Comment le corps lutte contre la canicule

Dernière mise à jour 10/08/23 | Article
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Les vagues de chaleur qui se suivent et se ressemblent été après été mettent nos organismes à rude épreuve. Ils tentent d’y faire face, mais cela n’est pas sans conséquences pour la santé.

Conseils pour passer l’été sans encombre

Depuis 2003, les cantons ont mis sur pied des plans canicules qui visent les personnes vulnérables. Cette démarche a permis de diminuer le nombre de décès saisonniers. Pour rappel, en 2003, il y a eu environ 70’000 morts en Europe dans seize pays en raison de la canicule. Les chiffres de 2022 sont légèrement moins élevés, avec 60’000 morts dans 35 pays. Voici quelques conseils pour éviter le pire :

  • Fuir la chaleur autant que possible en restant chez soi entre 11h et 16h. Si l’isolement vous pèse, optez plutôt pour une sortie en forêt ou dans un centre commercial climatisé plutôt qu’une marche en ville.
  • Boire et manger en suffisance. Veiller à avoir un bon apport en eau et en minéraux est important.
  • Les nausées, maux de tête, étourdissements et pertes de connaissance sont à prendre au sérieux. Une consultation aux urgences peut s’avérer nécessaire.
  • Veiller à proposer de l’eau régulièrement aux jeunes enfants, aux seniors et aux personnes atteintes dans leur santé.
  • Adapter les activités aux températures. Les personnes qui travaillent en extérieur devraient pouvoir aménager leurs horaires pour ne pas être sous un soleil de plomb pendant de longues heures. Quant aux sportifs, courir sur du béton à 13h est évidemment à proscrire. Les activités physiques devraient se faire tôt le matin ou à la tombée de la nuit.

Contrairement au lézard qui doit se mettre au soleil ou dans une zone fraîche pour réguler sa température, le corps humain (et celui de l’ensemble des mammifères) fait sa propre thermorégulation. « Notre métabolisme est l’ensemble des réactions chimiques qui permettent à l’être humain de fonctionner. Que ce soit pour penser, bouger, pleurer : tout ce qui se passe dans le corps est lié à une ou l’autre de ces réactions. Pour qu’elles se fassent de manière optimale, l’organisme doit garder une température entre 36 et 37 °C. Pour cela, lorsqu’il fait particulièrement chaud par exemple, les vaisseaux se dilatent pour dégager la chaleur. La transpiration augmente également », explique le Pr François Herrmann, médecin et directeur académique du Département de réadaptation et gériatrie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).

Profils à risque

Tout irait pour le mieux si nous avions toutes et tous la possibilité d’évacuer idéalement le trop-plein de chaleur. Malheureusement, les personnes âgées ne s’adaptent pas aussi bien que les plus jeunes. « Avec le vieillissement, la souplesse des vaisseaux sanguins diminue et le corps a aussi moins de glandes sudoripares. Par ailleurs, les seniors ont souvent un peu plus de gras corporel que de muscles, ce qui favorise le stockage de la chaleur », poursuit l’expert. 

Il ne faut pas oublier qu’en transpirant davantage, le corps perd de l’eau salée et – lorsque tout va pour le mieux – la sensation de soif se manifeste assez vite. Ce qui n’est pas vrai pour les personnes âgées qui ne ressentent souvent pas la soif. Quant aux enfants de moins d’1 an, ils n’ont pas la capacité de se réhydrater seuls, ni d’exprimer leurs besoins (dont la soif), sauf en pleurant… 

Boire beaucoup d’eau, la solution ?

« Il ne suffit pas de boire beaucoup d’eau pour éviter les coups de chaleur. Quand on transpire, on perd aussi beaucoup d’électrolytes (composants chimiques permettant de véhiculer de l’énergie électrique indispensables à plusieurs fonctions de l’organisme, ndlr). L’équilibre en minéraux est alors perturbé et cela s’accentue davantage si l’on a peu mangé ou si on a des problèmes digestifs (diarrhée, vomissements). Manger suffisamment salé ou boire des boissons isotoniques, comme celles pour sportifs, permet d’éviter de souffrir d’hyponatrémie, à savoir une concentration en sel dans le sang trop faible qui peut être grave et entraîner un œdème cérébral en cas de prise de sel compensatoire trop rapide », explique le Pr Herrmann. La perturbation de l’équilibre électrolytique a aussi des conséquences sur la tension artérielle : vertiges et évanouissement sont possibles.

Cœur, reins et cerveau à rude épreuve

Lorsqu’il fait trop chaud, l’organisme est soumis à un stress. Le cœur bat plus vite, alors que les vaisseaux sanguins évacuent moins bien le sang. Il y a donc un risque de coagulation. Par ailleurs, la transpiration excessive a pour conséquence que l’on urine moins, ce qui peut provoquer des infections urinaires. Les reins sont également mis à rude épreuve. Ils éliminent moins bien les médicaments, un effet toxique est à redouter. Le manque de sel et d’électrolytes perturbe également leur fonctionnement et peut les endommager. « Dans les pays d’Asie du Sud-Est ou d’Afrique, les insuffisances rénales chroniques sont nombreuses pour cette raison. Sous nos latitudes, pour le moment, certaines personnes sont plutôt sujettes à des épisodes isolés, mais cela pourrait changer dans les années à venir avec la multiplication des épisodes caniculaires », explique Gaël Brulé, professeur en santé environnementale à la Haute école de santé de Genève. 

Tous ces changements auxquels le corps tente de remédier surchargent le cerveau. « La population a tendance à être plus irritable lorsqu’il fait trop chaud. Aux États-Unis, une étude a montré que pendant cette période, la consommation de substances augmentait. Les gens cherchent un moyen de mieux supporter ces épisodes », poursuit Gaël Brulé. Et le Pr François Herrmann, médecin et directeur académique du Département de réadaptation et gériatrie des HUG, de préciser : « Le cerveau, le cœur et les reins sont des organes qui ne sont alimentés en sang que par une seule voie. Lorsque celle-ci ne fonctionne pas correctement, les tissus de ces trois organes risquent de se nécroser. Le risque d’accident vasculaire cérébral et de thrombose augmente. »