L’hypernatrémie, ce dangereux trouble lié au manque d’eau

Dernière mise à jour 20/12/11 | Article
Sol désseché
Les personnes âgées et les nourrissons, qui n’ont plus soif ou qui ont un accès limité à l’eau, sont particulièrement concernés par ce trouble rare. Prévenir, en buvant, est essentiel car la prise en charge médicale peut être compliquée.

Les personnes âgées, qui perdent régulièrement la sensation de soif avec les années, ne boivent souvent pas assez d’eau, ce qui peut être très dangereux pour la santé. Elles risquent en effet de développer une hypernatrémie. En d’autres termes, elles pourraient avoir trop de sodium dans le sang. La natrémie normale, la quantité de sodium dans le sang, est comprise entre 135 et 145 millimoles par litre (mmol/l). Au-dessus de 145, la personne est dite hypernatrémique. Les conséquences sont fâcheuses: les patients hypernatrémiques risquent de mourir. Selon certaines études, l’hypernatrémie aiguë, supérieure à 160 mmol/l, est mortelle dans 60% des cas.

Les personnes âgées ne sont pas les seules concernées. L’hypernatrémie est également fréquente chez les nourrissons. Jusqu’à 1,9% des nouveau-nés en développent en effet une, souvent en cas de difficulté de l’allaitement. Pour le reste de la population, ce déséquilibre est peu fréquent: au moment de l’admission à l’hôpital, l’hypernatrémie est présente chez 0,2-0,5% des patients.

Pas seulement la soif

La soif, ainsi que la capacité des reins à concentrer les urines protègent en principe les gens de l’hypernatrémie. Dès lors, cette dernière ne peut pas se développer si le sujet a accès à l’eau. Si les nourrissons, les personnes âgées mais aussi certains patients psychiatriques sont particulièrement vulnérables, c’est souvent parce qu’ils sont incapables de satisfaire eux-mêmes leur soif. Chez la personne âgée, en plus de la diminution de la sensation de soif, plusieurs mécanismes concomitants, dont un accès limité à l’eau (difficultés motrices, démence, etc.), un pouvoir de concentration urinaire diminué et un manque de vigilance, sont susceptibles d’aggraver le risque.

D’autres facteurs, liés au manque d’eau, peuvent causer une hypernatrémie. L’âge avancé, la chirurgie, un état fébrile, une infirmité, le diabète sucré voire la septicémie, une insuffisance rénale ont également été mis en cause. Les patients hospitalisés qui dépendent totalement d’une aide externe pour les apports en eau sont également à risque. Des brûlures, des problèmes digestifs ou rénaux peuvent être responsables d’une perte d’eau libre. Ces pertes peuvent être importantes en cas de brûlures étendues ou de diarrhées, voire extrêmes - jusqu’à vingt litres par jour - lors de certaines formes de diabète. Ce n’est que lorsque ces pertes sont insuffisamment compensées qu’elles conduisent à l’hypernatrémie.

Traitement risqué

Le symptôme principal de ce trouble est la soif (sauf chez certaines personnes âgées) et la faiblesse musculaire. Agitation, maux de tête, désorientation, troubles de l’état de conscience et convulsions sont également susceptibles d’indiquer une hypernatrémie. Une fois le diagnostic confirmé, le médecin doit explorer les éventuelles sources de la perte d’eau et faire boire le patient.

Le traitement varie selon le degré de l’hypernatrémie et la compensation nécessaire du déficit en eau se fait en fonction de la perte de poids. Si le poids antérieur n’est pas connu, des formules permettent d’estimer ce déficit. Mais elles sont imprécises, elles qui partent du principe que le volume d’eau corporel constitue en moyenne 60% du poids chez l’homme, 50% chez la femme. La correction de la natrémie doit donc être réévaluée régulièrement, au moins toutes les trois heures. En général, elle doit être lente, surtout si le trouble est chronique. Il est recommandé de ne pas dépasser 10 mmol par jour, soit 0,5 mmol/l par heure. Une correction trop rapide comporte en effet le risque d’œdème cérébral, voire de convulsions. Les séquelles neurologiques peuvent être irréversibles.

L’importance de la prévention

L’hypernatrémie, certes relativement peu fréquente, n’en comporte pas moins des risques mortels, alors que la prise en charge médicale est compliquée. Dès lors, tous les efforts doivent être dirigés vers la prévention. L’entourage doit prêter une attention particulière aux aînés et aux personnes handicapées et leur garantir un accès facilité à l’eau tout au long de la journée. Il est important de donner à boire régulièrement aux personnes très âgées, même en absence de soif, en particulier lors de grosses chaleurs. La prescription de tout médicament pouvant affecter le bilan en eau du patient nécessite une surveillance étroite. La prise de diurétiques peut par exemple être interrompue pendant l’été. Le développement d’outils visant à mieux calculer et prédire les pertes d’eau pourrait également aider à la prise en charge hospitalière des patients comme à la prévention.

Références

Adapté de «Hypernatrémie: une question d’eau», Drs Lorenzo Berwert, Bruno Vogt, Pr Michel Burnier, service de néphrologie et consultation d’hypertension, département de médecine interne, CHUV, in Revue médicale suisse 2010; 6: 444-7, en collaboration avec les auteurs.

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