Quelques bulles de champagne au long cours peuvent rafraîchir les mémoires

Dernière mise à jour 11/06/13 | Article
Quelques bulles de champagne au long cours peuvent rafraîchir les mémoires
Des chercheurs anglais apportent une nouvelle démonstration des bienfaits de l’effervescence champenoise. Selon eux elle prévient les premiers troubles neurologiques du vieillissement. La démonstration vient d’être faite chez la souris. Il reste à trouver des volontaires humains.

Faire boire (avec modération) du champagne à des souris peut réserver bien des surprises. Un groupe de chercheurs de l’Université de Reading en a fait l’expérience1. Pourquoi un tel travail? Pour approfondir les connaissances sur les vertus pour la santé de certains des composés naturellement présents dans les vins, à commencer par les polyphénols. Ces polyphénols sont aujourd’hui à la mode: ils prennent notamment une importance croissante en tant qu’additifs dans l’industrie agroalimentaire et cosmétique. On postule en effet que du fait de leurs propriétés anti-oxydantes ils peuvent être utilisés dans la prévention de certaines affections cancéreuses inflammatoires cardiovasculaires ou neurodégénératives. C’est ce dernier point qui intéressait l’équipe du Pr Jeremy Spencer (Department of Food and Nutritional Sciences, University of Reading).

Hippocampe et cortex cérébral

Ces chercheurs ont voulu vérifier ce qu’il pouvait réellement en être des phénols présents dans le vin de Champagne en termes d’amélioration de la mémoire spatiale, cette mémoire responsable de l'enregistrement et de l’exploitation des informations concernant l’environnement. Des recherches fondamentales ont montré que les phénols, en jouant sur les niveaux d’un certain nombre de protéines, peuvent assurer une modulation des signaux dans l'hippocampe et le cortex cérébral; signaux qui régulent la mémoire et l'apprentissage. Or, on sait par ailleurs que les niveaux de ces protéines diminuent avec l’âge, ce qui conduit pour partie au déclin cognitif et à la réduction progressive de l’autonomie spatio-temporelle des personnes âgées.

On peut dès lors supposer que les phénols des raisins, retrouvés dans les vins, ralentissent ce phénomène d’appauvrissement et peuvent contribuer à prévenir les pertes cognitives. Mais pourquoi le champagne alors que les phénols sont surtout présents dans les vins rouges? C’est que, si le champagne manque de flavonoïdes (composés présents dans les vins rouges), il est plus riche en composés phénoliques que les vins blancs traditionnels. Du moins est-ce la raison avancée par les auteurs du travail, malheureusement sans plus de précision2.

1,78 ml de champagne/kg de poids corporel

Pour l’heure les principales expériences menées à l’Université de Reading qui ont été publiées portent sur la souris. Ces premiers résultats ont été obtenus sur des souris âgées qui ont reçu une «supplémentation» en champagne. Supplémentation à hauteur de 1,78 ml/kg de poids corporel, avec un titre alcoolique de 12,5% de volume. L’expérience a duré pas moins de six semaines et a permis d’observer une amélioration des capacités mnésiques de travail spatial. Les chercheurs ont constaté en parallèle une expression différente d'un certain nombre de protéines de l’hippocampe et du cortex, déjà connues pour leur implication directe dans les processus moléculaires de ces capacités.

Pour les auteurs, ces résultats passionnants constituent la première démonstration qu’une consommation modérée de champagne est de nature à jouer (de manière positive) sur les mécanismes cognitifs, la mémoire tout particulièrement. Ces observations avaient déjà été rapportées avec des vins rouges, mais via les flavonoïdes qu'ils contiennent.

Conflits d’intérêt

«Notre recherche montre que le champagne, qui manque de flavonoïdes, est également capable d'influencer le fonctionnement du cerveau et ce par l’intermédiaire de composés phénoliques plus petits, qui étaient auparavant considérés dépourvus d'activité biologique, souligne le Pr Spencer. Nous encourageons une approche responsable de la consommation d'alcool, et nos résultats suggèrent qu'une très faible consommation d’un à deux verres par semaine peut être suffisante pour être efficace.»

Pour le Dr David Vauzour, coauteur de ce travail, le moment est venu de lancer une expérience visant à confirmer ces résultats chez l’homme. Des recherches antérieures de l'Université de Reading avaient déjà permis d’établir que deux verres (coupes ou flûtes) de champagne par jour étaient de nature à réduire les risques de maladies cardiovasculaires et d'accidents vasculaires cérébraux. On espère que la valeur pouvant être accordée à ces travaux ne sera pas entachée par on ne sait quels conflits d’intérêts.

1. Publié dans la revue Antioxidants and Redox Signalling.On trouvera ici un résumé (en anglais) de leur travail, et ici (toujours en anglais) le communiqué de presse publié à cette occasion par leur Université.

2. Le Pr Jeremy Spencer, spécialiste de sciences de la nutrition et auteur principal de l’étude, évoque les caractéristiques particulières du vin de Champagne qui tiendraient aux deux cépages à partir desquels il est élaboré. Or, la vérité est plus complexe, le nombre de cépage pouvant, comme on le sait, être plus important.