Fatigue
La fatigue est le baromètre de notre santé. Elle présuppose de la force. En fin de vie, elle n’apparaît plus. Nos derniers jours, nos dernières heures sont semblables à une bougie qui s’éteint. Quoi qu’on fasse pour qu’elle brûle, elle se consume plus ou moins vite. La fatigue, c’est de l’énergie congelée. Plus la réserve d’énergie est grande, plus la sensation de fatigue est intense. Avoir l’impression de mourir de fatigue est un signe de santé. Michel-Ange, prodige d’énergie s’il en est, a subi dans sa vie plusieurs épisodes d’épuisement si prononcé qu’il ne parvenait plus à tenir une plume dans sa main tant sa fatigue était paralysante. Chaque soir il était terrifié à l’idée de mourir de fatigue et d’être damné. II a si bien récupéré à chaque fois qu’il est mort à 89 ans, âge exceptionnel pour l’époque, et le jour de sa mort il s’est promené à cheval.
On ne meurt jamais de fatigue. Cela est impossible. C’est un signal sain qu’il importe d’intégrer, de respecter comme la prunelle de ses yeux voire plus, car on peut rester indépendant et vivre sans voir mais non sans régénérer son énergie. C’est la fatigue acceptée qui nous permet de retrouver des élans, si on la laisse sortir et qu’on évacue les émotions pénibles qui nous encombrent. Il est important de ne pas lutter contre sa fatigue mais au contraire de l’aimer. Apprendre à aimer sa fatigue n’est pas facile, car moins on lutte contre elle, plus elle augmente. On est étonné, époustouflé par le poids énorme qui nous empêche d’agir, nous submerge nous terrasse et cela durablement. Pour aller au bout de sa fatigue et ne pas tomber ou retomber dans le piège culturel de la stimulation artificielle, on a besoin d’être informé, soutenu, encouragé. Lutter contre sa fatigue, c’est vivre plus mal qu’un animal. C’est devenir esclave, semblable à un galérien fouetté pour faire avancer la galère, qui reçoit des coups, même au repos lorsqu’il n’est pas obligé de ramer. C’est l’enfer de la destruction.
Dans l’immense majorité des cas, la fatigue est d’origine émotionnelle. Toutes les émotions, même celles qui sont agréables, positives, stimulantes épuisent et nécessitent une période de récupération. Rien n’est plus éprouvant qu’un état passionnel. Même quand il existe une cause organique, sous-jacente, une maladie somatique, la composante émotionnelle est présente, souvent importante, voir prévalente. Il est capital d’en tenir compte pour favoriser la guérison et, en cas de malades graves, retrouver des élans.
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