Les statines sont utiles pour réduire les récidives d’AVC

Dernière mise à jour 13/02/14 | Article
Les statines sont utiles pour réduire les récidives d’AVC
Initialement élaborées pour permettre de contrôler un taux de cholestérol sanguin trop élevé, les statines ont aussi montré qu’elles diminuent le nombre d’accidents cardiovasculaires, et surtout les récidives. Une aubaine quand on sait que, dans le monde, près d’un décès sur quatre est dû aux maladies coronariennes et aux accidents vasculaires cérébraux.

De quoi on parle?

En novembre dernier, la société américaine de cardiologie a publié ses nouvelles recommandations pour soigner l’excès de cholestérol sanguin. Elles préconisent de traiter davantage les patients présentant un risque important d’accidents cardiovasculaires (infarctus et accident vasculaire cérébral). Elles ont cependant suscité de nombreuses réactions, car certains estiment qu’elles pourraient conduire à une explosion du nombre de patients sous statines, médicaments très controversés en raison de leurs effets secondaires.

Ainsi, plus de 35 millions de personnes en prendraient quotidiennement aux Etats-Unis – soit plus d’un Américain sur dix – et elles sont le deuxième médicament prescrit en Suisse. Les recommandations de l’Association américaine de cardiologie, publiées en novembre 2013, se fondent sur un nouveau mode de calcul du risque cardiovasculaire. Le point le plus critiqué est la préconisation de leur prescription à toute personne entre 40 et 75 ans dont le risque d’être victime d’un accident cardiovasculaire dépasse 7,5% sur dix ans. Certains estiment qu’aux Etat-Unis, 30% de cette classe d’âge seraient concernés. De quoi doubler les prescriptions.

Nouveau calcul du risque

«Ce nouveau mode de calcul a suscité un débat dans le monde médical, principalement parce qu’il est soupçonné de fournir une estimation du risque jusqu’à deux fois supérieure à l’échelle actuelle», réagit Nicolas Rodondi, chef de la Policlinique médicale à l’Hôpital de l’Ile, à Berne. Une surestimation qui pourrait être due notamment à l’utilisation de données datant de plus de vingt ans et qui ne seraient plus adaptées. Pour le médecin, il paraît évident que «ces recommandations ne peuvent être utilisées telles quelles en Suisse».

François Mach, chef du service de cardiologie des Hôpitaux universitaires de Genève et président de la Société suisse de cardiologie, n’imagine pas non plus une simple transposition des recommandations américaines en Suisse sans adaptation. Mais selon lui, la nouvelle méthode de calcul ne présente pas que des inconvénients. Le fait que le calculateur ne prenne pas en compte les valeurs de LDL-cholestérol (souvent appelé «mauvais cholestérol») ne serait ainsi pas un problème, bien au contraire: «La moitié des patients qui font un infarctus n’ont jamais présenté d’anomalie de leur bilan lipidique (taux de cholestérol) au préalable, souligne-t-il. Avec ce nouveau calcul, les mailles du filet vont certes se resserrer mais aussi devenir plus sélectives, et l’on peut espérer que ces patients soient repérés plus précocement.» Dans le cadre de la prévention primaire, c’est-à-dire pour les patients qui n’ont pas subi d’accident cardiovasculaire, modifier son hygiène de vie se révèle toujours payant et peut éviter de passer par un traitement. «C’est à nous, médecins, de faire comprendre à nos patients qu’il existe un seuil critique de 7,5% mais qu’il n’y a pas de fatalité et qu’ils peuvent agir pour rester en dessous!» reprend François Mach, avant d’avouer que tous les praticiens n’ont cependant pas encore un discours suffisamment adapté et que tous les patients ne sont pas capables d’accepter des efforts à long terme. «Mais c’est très motivant de voir que de plus en plus de personnes sont contentes quand on leur propose de commencer par autre chose que des médicaments», relève le médecin.

