Arthrose et mal de dos: désormais, mieux vaut oublier le paracétamol

Dernière mise à jour 27/04/15 | Article
Arthrose et mal de dos: désormais, mieux vaut oublier le paracétamol
Des chercheurs australiens ont repris l’ensemble des travaux menés sur le sujet. Ils concluent à une quasi-inefficacité de ce médicament dans les lombalgies et les douleurs d’origine arthrosique. Une autre étude met en garde contre sa toxicité à long terme.

Que faire contre une lombalgie chronique ou contre des douleurs d’origine arthrosique? L’un des réflexes les plus fréquents est d’avoir recours au paracétamol (ou acétaminophène), l’un des antalgiques les plus consommés au monde, dont le nom est la contraction de paraacétyl-amino-phénol. C’est sans doute là un réflexe à oublier. Un groupe de huit chercheurs australiens travaillant à Sydney vient d’expliquer pourquoi dans le British Medical Journal1.

Dirigés par le Pr Manuela L. Ferreira (The George Institute for Global Health, Sydney Medical School, University of Sydney), ces chercheurs ont repris et analysé les treize principaux travaux menés sur ce sujet à travers le monde. Soit des recherches effectuées, au total, auprès de plus de 5000 personnes. Conclusions: «Le paracétamol est inefficace dans le traitement de la lombalgie et procure des avantages à court terme minimes pour les personnes souffrant d’arthrose.»

Anomalies hépatiques

Ces mêmes chercheurs disent aussi avoir observé, avec le paracétamol, des anomalies de la fonction hépatique qui restent encore à éclaircir. Il est dès lors urgent, selon eux, de réexaminer les recommandations officielles qui incitent les personnes souffrant de lombalgies ou de douleurs et d’arthrose de la hanche ou du genou à avoir recours au paracétamol.

L’affaire est prise très au sérieux au Royaume-Uni où l’on cherche à rationaliser publiquement les choix médicamenteux en y intégrant des critères économiques. Le «mal de dos» est la principale cause d’invalidité en Grande Bretagne où il affecterait chaque année environ 26 millions de personnes. Pour l’heure, le National Institute for Health and Care Excellence (institution en charge de l’élaboration des bonnes pratiques pour le National Health Service) recommande le paracétamol pour les douleurs lombaires et pour celles d’origine arthrosique.

Pas mieux qu’un placebo

En juillet 2014, une publication du Lancet avait établi que le recours au paracétamol dans la lombalgie aiguë était, pour une large part, sans fondements rationnels: ses auteurs démontraient que l’efficacité de ce médicament est, tout bien pesé, égale à celle obtenue à partir de la consommation d’une substance placebo (inactive d’un point de vue pharmacologique). Aucune différence sur l’intensité à court terme des douleurs, des handicaps fonctionnels, de la qualité de sommeil ou de la qualité de vie. Et aucune différence non plus dans les effets indésirables ou la durée moyenne d’inactivité professionnelle (17 jours dans le groupe paracétamol contre 16 dans le groupe placebo).

«Il y a d’autres médicaments, comme les anti-inflammatoires non-stéroïdiens et les antalgiques opiacés, qui peuvent offrir un meilleur soulagement de la douleur. Mais ils sont associés à une gamme d’autres effets secondaires, explique le Pr Roger Knaggs, de la Royal Pharmaceutical Society. Toutes les personnes concernées devraient discuter de tout ceci avec leur généraliste ou leur pharmacien.»

Effets toxiques

Il y a quelques semaines le paracétamol faisait également l’objet de vives critiques après une publication dans la revue spécialisée Annals of the Rheumatic Diseases2. Il s’agissait là d’un travail mené parun groupe de quatorze auteurs britanniques, dirigés par Philip G. Conaghan (Leeds Institute of Rheumatic and Musculoskeletal Medicine, University of Leeds; NIHR Leeds Musculoskeletal Biomedical Research Unit).

Les auteurs britanniques avaient réuni huit études déjà publiées et concluaient que le risque réel associé à la prescription de paracétamol est supérieur à ce qui est perçu par la communauté médicale. «Selon cette étude, les personnes prenant quotidiennement une dose acceptable mais élevée de paracétamol (3 g par jour) ont un risque de décès prématuré accru jusqu’à + 60%. Elles présentent aussi une probabilité plus élevée de connaître un accident cardio-vasculaire (+ 19%), une hémorragie intestinale (+11 à 49%) ou des atteintes rénales», résumait en France Le Figaro. Pour le Pr Bernard Bégaud, pharmacologue à l’université de Bordeaux, les risques du paracétamol ont longtemps été sous-estimés, notamment pour ce qui est de sa toxicité rénale et hépatique (y compris à doses normales).

Jamais plus de 4 g par jour

Le Pr Jean-Louis Montastruc, pharmacologue à Toulouse et membre de l’Académie nationale française de médecine, est toutefois plus réservé sur la validité des résultats britanniques: «Cette étude est la seule à établir ce lien de cause à effet, qui n’a jamais, par exemple, été notifié par des médecins au cours de leur pratique. Or, en pharmacovigilance, nous nous appuyons toujours sur un faisceau de preuves.»  Pour le Pr Montastruc le paracétamol reste l’antalgique de référence, car il est très bien toléré. Ce que les volumes des ventes laissaient depuis longtemps supposer.

La quantité maximale de paracétamol autorisée est de 4 g par jour pour un adulte. Au-delà, le surdosage expose à des lésions hépatiques graves potentiellement mortelles. Il faut néanmoins ajuster le raisonnement au profil du consommateur: une dose quotidienne normale de 3 g de paracétamol peut s’avérer toxique à long terme chez une personne âgée qui s’alimente peu, quand elle n’aura pas d’effets indésirables chez un sujet bien portant.

La question ne se pose pas pour les consommateurs ponctuels de paracétamol, celles et ceux qui en prennent l’espace de quelques jours pour soigner une fièvre, une migraine ou une douleur dentaire. La question se pose bel et bien en revanche pour les consommateurs à long terme –souvent des personnes souffrant de douleurs arthrosiques ou de lombalgies récurrentes et chroniques.

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1. Cette publication (en anglais) du British Medical Journal est disponible ici

2. Cette publication (en anglais) de Annals of the Rheumatic Diseaseest disponible ici

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