Erections chancelantes: vers le bout du tunnel

Dernière mise à jour 09/10/12 | Article
Erections chancelantes: vers le bout du tunnel
Les érections masculines passionnent les biologistes. Ils enquêtent en coulisses pour mieux comprendre les ressorts de ce phénomène qui ne manque pas de surprendre; un phénomène moins «réflexe» qu’on pourrait naïvement le penser. Un phénomène qui fait couler beaucoup d’encre.

Ecrire sur l’érection fait-il à tous coups un succès d’édition? On pourrait le penser tant les titres se bousculent sur les chastes étals des librairies. Dernier exemple en date, le tome 2 de La mécanique sexuelle des hommes que le Dr Catherine Solano et le Pr Pascal de Sutter signent chez Robert Laffont (collection Réponses); et pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté et un nombre conséquent d’acheteur(e)s, on a installé un bandeau rouge sur la couverture blanche: Petit traité du savoir bander sans peur en sans reproche. Sans peur, passe encore, mais pourquoi sans reproche?

C’est là un ouvrage que l’on peut mettre entre toutes les mains et qui commence par une platitude: «L’érection, pour un homme, c’est très important». Avant de poursuivre par: «Plus qu’on ne l’imagine». Mais qui ici imaginait quoi? La fin de cette petite bible ne manque pas non plus de sel. Les deux auteurs évoquent une primatologue observant des singes mâles et constatant qu’ils obtenaient parfois des érections, sans aucune stimulation sexuelle, simplement parce que «ils étaient contents et semblaient heureux de vivre». Cette femme de science eut alors ce mot: «Ils bandent de joie». «C’est tout ce que nous souhaitons aux hommes de tous âge: peut-être pas bander de joie, mais certainement bander dans la joie», concluent les deux auteurs. «Profiter de l’érection autant qu’ils le peuvent et, si elle fait défaut, y renoncer avec sérénité pour continuer à vivre dans l’amour et la sensualité».

Faute de temps, cet ouvrage ne mentionne pas la toute récente découverte d’une équipe de chercheurs de différentes institutions américaines publiée dans l’édition du 25 septembre des Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS). Cette découverte fait suite à deux nouvelles informations récemment rapportées sur planetesante.ch sur les possibles causes de la dysfonction érectile. La preuve s’il en était encore besoin que les érections masculines passionnent les biologistes. Ils enquêtent en coulisses pour mieux comprendre les ressorts de ce phénomène qui ne manque pas de surprendre; un phénomène moins «réflexe» qu’on pourrait naïvement le penser. Et des enquêtes qui laissent penser aujourd’hui que l’on est sur le point d’avoir décrypté la totalité de la chaîne des événements biochimiques impliqués dans le processus de l’érection. Avec une molécule en ligne de mire: l’oxyde nitrique, un neurotransmetteur également dénommé monoxyde d’azote.

La chaîne des événements menant à l’érection décryptée

Outre-Atlantique, le travail a été mené chez des rongeurs. Mais que l’on se rassure: la biologie fondamentale de l'érection chez le rongeur ressemble trait pour trait à celle de l'homme: après la libération initiale d’oxyde nitrique, un processus biochimique (dit de «phosphorylation») permet de poursuivre sa libération et de maintenir l'érection autant qu’il est nécessaire (ou autant que faire se peut).

«Nous savions que la libération d’oxyde nitrique chimique, un neurotransmetteur produit dans le tissu nerveux, déclenche une érection en relâchant les muscles qui permettent au sang de remplir le pénis. Nous pensions que ce n'était que le stimulus de départ. Nous avons donc cherché à comprendre le processus qui permet de maintenir l'érection», explique le Dr Arthur J. Burnett, professeur d'urologie (The Johns Hopkins University School of Medicine, Baltimore), principal auteur de l’étude. Le Dr Burnett et ses collègues ont constaté une rétroaction sur la souris dans les complexes nerveux du pénis qui déclenche des vagues d'oxyde nitrique qui maintiennent le pénis en érection. Les influx nerveux venant du cerveau et la stimulation physique sont soutenus par une cascade de substances chimiques générées lors de l'érection après la libération initiale d’oxyde nitrique.

Il y a là, comme on le voit, une sorte de suite dans les idées. Et ce d’autant que ce travail prolonge celui – célèbre dans le milieu scientifique spécialisée – paru dans Science, il y a vingt ans déjà. Il était signé des Drs Burnett et Salomon S. Snyder, professeur de neurosciences à la Johns Hopkins (qui cosigne également cette étude de 2012). Ils avaient identifié pour la première fois le rôle clé de l’oxyde nitrique produit dans le tissu pénien et sa responsabilité dans le déclenchement du processus érectile. «Aujourd'hui, vingt ans plus tard, nous constatons que l'oxyde nitrique n'est pas seulement un déclencheur, mais l’initiateur de tout un processus cyclique qui continue à produire des ondes de neurotransmetteur dans le complexe nerveux du pénis», dit Burnett.

Et maintenant, quels traitements?

Le bout du tunnel? Avec cette compréhension biologique de base, il pourrait être possible, selon les auteurs, de développer de nouvelles approches médicales pour aider les hommes ayant des problèmes d'érection provoqués par des facteurs tels que le diabète, les maladies vasculaires ou des lésions nerveuses liées à des interventions chirurgicales. De nouvelles approches thérapeutiques sont désormais envisageables: elles pourraient intervenir plus tôt dans le processus de l'excitation que les médicaments actuellement disponibles pour traiter la dysfonction érectile. La cible de nouvelles thérapies serait la protéine kinase A (PKA) produite par la phosphorylation de l’oxyde nitrique. Question: faudra-t-il encore vingt ans pour passer à la nouvelle étape?

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