Agresseurs sexuels: un traitement est-il possible?

Dernière mise à jour 28/07/14 | Article
Agresseurs sexuels: un traitement est-il possible?
Le sujet des agressions sexuelles est une préoccupation majeure de santé publique au vu des conséquences qu’elles ont sur les victimes, de leurs répercussions juridiques ainsi que de l’incompréhension qu’elles suscitent dans l’opinion publique.

Le code pénal suisse définit les agressions sexuelles comme des infractions contre l’intégrité sexuelle. Il distingue plusieurs types d’agressions:

  • Violences sexuelles avec pénétration ou tentative de pénétration (ex: le viol).
  • Violences sexuelles avec contact corporel (ex: attouchements).
  • Violences sexuelles sans contact corporel (ex: exhibitionnisme, voyeurisme).

Il condamne également les actes sexuels commis sur des personnes dont le consentement n’est pas valable (les enfants par exemple) ainsi que l’inceste, considéré comme un crime ou un délit contre la famille.

Quelques chiffres

Il est très difficile d’évaluer le nombre d’agressions sexuelles commises. Les chiffres connus sont probablement sous-estimés en raison des difficultés à détecter ces agressions et du grand nombre de victimes qui ne dénoncent pas leurs agresseurs. Une étude menée dans une vingtaine de pays, dont la Suisse, a montré que 7-36% des femmes et 3-16% des hommes auraient subi des abus sexuels durant leur enfance. Parmi les agresseurs sexuels, 95% sont des hommes et 30% seraient des adolescents.

Maladies psychiatriques souvent associées

Chez les agresseurs sexuels, on observe souvent des troubles psychiatriques telles que des paraphilies ou une psychopathie (trouble de la personnalité).

Des paraphilies, ou troubles de la préférence sexuelle, sont ainsi fréquemment retrouvées chez ces agresseurs, surtout chez les abuseurs d’enfants. Mais toutes les paraphilies ne comportent pas des agissements condamnables. Par exemple, la pédophilie (préférence sexuelle pour des enfants pré-pubères) et l’exhibitionnisme (exposer ses parties génitales ou agir sexuellement en public), si agis, sont condamnables, tandis que le transvestisme (attirance dans le port de vêtements du sexe opposé), qui fait également partie de ces troubles, ne l’est pas.

La psychopathie est quant à elle souvent associée aux comportements sexuels violents, comme les violeurs sadiques et les agresseurs sexuels tueurs.

D’autres maladies psychiatriques peuvent être présentes chez les agresseurs sexuels, comme la déficience intellectuelle, les troubles du développement, le déficit d’attention-hyperactivité, les troubles du contrôle des impulsions, les troubles psychotiques, les troubles de l’humeur, les troubles anxieux et les abus de substances.

Profils des agresseurs sexuels

Plusieurs profils d’agresseurs sexuels ont été mis en évidence par différents auteurs. On trouve par exemple:

  • le sadique sexuel: il agit de façon planifiée et ritualisée, la souffrance provoquée chez l’autre est source de plaisir sexuel;
  • le psychopathe: il organise sa vie autour de la recherche de la satisfaction immédiate de ses besoins, dont les besoins sexuels, très souvent sans remords;
  • l’agresseur qui agit par rage: il agresse brutalement sa victime, de manière souvent impulsive, suite à un événement déclencheur (comme une dispute);
  • l’agresseur à la recherche de pouvoir: il agit pour combler des doutes concernant une virilité «défaillante». Le délit est planifié et l’agresseur cherche à maîtriser sa victime.

Traitement

L’incarcération seule ne règle pas le problème de la violence sexuelle. Une prise en charge sociale, médicale et psychologique est indispensable.

Le cadre du suivi psychologique ou psychiatrique doit concilier les exigences juridiques  et la confidentialité, laquelle permet l’établissement d’une relation de confiance avec l’intéressé. La psychothérapie a pour but de fournir un espace de réflexion aux patients et de travailler sur le vécu de leurs victimes, le développement de l’empathie ainsi que la prise de responsabilité face aux délits commis. Elle permet également de développer des ressources pour prévenir une récidive.

Plusieurs médicaments peuvent être utilisés selon les cas, comme les anti-androgènes ou certains antidépresseurs.

Risque de récidive

Plusieurs études ont conclu à un taux de récidive de 15% dans les cinq ans.Une évaluation du risque de récidive est effectuée, basée sur des échelles d’évaluation. Bien que ces échelles  constituent un outil très utile lorsqu’elles sont couplées à une évaluation clinique spécialisée, cette démarche reste marquée par l’imprévisibilité de ces comportements et part du principe que le risque zéro n’existe pas.

Références

Adapté de «Traitement des agresseurs sexuels: possibilités et limites», par Dr L. Soldati, consultation spécialisée de sexologie des HUG, ainsi que Dr A. Eytan, service de psychiatrie pénitentiaire des HUG, Genève. In Revue médicale suisse 2014;10:647-50. En collaboration avec les auteurs.

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