Enfin une loi pour encadrer la vente des vapoteuses et des produits du tabac

Dernière mise à jour 18/11/21 | Article
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La nouvelle loi sur les produits du tabac a été adoptée par le Parlement en octobre dernier. Fini le flou juridique qui entourait les différents produits apparentés aux cigarettes. Les milieux médicaux sont toutefois déçus.

Les cigarettes électroniques (ou vapoteuses) ainsi que les produits de tabac chauffés et tous les autres dérivés du tabac ne seront bientôt plus considérés comme des denrées alimentaires, à l’instar des biscuits au chocolat ou des pâtes. Le Parlement a enfin adopté (en octobre dernier) la loi sur les produits du tabac et les cigarettes électroniques (LPTab). Un pas décisif qui survient après plus de six ans de tergiversations entre le premier projet et ce deuxième. La mise en application n’est toutefois pas prévue avant le milieu de l’année 2023. «C’est la première loi fédérale en matière de produits du tabac et assimilés, précise Jean-Paul Humair, directeur du Cipret (centre d’information et prévention du tabagisme) à Genève. Des lois existent toutefois déjà dans certains cantons. Tous ces produits (cigarettes, tabac chauffé, vapoteuses, snus) vont enfin sortir de la catégorie des denrées alimentaires et être traités spécifiquement.»

En chiffres*

27% de la population suisse fume.

9500 personnes meurent chaque année en Suisse de la consommation de tabac.

68 stimuli pro-tabac sont perçus par un jeune entre 18 et 24 ans les jours de week-end, dont 44 issus du marketing.

4 milliards: les coûts liés au tabagisme chaque année en Suisse, dont 3 imputables aux frais médicaux et 1 à la perte de productivité.

*Sources: OFPS, Observatoire des stratégies marketing pour les produits du tabac.

Parmi les nouveautés que la LPTab prévoit, il y a l’interdiction de vente aux mineurs et l’introduction de normes de qualité pour les cigarettes électroniques. Les milieux de la prévention ne sont toutefois pas satisfaits et c’est un euphémisme… «La loi adoptée n’est pas du tout satisfaisante d’un point de vue de santé publique, déplore le Pr Jacques Cornuz, directeur d’Unisanté (Centre universitaire de médecine générale et santé publique) à Lausanne. Avec la LPTab, l’industrie du tabac a clairement gagné la partie. L’interdiction de vente aux mineurs n’aura qu’un impact marginal, tant il est facile de se procurer des cigarettes par d’autres voies (amis plus âgés, etc.).» Un avis partagé par Markus Meury, porte-parole d’Addiction Suisse: «Le simple fait de remonter l’âge légal pour la vente de produits du tabac ne change quasiment rien au quota de fumeurs parmi les jeunes, parce qu’ils parviennent toujours à s’en procurer. Il est plus décisif de baisser la demande et celle-ci est notamment générée par la publicité.»

Luc Lebon, responsable de l’Unité prévention du tabagisme à Unisanté, explique: «Cette nouvelle loi présente de grosses lacunes du côté de la publicité. Elle introduit certes une interdiction dans l’espace public, les cinémas et les manifestations sportives; mais elle ne s’attaque pas du tout aux principaux canaux ciblant les jeunes: internet, les réseaux sociaux, les festivals, les points de vente, les communications proposant des rabais, etc. Alors qu’il est établi que le plus efficace est une interdiction complète de publicité, déjà en vigueur dans une soixantaine de pays.»

Autre lacune de la LPTab: la taxation. Alors que le prix d’un paquet de cigarettes inclus 54% de taxes, celui des dispositifs de tabac chauffé n’en compte que 12% et rien pour les vapoteuses. Cette année, le Parlement a toutefois accepté une motion pour introduire une taxe sur ces dernières. Jacques Cornuz est catégorique: «Après la publicité, il faut s’attaquer à la taxation. Les cigarettes présentent une rentabilité supérieure à beaucoup d’autres produits. Pour réduire l’attractivité du tabac, il faut moins le valoriser, moins le promouvoir : il sera alors moins demandé!»

La nouvelle loi est donc un premier pas timide vers un meilleur encadrement fédéral des produits associés aux cigarettes, mais ce n’est pas la panacée. «La Suisse reste un des seuls pays dans le monde qui n’arrive toujours pas à ratifier la convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, vu que nos mesures ne suffisent pas à faire reculer le quota de fumeurs», conclut Markus Meury.

La nouvelle loi en détail

Vapoteuses (cigarettes électroniques)

La vente aux mineurs sera interdite, l’utilisation dans les lieux publics fermés également. Aucune publicité ne sera possible. La concentration de nicotine maximale sera fixée à 20 mg/ml de liquide et des avertissements quant au potentiel addictif du produit seront présents sur les paquets.

Pour rappel, les cigarettes électroniques contiennent de la nicotine mais pas de tabac. L’enquête Delphi, réalisée par Unisanté à Lausanne et l’Hôpital de la Salpêtrière à Paris, a recueilli l’avis d’experts de quinze pays différents entre 2018 et 2020. Ils recommandent que la cigarette électronique soit réglementée différemment des produits du tabac. Meilleur étiquetage, taux maximal de nicotine imposé et avertissement quant à leur potentiel addictif sont préconisés. «Concernant la réglementation du vapotage, cette LPTab me satisfait. Il sera bien encadré, explique le Pr Jacques Cornuz, directeur d’Unisanté. Il faut rappeler que les cigarettes électroniques se sont montrées efficaces pour aider les fumeurs à arrêter le tabac.»

Produits du tabac chauffé

En chauffant le tabac, ce type de cigarettes produisent moins de fumée, mais elles dégagent du monoxyde de carbone et plusieurs produits hautement cancérigènes. La LPTab prévoit de renforcer l’avertissement présent sur le paquet: de «peut nuire à votre santé et créer une dépendance», il passera à «nuit à votre santé et crée une forte dépendance». Vente aux mineurs et utilisation dans les lieux publics fermés seront interdites. Pour les milieux de la prévention, cigarettes et produits de tabac chauffé devraient être réglementés et taxés exactement de la même manière, ce qui ne sera pas le cas avec la LPTab.

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Paru dans Le Matin Dimanche le 14/11/2021

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