Perdre du poids: les effets des restrictions caloriques intermittentes
Le «jeûne intermittent» ou fasting (abréviation de l'anglais intermittent fasting) consiste à alterner des périodes de privation de nourriture et des périodes d’alimentation normale, généralement dans le but de perdre du poids ou de corriger un trouble biologique.
Aujourd’hui l’épidémie croissante de surpoids et d’obésité confère aux régimes alimentaires une nouvelle actualité. Certains deviennent ainsi de plus en plus populaires. On voit émerger de nouveaux intérêts pour le «jeûne intermittent», la «restriction calorique intermittente» ou «l’alimentation limitée dans le temps» (sur une période de 4 ou 6 heures dans la journée). Que faut-il penser des effets sur la santé de tels comportements?
Une étude menée par une équipe internationale (Etats-Unis, Belgique, Italie, Royaume-Uni) apporte des éléments inédits de réponse. Ce travail a été dirigé par le Pr Satchidananda Panda (Regulatory Biology Laboratory, Salk Institute for Biological Studies, La Jolla, Californie) et ses conclusions ont été publiées dans les Comptes-Rendus de l’Académie américaine des Sciences (PNAS)(1).
La fin des trois repas quotidiens?
«D’importants efforts de recherche ont été menés sur la manière dont les composants spécifiques des denrées alimentaires pouvaient influer sur la santé, précisent les auteurs. En revanche on sait relativement peu de choses sur un aspect plus fondamental de l'alimentation, la fréquence et le rythme circadien des repas, et sur les avantages potentiels de périodes intermittentes sans –ou avec de très faibles– apports énergétiques.» Les auteurs soulignent aussi que le rythme habituel d’alimentation (trois repas par jour entrecoupés de quelques collations) est une sorte d’aberration du point de vue de l’évolution. Ces trois repas seraient une habitude assez récente, datant du passage de la période de l’homme «chasseur-cueilleur» à celle de l’homme «agriculteur». Soit il y a environ 12000 ans. Ce mode alimentaire serait ainsi en dysharmonie avec les caractéristiques et les besoins physiologiques du corps humain. Certains spécialistes en viennent à suggérer de limiter l’apport énergétique sur des périodes limitées, celles de jeûne pouvant stimuler le recours aux graisses comme source d'énergie et les mécanismes de réparation cellulaire.
Idées reçues
Tout ceci amène à combattre quelques idées reçues. Ainsi, il y a peu un groupe de chercheurs de l’Université de Bath (Royaume Uni) publiait dans The American Journal of Clinical Nutrition des données laissant entendre que le petit-déjeuner n’est pas «le repas le plus important de la journée». Ce premier repas est, selon eux, sans conséquences véritablement significatives sur le poids, le métabolisme ou les différents indicateurs biologiques témoignant de la santé du système cardiovasculaire.
Une étude internationale récente, publiée dans la revue Cell Stem Cell, avait d’autre part conclu à l’intérêt du jeûne intermittent dans la récupération des défenses immunitaires(2). Dans cette dernière étude les auteurs se sont tout particulièrement intéressés aux travaux concernant la «restriction calorique» (apport calorique quotidien réduit de 20 à 40% avec fréquence des repas inchangée), la «restriction d'énergie intermittente» (éliminer ou réduire fortement son apport calorique de manière fractionnée dans le temps), et la limitation de la consommation quotidienne de nourriture et de boissons à une période de 4 à 6 heures.
Seize heures d’arrêt
Au final les auteurs de l’étude publiée dans les PNAS retiennent une série de données convergentes issues d’études expérimentales faites sur l’animal et de données observées chez l’homme: les périodes de restriction énergétique d’une durée de seize heures (sur vingt-quatre) peuvent améliorer les indicateurs de santé et contrer certains processus physiopathologiques. Ces phénomènes semblent être la conséquence de modifications dans le métabolisme des graisses et dans les réactions de stress cellulaire adaptatif. Dès lors il semble essentiel pour ces auteurs d'élaborer de nouvelles stratégies diététiques visant à intégrer ces modifications des habitudes alimentaires à des fins sanitaires.
En d’autres termes les prescriptions concernant les régimes alimentaires devraient dépasser la seule question de la nature et de la quantité des aliments pour intégrer les horaires et le nombre des repas ainsi que la durée des périodes sans apport calorique. Il s’agit là d’une donnée essentielle en termes de santé publique qui n’ira pas sans bouleverser les rythmes et les modes de vie. C’est dire, ici, l’importance du travail de pédagogie que nécessite cette nouvelle approche du contrôle de son poids.
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(1) Un bref résumé (en anglais) de la publication des PNAS est disponible ici.
(2) Un bref résumé (en anglais) de cette étude est disponible ici.