Le diabète ne cesse de prendre du poids

Dernière mise à jour 14/11/13 | Article
Le diabète ne cesse de prendre du poids
Le diabète de type 2 touche de plus en plus de monde, et de plus en plus de jeunes. Une maladie dont certains facteurs de risque peuvent être prévenus.

De quoi on parle?

Les faits

Tom Hanks s’est laissé aller à la confidence sur le plateau du «Late Show» de David Letterman, le 7 octobre dernier sur CBS, en révélant être atteint d’un diabète de type 2. L’acteur américain, deux fois oscarisé, a mis en cause sa prise de poids, conséquence d’années de régimes en dents de scie, assumés pour le besoin de ses rôles. Plus surprenant, il a laissé entendre que ce diabète était latent depuis vingt ans. Ce qui est effectivement tout à fait possible.

On l’a vu incarner un avocat à l’articlede la mort dans «Philadelphia», séduire Meg Ryan dans «Nuits blanches à Seattle», survivre sur une île déserte dans «Seul au monde», et il est actuellement à l’affiche du haletant «Capitaine Philipps».

Hors caméra, on apprend que Tom Hanks, aujourd’hui âgé de 57 ans, s’astreignait à un contrôle régulier de sa glycémie. La raison? Probablement une prédisposition à une forme de diabète de type 2 d’origine génétique. Le diabète peut alors apparaître mais rester discret, sans symptômes pendant des années, ce qui est le cas lorsque le taux de glucose dans le sang ne dépasse pas les 12-13 millimoles par litre (mmol/L). C’est alors une prise de sang de contrôle ou une complication (infarctus, problème de vision, etc.) qui révèle la maladie.

Pour endosser ses divers rôles, on sait que l’acteur américain a mis son corps à rude épreuve, perdant les kilos par dizaines avant de les reprendre pour le film suivant. Au fil des années, ces régimes «yo-yo» ont tendance à faire pencher la balance vers le surpoids, l’ennemi numéro 1 du diabète de type 2.

Cinq facteurs de risque identifiés

«Un indice demasse corporel (IMC)1 supérieur à 25 est l’indication d’un surpoids et constitue un facteur de risque majeur, indique le Dr Jacques Philippe, diabétologue aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Mais il n’est pas le seul!» En effet, cinq facteurs de risque ont été identifiés. Et c’est en général l’action conjuguée de plusieurs d’entre eux qui déclenche la maladie. Outre le surpoids, il s’agit de l’âge, de l’inactivité physique, du stress et de prédispositions génétiques.

Dans le détail, le diabète de type 2 survient le plus souvent à partir de 50 ans. Toutefois, les enfants et adolescents sont de moins en moins épargnés. En cause, y compris chez les plus jeunes: une alimentation souvent déséquilibrée, arrosée de boissons sucrées aux effets explosifs sur la glycémie. Le tout couplé à un autre facteur de risque, le manque d’exercice physique, qui tend à frapper toutes les générations. Ce contexte explique une montée croissante du diabète, qui est passé en Suisse de 3% de la population en 2007 à 5% en 2012. En Arizona, ce taux va jusqu’à frôler les affolants 50% chez les Indiens Pimas. Quant au stress, «son effet négatif est double, explique le Dr Ruiz, diabétologue au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Il entraîne la libération d’adrénaline et de cortisol, ce qui provoque une montée de la glycémie. S’ajoute à cela qu’il s’accompagne souvent d’une envie de grignoter des aliments sucrés.»

