L’amnésie n’est pas une fatalité

Dernière mise à jour 10/11/16 | Article
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Après une maladie ou un traumatisme, certains patients font face à des problèmes d’amnésie pouvant les handicaper au quotidien. L’aide d’un neuropsychologue peut leur être utile.

Le sentiment de connaître une personne, sans pouvoir retrouver son nom ni le contexte dans lequel on l’a rencontrée. Chez certaines personnes, ces pertes de mémoire sont systématiques en raison d’une lésion cérébrale, dont l’origine peut être diverse. Après un infarctus du myocarde ou une atteinte vasculaire cérébrale ayant provoqué une hypoxie du cerveau, un traumatisme crânien, des abus d’alcool chroniques ou encore des encéphalites virales, les structures de la mémoire peuvent avoir été endommagées. La lésion cérébrale marque alors un «avant» et un «après» pour le patient. «La capacité à acquérir de nouvelles informations peut avoir été abîmée. On parle d’«amnésie antérograde», explique le Dr Radek Ptak, neuropsychologue au Service de neurorééducation des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). La mémoire rétrograde, qui concerne les événements ayant eu lieu avant l’accident médical, n’est souvent pas touchée.»

Conseils pour soulager sa mémoire

  • Noter ses rendez-vous dans un agenda… et le consulter!
  • Représenter graphiquement (dessin, schéma) les choses à ne pas oublier.
  • Favoriser les courtes séances d’apprentissage et répéter la matière plusieurs fois.

Les symptômes, eux, sont très variables selon l’étiologie, la localisation et l’étendue de la lésion. Grossièrement, cela peut toucher notamment la mémoire visuelle, spatiale, verbale. Concrètement, cela peut se traduire par des difficultés à retrouver son chemin et à s’orienter dans l’espace, à trouver le nom d’une personne, à reconnaître un visage ou à gérer un agenda, pour ne citer que quelques exemples. Si ces problèmes d’amnésie peuvent lourdement porter atteinte à l’indépendance du patient, ils ne sont pourtant pas une fatalité.

«La première chose à faire est une analyse profonde et détaillée du trouble pour en déterminer l’ampleur ainsi que son impact sur le quotidien», explique le Dr Ptak. Est-ce l’acquisition d’une nouvelle information (l’encodage), son enregistrement ou le rappel de l’information à un moment précis qui pose des difficultés? Des tests permettront de cerner le problème. Ensuite, toutes sortes d’exercices individualisés seront proposés aux patients, dans le but de stimuler, dans un premier temps, leur plasticité cérébrale, en fonction de leurs troubles et des situations auxquelles ils font face.

Dans certains cas, c’est d’abord sur la conscience du trouble qu’il faut travailler. «Il arrive que des patients soient dans le déni de leurs difficultés et qu’ils n’en prennent conscience qu’une fois sortis de l’hôpital quand ils y sont confrontés», explique le neuropsychologue. L’aspect émotionnel ainsi que les représentations que ces nouvelles limitations entraînent nécessitent parfois un soutien psychologique: «Se sentir réduit, frustré, avoir peur de paraître idiot, être confronté à un problème massif qui, pourtant, ne se voit pas, n’est pas simple à gérer.» Rééduquer sa mémoire, c’est donc toute une prise en charge qui permet de mieux vivre les manquements de sa mémoire, mais aussi de trouver des solutions pour aménager son quotidien et favoriser son autonomie.

Comment mémoriser : trois situations, trois solutions

Situation N° 1

  • Problème: retenir le nom d’une personne qu’on vient de nous présenter lors d’une soirée.
  • Stratégie: porter attention sur le fait qu’il y a un nouveau souvenir à former; se répéter le nom de la personne cinq secondes après l’avoir entendu, puis trente secondes après une deuxième fois et, enfin, encore une à deux fois dans la soirée. Avec cette stratégie, il est possible de retenir plusieurs noms.

Situation N° 2

  • Problème: retenir un texte.
  • Stratégie: identifier les informations nouvelles principales et les relier à des connaissances sémantiques préexistantes.

Situation N° 3

  • Problème: retenir un nouveau trajet.
  • Stratégie: repérer des points d’intérêt qui «sautent aux yeux» (cela peut être une vitrine d’un magasin de jouets) et y accrocher un souvenir ou une pensée (par exemple, la voiture en bois dans la vitrine me rappelle un des jouets de mon enfance).

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Paru dans Générations, Hors-série «Tout savoir sur notre mémoire», Novembre 2016.

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