Les promesses de l’implant contraceptif électronique

Dernière mise à jour 11/08/14 | Article
Les promesses de l’implant contraceptif électronique
Soutenue par la Fondation Bill et Melinda Gates, la start-up américaine MicroCHIPS a mis au point un dispositif contraceptif implantable. Développé pour être utilisé pendant seize ans, il peut également être activé et désactivé facilement grâce à une télécommande.

Pilules mais aussi anneau, implant, dispositifs intra-utérins (DIU), patch, préservatif, injections, diaphragme, etc.: les moyens de contraception disponibles sur le marché sont nombreux. Et pourtant, beaucoup de laboratoires travaillent encore au développement d’un contraceptif parfait: fiable, discret, sans contraintes, sans effets secondaires. Récemment, une équipe de chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston a fait sensation en présentant un prototype implantable dont les effets contraceptifs dureraient jusqu’à seize ans. Le dispositif est, de plus, télécommandé, permettant ainsi à l’utilisatrice de le mettre hors fonction lors de périodes d’abstinence ou de conception. Un concentré de technologie plein de promesses qui soulève cependant quelques interrogations chez les professionnels de santé.

Prouesse technique

L’implant électronique a été mis au point par l’équipe de Robert Langer, connu pour avoir développé la technologie des micropuces, et cofondateur de la société MicroCHIPS. Mesurant deux centimètres de côté et 0,7 centimètres d’épaisseur, le dispositif peut être inséré sous la peau de l’abdomen ou des fessiers. «Les micropuces sont aujourd’hui devenues très courantes, commente Giovanni De Micheli, directeur du Centre des systèmes intégrés de l’EPFL. La difficulté technique était ici de concevoir un système capable de délivrer une dose quotidienne d’hormone.»

Pour y parvenir, les scientifiques ont développé un système de micro-réservoirs, scellés par une substance qui se dissout sous l’effet d’un courant électrique déclenché quotidiennement. Grâce à une télécommande, l’utilisatrice pourra activer ou désactiver l’implant. Elle serait ainsi totalement autonome pour gérer sa contraception. «Cette fonction semble un peu gadget, remarque Giovanni Di Micheli. Quand les femmes décident d’avoir recours à une contraception ou de l’arrêter, c’est souvent pour plusieurs mois. L’intérêt d’un interrupteur semble limité.»

«Le suivi de la contraception est aussi souvent l’occasion de faire un contrôle gynécologique, ajoute Lorenza Bettoli Musy, responsable de l’unité santé sexuelle et planning familial des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). On peut se demander si avec cet implant les femmes n’espaceraient pas trop ces consultations.» La fiabilité du dispositif pourrait aussi pâtir de cette fonction on/off, qui peut laisser croire qu’il suffit d’activer le dispositif pour être protégée, alors qu’aucune méthode hormonale n’est efficace immédiatement.

Regain d’intérêt pour les stérilets

L’implant délivre 30 microgrammes par jour de lévonorgestrel, un progestatif déjà utilisé dans le DIU Mirena ainsi que dans les pilules de deuxième génération. Cette hormone présente un risque thrombo-embolique inférieur à celui des pilules de troisième et quatrième génération mises sur la sellette en 2013, et peut également être utilisée par les femmes qui allaitent. «En pratique, nous observons souvent une adaptation de la contraception selon les différents moments de la vie des femmes. On peut se demander si elles seront satisfaites avec l’administration d’une seule hormone sur une si longue période», modère Lorenza Bettoli Musy.

Etre protégée sans avoir à y penser quotidiennement était l’argument mis en avant lors de la commercialisation de l’Implanon© en 1999. Cet implant progestatif sous-cutané est actif durant trois ans. Malgré tout, en une quinzaine d’années, l’Implanon© et sa version plus récente Nexplanon© n’ont pas supplanté la pilule. «L’implant est plébiscité par certaines femmes, mais d’autres se plaignent de prise de poids, de saignements irréguliers ou de problèmes d’acné», constate Lorenza Bettoli Musy. Une étude menée au CHUV au début des années 2000 avait démontré qu’un quart des femmes faisaient retirer leur implant avant la date de péremption.

«Les femmes qui recherchent une protection au long court sont aujourd’hui surtout intéressées par les stérilets, remarque Monette Cherpit, conseillère en santé sexuelle et sage-femme à l’Unité santé sexuelle et planning familial des HUG. Ces dispositifs ont beaucoup évolué et présentent de nombreux avantages: pose et retrait rapides, fiabilité, efficacité quasi immédiate.» Certains stérilets au cuivre peuvent même être utilisés comme moyen de contraception d’urgence. Et depuis quelques mois il existe un modèle spécifiquement développé pour les jeunes femmes qui n’ont pas encore eu d’enfants.

Mise sur le marché en 2018

«Le choix d’un dispositif contraceptif prend en compte différents paramètres, tels que les antécédents médicaux, les contraceptifs déjà utilisés, les projets de grossesse ou la situation du couple bien sûr, mais aussi des aspects économiques, rappelle Lorenza Bettoli Muzy. L’Implanon, qui a un coût de revient sur trois ans inférieur à celui de certaines pilules, peut cependant représenter une dépense trop importante pour certaines femmes. Surtout si elles n’en sont pas satisfaites après quelques mois.»

Pour l’instant, aucune information n’a été communiquée sur le coût de l’implant électronique, que la société MicroCHIPS espère pouvoir commercialiser dès 2018. Il faudra d’ici là que le dispositif soit approuvé par l’autorité de santé américaine, la Food and Drug Administration. Outre les tests cliniques qui devront démontrer l’efficacité et l’innocuité de l’implant, MicroCHIPS devra pouvoir aussi certifier que les données de l’implant seront cryptées et impossibles à pirater.

Contraception masculine au ralenti

«Le développement de nouveaux contraceptifs féminins est un domaine très actif, mais force est de constater que les choses avancent lentement en ce qui concerne la contraception masculine», relève Monette Cherpit, conseillère en santé sexuelle et sage-femme à l’Unité santé sexuelle et planning familial des HUG. Plusieurs groupes de recherche dans le monde travaillent pourtant sur des molécules bloquant la fertilité masculine. Mais pour l’instant aucun prototype n’a passé la rampe des essais cliniques, le plus souvent à cause d’effets secondaires majeurs. «Biologiquement, il est beaucoup plus complexe de bloquer la spermatogénèse, qui se fait en continu, que l’ovulation», rappelle Monette Cherpit. En attendant «la pilule pour hommes», la fondation Bill et Melinda Gates a lancé un concours pour développer le «préservatif du futur». Le prix de 100000 $ a été attribué en juin à des chercheurs de l’université australienne de Wollongong qui proposent de remplacer le latex par un hydrogel, une matière qui devrait améliorer la résistance et le confort des préservatifs.

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