Une soif excessive peut révéler un diabète de type 1

Alerte

Il ne représente que 5% des cas de diabète, mais celui de type 1 peut s’avérer redoutable. Ses premières manifestations: soif excessive, mictions très fréquentes, fatigue, perte de poids, nausées. Il faut alors agir vite puisque ces symptômes peuvent témoigner d’une forte hyperglycémie aux effets potentiellement délétères pour l’organisme, pouvant aller jusqu’au coma, voire à l’arrêt cardiaque. L’urgence est d’administrer de l’insuline au patient afin de permettre le stockage du sucre. Il faut ensuite veiller à ce que la quantité d’insuline soit suffisante à chaque instant. Le diabète de type 1 survient le plus souvent à l’adolescence. Contrairement à celui de type 2, il n’est pas dû au mode de vie mais à une maladie auto-immune au cours de laquelle les anticorps détruisent les cellules du pancréas qui sécrètent l’insuline. Dans certains cas, une transplantation de nouvelles cellules pancréatiques est envisagée. A noter que de nouvelles technologies apparaissent, qui pourraient alléger le quotidien des malades. En particulier, des nano-particules injectables, capables d’offrir une libération prolongée d’insuline, assurant ainsi un taux de glycémie normal pendant toute une semaine. Lorsqu’on sait qu’un diabétique peut devoir s’injecter de l’insuline jusqu’à dix fois par jour, on mesure le progrès que cette approche apporterait. A suivre dans les années à venir.

Dernier facteur de risque, et non des moindres: les prédispositions génétiques. Une quarantaine de gènes impliqués dans l’apparition du diabète ont déjà été mis en évidence. Ils sont présents en quantité variable selon les individus. Et logiquement, plus l’ADN en est pourvu, plus les risques de développer un diabète de type 2 sont importants. La prédisposition génétique se devine au nombre de cas de diabète dans la famille, et peut justifier un dépistage plus précoce. «Il est rare de développer un diabète de type 2 avant 40 ans, mais en cas de surpoids ou de facteurs de risques cumulés, même en dehors de tout symptôme, une prise de sang régulière est conseillée», préconise le Dr Philippe.

Ce qu’elle va révéler? Un taux de sucre dans le sang inférieur à 7 mmol/L (à jeun) si tout va bien, un chiffre supérieur en cas de diabète.

En temps normal, que l’on soit à jeun ou en train de digérer un plat de pâtes, la glycémie reste quasi stable, grâce à l’insuline, une hormone produite par le pancréas, qui intime l’ordre aux cellules de stocker le sucre ingéré (voir infographie). Une glycémie anormalement élevée traduit l’incapacité des cellules à emmagasiner ce sucre. Soit parce qu’elles ne sont pas assez sensibles aux injonctions de l’insuline, c’est le diabète de type 2. Soit parce qu’il n’y a plus d’insuline du tout, c’est le diabète de type 1. Dans les deux cas, le patient sera sujet à une fatigue, à des mycoses, parfois à une soif intense et une perte de poids. Ces manifestations sont généralement plus sévères pour le diabète de type 1 et souvent liées à des douleurs abdominales. Les troubles peuvent aller jusqu’au coma (lire encadré).

«L’hygiène de vie est une thérapie en soi»

Si le diabète de type 2 est avéré, le traitement consiste en la prise quotidienne de comprimés visant à accroître la production d’insuline mais aussi la sensibilité des cellules à cette même hormone. Des injections d’insuline peuvent en plus s’avérer nécessaires. Simple? Seulement en apparence. Car la grande difficulté du traitement vient de l’apport calorique du patient… qui doit s’alléger. «Si le patient continue à consommer trop de produits sucrés ou gras, le traitement fonctionnera moins bien et sera plus difficile à ajuster, explique le Dr Ruiz. Dans cette maladie, l’adhésion thérapeutique du patient, c’est-à-dire le fait qu’il suive son traitement à la lettre, se montre essentielle.»

La question reste: peut-on guérir du diabète? «Oui, si l’on s’y prend tôt et que l’on parvient à perdre du poids, poursuit le diabétologue. Une perte de quelques kilos, associée à une activité physique régulière, peut permettre de revenir à une glycémie normale ou à peine trop élevée, qui sera en tout cas plus facilement maîtrisable.» Le dépistage joue également un rôle clé. «Plus le diabète est pris en charge de façon précoce, plus les dégâts que peut causer l’hyperglycémie (un taux de sucre élevé dans le sang), tels que les atteintes cardio-vasculaires, oculaires ou rénales, sont maîtrisables, détaille encore le Dr Philippe. Et on ne le dira jamais assez: l’hygiène de vie est une thérapie en soi. Se prendre en charge le plus tôt possible dans sa vie est le meilleur moyen de prévenir le diabète de type 2.»

 

1 Pour calculer son IMC: poids (en kg) sur taille (en m) au carré.

Diabète

En collaboration avec

Le Matin Dimanche

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