérus soit suffisante. Le DIU peut de plus servir de contraception pendant trois à cinq ans, avec l’avantage qu’on ne risque pas de l’oublier (lire encadré ci-dessous)

Si la femme ou la jeune fille en surpoids ne peut utiliser le DIU, il ne reste que le recours aux deux contraceptifs d’urgence oraux. «Ils ont malgré tout une certaine efficacité, même si elle diminue avec le poids. C’est mieux que rien, note la spécialiste. Pour les moins de 18 ans, la NorLevo® est la seule méthode officiellement autorisée. Mais selon les cas, le médecin peut également discuter avec sa jeune patiente d’une éventuelle prescription off-label (lire ci-dessous) de l’ellaOne®

La prescription off-label

Il n’est pas rare que les médecins, dans le cadre de leur liberté thérapeutique, prescrivent des médicaments en dehors de l’indication reconnue. C’est ce que l’on appelle la prescription off-label. Le médecin doit alors informer le patient des risques imprévus possibles et du fait que le remboursement du médicament par les assurances maladie obligatoires n’est pas garanti.

Protection contre les IST

La Dresse Wunder rappelle encore qu’aucun des trois contraceptifs d’urgence ne protège contre les infections sexuellement transmissibles (IST). En cas de rapport sexuel non protégé il faut donc estimer également si l’on a pris des risques d’infection et consulter un spécialiste le cas échéant. Par exemple, dans un centre de planning familial qui propose des consultations gratuites et confidentielles et qui peut conseiller également de la meilleure façon de prévenir un nouvel échec contraceptif.

Contraception d’urgence: les trois méthodes

Depuis le début 2014, trois moyens de contraception d’urgence sont à disposition en Suisse. A rappeler que, dans tous les cas, plus vite on y a recours, plus le risque de grossesse diminue.

NorLevo® (1,5 mg)

Ce comprimé à base de lévonorgestrel est le plus utilisé et éprouvé en Suisse. Il retarde ou inhibe la maturation de l’ovule, selon le moment du cycle mensuel dans lequel se trouve la femme. Par contre, cette pilule n’est plus efficace dès que la sécrétion de l’hormone qui induit l’ovulation commence. Elle doit être prise dès que possible, et au plus tard 72 heures (3 jours) après le rapport sexuel. Son efficacité est maximale dans les 24 heures (taux de grossesse de 1,5% seulement) et décroît rapidement ensuite (2,6% de taux de grossesses dans les 48 à 72 heures). Les mères qui allaitent peuvent aussi y avoir recours, tout comme les filles de moins de 16 ans, à condition d’être capables de discernement.

Conditions d’utilisation: en vente libre, ce médicament peut être obtenu en pharmacie, après avoir répondu à un questionnaire standardisé pour évaluer le moyen de contraception d’urgence adapté, ou auprès de son médecin de famille ou gynécologue, ou dans les consultations de santé sexuelle des plannings familiaux.

ellaOne® (30 mg)

Son principe actif, l’acétate d’ulipristal (UPA), retarde ou inhibe la maturation de l’ovule et retarde l’ovulation de 5 jours. Le comprimé doit être pris au plus tard 120 heures après le rapport sexuel. ellaOne® n’est toutefois pas recommandée aux moins de 18 ans (sauf prescription off-label), car ses effets n’ont pas encore été étudiés sur un nombre suffisant de jeunes filles. De même, ses effets sur l’allaitement n’ont pas encore été étudiés. Les mères peuvent toutefois l’utiliser, mais doivent arrêter d’allaiter pendant 5 jours après la prise de la substance.Conditions d’utilisation: l’ellaOne® est soumise à ordonnance médicale, et nécessite donc une consultation d’urgence chez son gynécologue, dans un service d’urgences de gynécologie ou dans un centre en santé sexuelle et planning familial médicalisé.

Aucun de ces deux contraceptifs d’urgence n’est efficace pour d’éventuels nouveaux rapports sexuels non protégés.

Le dispositif intra-utérin au cuivre (DIU)

Le cuivre diffusé dans l’utérus empêche la mobilité des spermatozoïdes, leur viabilité et leur capacité à féconder l’ovule et le développement folliculaire. Le stérilet peut être posé dans les 5 jours après le rapport non protégé. Exempt d’hormones, le DIU peut être posé aussi chez de jeunes filles dès 16 ans. A condition qu’elles soient capables de discernement et que leur utérus soit suffisamment grand. C’est le contraceptif d’urgence le plus sûr des trois, avec un taux de grossesse de moins de 1%. On peut le garder comme contraceptif pendant cinq ans.

Conditions d’utilisation: le DIU nécessite une consultation médicale d’urgence, et doit être mis en place par un médecin.

Cycle à surveiller

Aucune contraception d’urgence n’étant infaillible à 100%, il faut surveiller son cycle après l’utilisation d’une des trois méthodes, et effectuer un test de grossesse en cas de retard des règles de plus de sept jours. Les femmes ayant des règles irrégulières peuvent le faire trois semaines après le rapport sexuel non protégé. Si les règles sont inhabituelles (moins abondantes, de plus longue durée ou accompagnées de douleurs inhabituelles) il faut rapidement consulter un médecin.

Pour en savoir plus

Prise de position sur la contraception d’urgence en Suisse du Groupe interdisciplinaire d’expertes en contraception d’urgence (IENK) et de la Commission contraception de la Société suisse de médecine de la reproduction (SSMR).

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