Des progrès dans la greffe de la cornée

Dernière mise à jour 12/05/16 | Article
Des progrès dans la greffe de la cornée
La greffe de cornée est la transplantation la plus répandue dans le monde. Une nouvelle technique, baptisée DMEK, permet de ne transplanter qu’une seule des couches de la cornée, ce qui diminue les risques de rejet du greffon et accélère la récupération visuelle. L’hôpital ophtalmique Jules-Gonin à Lausanne est le premier à la pratiquer en Suisse romande.

C’est elle qui transmet la lumière à l’œil, elle aussi qui forme une barrière protégeant le globe oculaire du monde extérieur. Autant dire que la cornée, située à l’avant de l’iris, est une structure primordiale de notre vision. C’est aussi la partie la plus vulnérable de l’œil. Au contact de la chaleur, en présence d’infections –notamment celles qui se développent sous les lentilles de contact– ou d’agressions diverses, le hublot perd peu à peu de sa transparence jusqu’à devenir complètement opaque, provoquant alors la cécité.

Une intervention courante

Quand les lunettes ou les verres de contact ne parviennent plus à corriger la vision, il ne reste qu’une solution: transplanter, dans l’œil malade, une cornée prélevée sur un donneur décédé. L’intervention est courante puisque parmi toutes les transplantations, celle de la cornée est la plus répandue à l’échelle mondiale.

Composée de trois couches, l’épithélium, la lamelle la plus superficielle, le stroma, et l’endothélium, la plus profonde, qui est en contact avec l’humeur aqueuse, la cornée était au départ greffée dans son intégralité. Cette transplantation, dite transfixiante, est «toujours utilisée lorsque la totalité de la cornée est malade», précise Muriel Catanese-Pollet, spécialiste des pathologies de la cornée et de chirurgie réfractive à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin à Lausanne. Mais dans les autres cas, la tendance est aux greffes lamellaires, qui consistent à ne remplacer que la couche atteinte. «En greffant moins de tissu, on diminue les risques de rejet», précise l’ophtalmologue. C’est donc une avancée par rapport à la technique transfixiante. Reste qu’actuellement, quand on greffe l’endothélium, on y adjoint une petite partie du stroma. Cela «épaissit le greffon et requiert des incisions plus larges. En outre, l’interface qui se crée entre les deux stromas, celui du receveur et celui du donneur, fait perdre de la qualité à la vision».

Meilleure récupération de la vision

C’est cet inconvénient qu’une nouvelle technique, nommée DMEK (Descemet Membrane Endothelial Kertoplasty), permet de surmonter. Elle consiste en effet à remplacer uniquement l’endothélium malade «sans y ajouter du tissu supplémentaire, ce qui permet une récupération bien meilleure de la vision», souligne l’ophtalmologue. En outre, le greffon est dix fois plus fin que précédemment (0,015 millimètre au lieu de 0,15). De ce fait, «les incisions sont plus étroites» et elles ne nécessitent qu’un seul point de suture, contre 24 dans une transplantation lamellaire classique.

Pratiquée depuis une dizaine d’années aux Etats-Unis, cette méthode a été introduite, début 2016, en Suisse romande par Muriel Catanese-Pollet. L’ophtalmologue ne cache pas que sa mise en œuvre nécessite du doigté: «La phase la plus délicate est la préparation du greffon, car lorsque l’on pèle l’endothélium du donneur, on risque de le déchirer.» La transplantation proprement dite requiert, elle aussi, des «manipulations difficiles car l’endothélium est une membrane très élastique qui a tendance à s’enrouler sur elle-même et il n’est pas aisé de la déployer à l’intérieur de l’œil. C’est pour cette raison que l’on injecte une bulle d’air entre l’iris et le greffon afin de plaquer celui-ci contre la cornée du patient.»

Manque de donneurs

L’intervention, pratiquée sous anesthésie générale ou loco-régionale, dure entre 1h et 1h30. Elle est suivie de trois jours d’hospitalisation durant lesquels le patient doit rester étendu sur le dos pour que la bulle d’air maintienne le greffon en place. Il récupérera sa vision au bout de deux ou trois mois –bien plus rapidement que s’il avait subi une greffe transfixiante. Mais la technique DMEK ne résout pas le problème, crucial en Suisse, du manque de donneurs de cornée. Toutefois, elle l’amoindrit dans la mesure où, à l’aide d’un seul greffon, il est possible de greffer l’endothélium à un patient et l’épithélium et le stroma à un autre. C’est une avancée de plus dans un domaine, la chirurgie de l’œil, actuellement en pleine évolution.

Un criant manque de donneurs

Actuellement en Suisse, 120 patients nécessitant une greffe de cornée sont sur la liste d’attente pour pouvoir recevoir un don. Et ils doivent patienter de six à dix-huit mois avant de pouvoir être opérés. En cause: le manque de donneurs, donc de greffons disponibles.

Le problème affecte l’ensemble des services de transplantation d’organes et de tissus, mais il prend un tour particulier en ophtalmologie. En effet, parmi les familles qui acceptent qu’on prélève les organes de leur proche décédé, beaucoup refusent que l’on touche à sa cornée. Cette structure de l’œil «est souvent considérée comme "le reflet de l’âme" et certaines personnes craignent qu’en l’ôtant, on modifie le regard du défunt», constate Muriel Catanese-Pollet. La spécialiste de la cornée à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin à Lausanne tient à les rassurer. Lorsqu’on prélève la cornée, «on ne prend que la partie antérieure de l’œil. On ne touche pas à l’ensemble du globe oculaire dont la forme est conservée». L’aspect des yeux et des paupières fermées du défunt n’est donc en rien modifié.

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