A la rencontre de la trisomie 21

Dernière mise à jour 27/02/12 | Article
Enfant trisomique qui dessine
Deux ans après l’ouverture des consultations cliniques sur la trisomie 21 aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), Ariane Giacobino, médecin généticienne, fait le point.

Le Pr Stylianos Antonarakis, qui dirige une équipe de recherche fondamentale sur la Trisomie 21 et le Dr Giacobino ont pris le parti d’aller au-delà des aspects moléculaires de la maladie en se concentrant sur la médecine d’après diagnostic. Leur but étant de chercher à savoir comment les trisomiques peuvent vivre mieux et surtout aller mieux.

La consultation

Bien que la trisomie 21 accompagne l’être humain depuis toujours, elle reste néanmoins encore largement méconnue. «C’est en rencontrant un grand nombre de personnes atteintes que l’on peut se rendre compte à quel point elles peuvent être différentes les unes des autres et comme il est impossible de prédire les compétences futures de chacune», explique le Dr. Giacobino. C’est donc en cela même que se révèle, entre autres, l’importance de la mise en place de la consultation. Elle permet en effet de comprendre et de se rendre compte d’une réalité encore bien difficile à appréhender. «Même si globalement posséder un chromosome supplémentaire implique des similitudes entre les personnes concernées, le reste de leur génome et l’environnement dans lequel ils évoluent fait qu’ils sont une multitude d’individus», ajoute l’experte.

Du nourrisson à l’adulte, ce sont toutes les tranches d’âge qui viennent soit chercher du réconfort, soit demander conseil ou encore faire le point, sous la houlette de membres de leur famille ou d’éducateurs référents, auprès du Dr. Giacobino et de ses confrères. «Nous avons été surpris de constater que plus de la moitié des «patients» sont des adultes. Nous pensions que le maximum de difficultés et de besoins pour les parents se situaient dans les jeunes années de leur enfants. Car ils sont en effet plus fragiles que les autres et consultent en moyenne plus souvent le médecin. Les parents sont donc fréquemment débordés du fait que la prise en charge  médicale se fait avec plusieurs intervenants (logopédistes, pédiatres,  etc.)» Les visites ont donc démontré que les personnes atteintes ayant au-delà de 18 ans réclamaient en grand nombre un suivi.

Un check-up complet et sur la durée

Lors des consultations, l’équipe applique les guidelines internationales en matière de trisomie 21. Il existe en effet des recommandations spécifiques en matière de contrôle et de suivi de l’état de santé des personnes atteintes, à tous âges. Elles ont généralement certaines maladies associées à leur état; le but est alors de s’assurer qu’elles n’aient pas de problèmes surajoutés.

Par exemple, durant les six premiers mois de la vie d’un trisomique, un ophtalmologue doit vérifier un éventuel strabisme, des problèmes de cataracte, ou un possible nystagmus (mouvement oscillatoire du globe oculaire).  De même, un médecin fera le premier bilan thyroïdien, 4 à 18% des personnes avec une trisomie développant des problèmes de thyroïde au court de leur vie, et recherchera des signes d’apnées du sommeil. Cette série de recommandations a été revue et publiée en 2011 par l’American Academy of Pediatrics.

Un examen clinique complet est donc proposé au patient, avec stéthoscope, marteau à réflexes, otoscope, palpations, etc.

Le médecin engage également une discussion sur les antécédents médicaux du patient: sa prise en charge passée et présente, ses diverses activités et les difficultés qu’il peut rencontrer au quotidien. «Cela nous donne alors une base pour entamer un suivi régulier d’une, voire dans certains cas deux, consultation par an, souligne l’experte. Il est en effet important pour nous d’avoir une ligne de référence du fonctionnement d’une personne trisomique afin de pouvoir noter tous changements ou évolutions lors des consultations suivantes».

A noter que l’ensemble de ces consultations sont prises en charge par l’assurance maladie de base.

S’inscrire dans le progrès

Certaines situations sont plus complexes. Les personnes atteintes de trisomie 21 peuvent en  effet être enclines à d’autres problèmes de santé, tels que l’autisme, des psychoses ou encore un déclin des fonctions cognitives qui survient avec l’âge. «Souvent dans cette situation, les parents, éducateurs ou enseignants sont déroutés et il faut avouer que nous avons parfois bien peu d’outils nous permettant d’améliorer les choses», témoignent le Dr Giacobino.

Les lignes directrices pour le suivi médical de la trisomie 21 et les publications scientifiques sur le sujet sont nombreuses. Que ce soit dans la compréhension des aspects génétiques, à savoir saisir quel est le gène responsable, que dans les essais thérapeutiques qui ont été entrepris sur les personnes atteintes, les théories sont multiples.

«Nous voulons nous inscrire dans ce progrès et servir d’interface pour les familles et institutions, pour les aider à comprendre la manière dont la science évolue et de quelle façon cela pourrait modifier la prises en charges des trisomiques. En menant à bien cette consultation clinique nous pouvons ainsi échanger avec diverses institutions et ateliers, avec les assurances et médecins traitants, ainsi qu’avec les enseignants et toutes les catégories de personnes qui jalonnent les parcours des personnes atteintes de trisomie 21».

Référence

Consultation Trisomie 21, Dr Ariane Giacobino, Service de Médecine Génétique, HUG. Tél. pour consultations: 022 379 56 96.

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