Prédispositions familiales

Parmi les nombreuses formes de l’hyperlipidémie (surplus de cholestérol et de triglycérides sanguins), celle dont la cause est familiale – entre 2 et 3% des patients – est particulièrement problématique car elle risque de ne pas être repérée assez tôt. «Chez ces patients, le premier accident cardiaque ou la première attaque cérébrale peut survenir tôt, parfois avant l’âge des premiers dosages de cholestérol sanguins», explique Nicolas Rodondi, chef de la Policlinique médicale à l’Hôpital de l’Île, à Berne. Ainsi, tout cas d’anomalie importante du bilan lipidique (cholestérol ou triglycérides très élevés dans le sang) ou d’accident cardiovasculaire à un âge précoce chez des parents proches doit amener à consulter. Les recommandations américaines proposent de traiter ces formes familiales d’hyperlipidémie avec une statine dès l’âge de 12 ans. Une approche très agressive selon Nicolas Rodondi, favorable lui à une prise en charge adaptée au cas par cas, avec l’aide d’une consultation spécialisée des lipides, comme celle qu’il dirige à Berne. 

Seuils empiriques

L’Association américaine de cardiologie innove aussi en préconisant de ne plus viser de taux plancher du LDL-cholestérol pour estimer que le traitement est efficace ou non. Une bonne chose selon Nicolas Rodondi, qui rappelle que ces seuils n’avaient pas été déterminés par des études mais relevaient davantage de l’empirisme. «Pour atteindre ces objectifs thérapeutiques, il fallait souvent augmenter les doses de statines ou ajouter un deuxième médicament. Or on sait aujourd’hui que l’apparition des effets secondaires est souvent liée à une dose trop importante de médicaments, alors que le bénéfice n’est pas proportionnel à la diminution du taux de cholestérol», explique le médecin.

Les statines sont utiles pour réduire les récidives d’AVC

Ces effets secondaires, principalement des douleurs musculaires et des troubles du foie, ont d’ailleurs pesé lourd dans les controverses dont les statines ont fait l’objet ces derniers mois. Leurs détracteurs ont dénoncé une efficacité très surestimée: prescrites trop largement, elles auraient fait plus de mal que de bien. De quoi semer le trouble parmi les patients, certains ont d’ailleurs préféré cesser leur traitement. «On ne commence pas ou l’on n’arrête pas un traitement sans en parler avec son médecin, martèle François Mach. Les statines ont peut-être été trop prescrites à un moment donné, mais elles n’ont jamais tué personne. Par contre, arrêter son traitement peut s’avérer très dangereux.» Si l’intérêt de prescrire des statines dans le cadre de la prévention primaire est aujourd’hui encore discuté, personne ne conteste l’utilité de ces médicaments chez des personnes qui ont déjà été victimes d’un infarctus ou d’un accident vasculaire. «Les statines restent effectivement le meilleur moyen de prévenir une récidive», confirme Nicolas Rodondi.

La levure de riz rouge n'est pas sans risque

Les personnes qui misent sur la levure de riz rouge pour faire baisser leur taux de cholestérol sanguin seraient de plus en plus nombreuses. Souvent considérée comme un complément alimentaire, cette levure est classée dans la liste des médicaments en Suisse. Si la preuve de son efficacité sur la baisse du cholestérol n’est plus à faire, c’est qu’elle contient de la monacoline K, substance qui présente les mêmes propriétés pharmacologiques que les statines. «C’est d’ailleurs une molécule de synthèse tout à fait identique qui est contenue dans la lovastatine, une des six statines actuellement sur le marché», précise Pierre-Yves Rodondi, spécialiste des médecines complémentaires au CHUV. Souvent ignorants du principe actif contenu dans cette levure de riz rouge, les consommateurs ne sont pas toujours conscients des contre-indications, voire des effets secondaires possibles.

«De plus, le dosage en monacoline K peut beaucoup varier d’une marque à l’autre ou d’un lot à l’autre, met en garde Pierre-Yves Rodondi. Si ce produit peut être une alternative aux statines classiques, il ne faut par exemple pas en prendre suite à un infarctus ou une attaque cérébrale et toujours l’indiquer à son médecin de famille, ne serait-ce que pour éviter des interactions avec d’autres traitements en cours.» Suite à des signalements d’effets secondaires (vingt-cinq cas depuis 2009), l’Agence nationale de la sécurité du médicament française a récemment ouvert une consultation sur les produits contenant cette levure.

En collaboration avec

Le Matin Dimanche

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