Ne pas banaliser l’anémie des seniors

Dernière mise à jour 20/02/12 | Article
Une femme âgée
L’anémie est définie par la baisse de l’hémoglobine. Elle est fréquente chez le sujet âgé de plus de 65 ans vivant en communauté. Au-delà de 85 ans, elle dépasse 20%. L’anémie doit toujours être considérée comme pathologique et son dépistage devrait faire partie de toute évaluation gériatrique globale.

De nombreuses situations clairement pathologiques chez le sujet jeune sont souvent acceptées comme «normales» et faisant  partie du vieillissement physiologique chez le sujet âgé. C’est le cas de l’anémie, trop souvent banalisée et insuffisamment traitée. Pourtant, elle constitue un facteur de mauvais pronostic fonctionnel et vital et elle est également  à l’origine d’une perte de qualité de vie et de limitations fonctionnelles.  

La prévalence de l’anémie est très élevée dans la population gériatrique. Même modérée, une valeur abaissée d’hémoglobine ne doit jamais être considérée comme une conséquence inévitable du vieillissement car elle est associée à un certain nombre d’impacts cliniques négatifs et à une augmentation de la mortalité, indépendamment de son origine. Le lien de causalité est cependant difficile à déterminer en l’absence d’études. La malnutrition, pourrait-elle aggraver l’anémie par des mécanismes encore mal déterminés? A l’avenir, les travaux sur l’anémie du sujet âgé devraient approfondir les connaissances sur les changements physiologiques liés à l’âge et permettre de documenter la réduction des risques associés par la prise en charge chronique et active de ce problème.

L’anémie en gériatrie

L’anémie est fréquente en gériatrie  et son association avec un certain nombre d’effets cliniques négatifs est bien connue et largement documentée dans la littérature. Concernant la population institutionnalisée ou hospitalisée, même si les études sont  beaucoup moins nombreuses et plus anciennes que celles concernant la population communautaire, les prévalences respectives sont  encore très élevées, de l’ordre de 48-63% en établissement médico-social (EMS) et 40% en milieu hospitalier.

L’origine des anémies du sujet âgé peut se diviser schématiquement en trois groupes de taille équivalente, selon la «règle des trois tiers»: les anémies nutritionnelles dues à des déficits en fer, en acide folique et/ou en vitamine B12; les anémies inflammatoires ou liées à l’insuffisance rénale chronique, et enfin, les anémies d’origine indéterminée.

La démarche diagnostique de l’anémie est pour l’essentiel la même chez les sujets âgés que chez les plus jeunes mais elle comporte certaines particularités. Par ailleurs, plusieurs causes d’anémie peuvent coexister: un diagnostic retenu n’en exclut pas d’autres, qu’il convient de rechercher.  

L’impact de l’anémie chez le sujet âgé

L’anémie augmente le risque de mortalité chez le sujet âgé. Cette association est indépendante des comorbidités, mais elle se vérifie tout particulièrement chez les sujets atteints d’insuffisance rénale ou cardiaque. L’anémie, même modérée, est un facteur de risque indépendant d’incapacités fonctionnelles et son impact sur la qualité de vie est reconnu. L’anémie augmente le risque d’hospitalisation et elle est associée à des plus longues durées de séjours. Selon les études, l’incidence d’hospitalisation atteindrait jusqu’à 29% à trois ans chez le sujet anémique et le potentiel de récupération est également moindre pour les patients anémiques.

La prévalence de l’anémie est plus importante chez le sujet âgé dément (47% vs 35% chez le non-dément) et la présence de troubles cognitifs semble plus fréquente chez les patients anémiques par rapport aux non-anémiques (55,6% et 34,4% respectivement). L’anémie semble même majorer le risque de démence dans une population âgée avec ou même sans troubles cognitifs préexistants. Elle pourrait donc être un facteur de risque potentiellement modifiable des démences.

Comme le risque de chute et de récidive de chute augmente dans la population âgée communautaire, en EMS ou à l’hôpital, le risque de  complications traumatiques (fractures, traumatisme crânien) croît également, de manière directement proportionnelle au degré d’anémie. La correction de l’anémie pourrait donc être un facteur de prévention des chutes du sujet âgé.

Enfin, le pronostic vital et fonctionnel des sujets âgés souffrant d’insuffisance cardiaque et de maladie coronarienne est directement et significativement lié aux valeurs d’hémoglobine.

Comment prendre en charge l’anémie? En traitant sa cause sous-jacente, qu’il s’agit de rechercher de manière active.

Référence

Adapté de «L’anémie du sujet âgé: une pathologie fréquente à ne pas banaliser », Drs Emilia Frangos, Jean-Jacques Perrenoud et Ulrich M. Vischer, Service de gériatrie, Département de réhabilitation et de gériatrie, Hôpital des Trois-Chêne, HUG; Dr Kaveh Samii,Service d’hématologie, Département de médecine interne HUG, in Revue médicale suisse 2010; 6: 2125-9, en collaboration avec les auteurs.

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